A l'instar du tourisme, les différents secteurs industriels du Maroc seront dotés d'une vision étalée sur dix ans. Les conclusions d'une étude d'envergure confiée au cabinet Mckenzie serviront de plate-forme à la mise en place d'une stratégie globale. Engagée depuis quelques mois, l'étude Mckenzie sur les secteurs industriels au Maroc est aujourd'hui fort avancée. Cette enquête en plusieurs volets marque la rupture avec la stratégie du point à point et du système de résolution des problèmes, secteur par secteur. Elevée en quasi-stratégie depuis les années 60, l'approche par intuition a largement montré ses limites et ses faiblesses. En lieu et place, la recherche d'une solution durable devient indispensable. Les différents ALE signés par le Maroc, avec l'Union européenne, les USA, le groupe d'Agadir, la Turquie, les Emirats arabes unis rendent l'ouverture de l'économie inéluctable. Protégées jusque-là par des droits de douane élevés, les entreprises marocaines doivent désormais voler de leurs propres ailes et chercher de nouveaux débouchés. En 2010, le démantèlement douanier sera effectif avec les USA et le voisin européen. Depuis le premier janvier, il l'est déjà avec l'ensemble des pays arabes. Comme on l'a vu pour le tourisme, dès lors qu'il y a une stratégie, une dynamique se crée. Salah Eddine Mezouar table là-dessus et cite volontiers l'exemple de la Malaisie où les objectifs stratégiques du pays sont affichés même dans les halls des aéroports. Au terme de cette vaste investigation, tous les secteurs seront dotés d'une vision stratégique, à l'instar du programme 2010 du ministère du Tourisme. L'intérêt c'est de sonder en profondeur toutes les activités et surtout pour chaque produit, de déterminer les marchés porteurs. Les associations et les fédérations concernées sont associées à cette démarche devenue nécessaire avec l'élargissement de l'Union européenne vers l'Est, la fin des accords multifibres, la montée en force des pays émergents et les nombreux accords de libre-échange signés avec d'autres pays. Ce grand chantier est coordonné par plusieurs ministères. Il y a d'abord Salahdine Mezouar, le ministre de l'Industrie, qui aura à utiliser souvent les conclusions de cette étude pour redonner du souffle à un secteur dont la contribution au PIB stagne à 17%. Egalement dans le comité de pilotage, Adil Douiri, ministre du Tourisme et de l'Artisanat, auréolé de la mobilisation générale faite autour de la vision 2010. Quant à Rachid Talbi Alami, fin connaisseur du secteur dont il fut ministre, il trouvera sûrement une jonction entre l'étude Mackinsey et la mise à niveau du secteur. L'étude va définir le potentiel économique et industriel du pays. Un benchmarking des marchés potentiels régionaux (Afrique, Moyen-Orient) sera dressé pour donner plus de visibilité aux industriels. Ceux-ci devront passer d'une activité qui trouvait sa seule raison d'être dans la production à celle où la commercialisation (le marché) est prépondérante. Derrière, il y a tout le chantier de la mise à niveau qui reste à parachever. «L'échec de la mise à niveau résulte de l'absence d'une bonne coordination, d'une bonne méthode», regrette Rachid Talbi Alami. Ce ne sont pas les ténors de l'agro-industrie qui vont dire le contraire. Dans ce secteur, 84% des entreprises n'ont pas accès aux fonds mis en place par les autorités publiques. Même constat chez les textiliens qui ont tiré depuis longtemps les leçons du «Fortex». A terme, il s'agira de faire progresser d'au moins dix points la part de l'industrie marocaine. L'étude définira d'ici là une branche, un métier, un produit et, partant, déterminera les marchés intéressés. Forcément, confie un responsable ministériel, derrière cet état des lieux, il y aura toute une refonte de l'activité et des dépenses de promotion du Maroc à l'étranger. Le choix sera ensuite cornélien ; des secteurs, dépassés dans la nouvelle division mondiale du travail, sont appelés à faire leur bilan. Exercice qui convaincra sans doute certains du bienfait d'un redéploiement vers les autres secteurs. En somme, la vision industrielle définira les métiers stratégiques, ceux qui pourront faire gagner au Maroc des points de croissance.