Les atteintes à la pudeur et à l'intégrité physique constituent les actes de violence le plus fréquemment commis à l'encontre des femmes. Mais ces derniers jours les menaces intégristes viennent compléter ce sinistre tableau. Sur les infractions criminelles jugées (234 affaires) par les différents tribunaux casablancais 64% concernent des atteintes à la pudeur au moment où 65% des infractions délictuelles jugées (3 830 affaires) portent sur des atteintes à l'intégrité physique. Ce sont les résultats d'une enquête statistique menée en début de l'année à l'initiative du ministère de la Justice avec l'appui du Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP) dans la circonscription juridictionnelle de Casablanca. Selon cette enquête pilote, dont les résultats ont été rendus publiques, il s'est avéré que les femmes âgées entre 20 et 29 ans représentent 27 pc des victimes de ces actes de violence, celles ayant entre 30 et 39 ans en constituent 25%. Et finalement 16% ont entre 40 et 49 ans, 16% moins de 19 ans et 17 pc plus de 50 ans. Quant à l'état matrimonial des victimes, celles-ci sont constituées de 48% de femmes mariées, 31% de célibataires et 11% de veuves et 10% de divorcées, indique en outre l'étude. En ce qui concerne les personnes qui ont été poursuivies pour actes de violence contre des femmes, elles sont 39% à être âgées entre 20 et 29 ans, 30% entre 30 et 39 ans, 15% entre 40 et 49 ans, 8% âgées de moins de 18 ans et 7% de plus de 50 ans. Les résultats de cette enquête, édités par le ministère dans un livre de 91 pages, sont disponibles en langues arabe et française dans le site web du ministère. Encore faut-il que tous les intervenants s'y mettent pour trouver le remède adéquat au phénomène de la violence contre les femmes sous toutes ses formes. Les cas de violence à l'égard des femmes, suivis par le Centre Annajda Rabat (Union de l'action féminine), de la période janvier-novembre 2002 s'élèvent à 1773. Des cas répartis selon les différentes formes de violence, allant de la demande de divorce pour sévices à l'agression physique en passant par le viol, l'expulsion du domicile conjugale, le harcèlement sexuel et l'inceste etc. Les caractéristiques de ces violences sont étroitement liées à l'analphabétisme, la pauvreté et autres fléaux sociaux. Si a cela s'ajoutent les agressions des intégristes à l'encontre des femmes leur intimant de porter le voile, le problème n'en est que plus grave. Selon Latifa Jbabdi, une militante de longue date pour les droits de la femme, «ce qui vient de se passer dernièrement sort de l'ordinaire. On n'est plus devant des cas de violence conjugale ou domestique dont la portée culturelle est ancrée dans le passé. Il s'agit d'une tendance à caractère terroriste. Certes ce ne sont que des cas isolés, mais on ne peut rien garantir dans un avenir proche. Car il s'avère désormais que la sécurité de la femme est menacée à n'importe quel moment. Les livres et les cassettes incitant les intégristes à suivre ce chemin sont disponibles partout dans le Royaume. Il est vrai que le but de ces actes est justement de semer la peur parmi la gente féminine, un impact qui se veut percutant, mais cela n'empêche que tous les intervenants, que ce soit l'Etat ou la société civile, doivent prendre leurs responsabilités et parer ce genre de dérapage dangereux». Autant dire qu'il y a encore du pain sur la planche avant de pouvoir vraiment mettre fin à ce mal endémique.