Les griefs formulés à l'encontre de l'exécutif dirigé par le RNI sont nombreux : suspension ou retrait de plusieurs projets de loi relatifs à la moralisation de la vie publique, mépris des mécanismes de reddition des comptes, adoption unilatérale de textes ayant trait aux droits et aux libertés fondamentales, multiplication des cas de conflits d'intérêts et d'abus de pouvoir, et obstruction systématique, par les formations de la majorité, à la constitution d'une commission d'enquête parlementaire sur les anomalies ayant entaché les opérations d'importation du cheptel destiné à la consommation. L'opposition siégeant à la Chambre des représentants compte entériner le dépôt d'un projet de motion de censure pour démettre le gouvernement en vertu de l'article 105 de la Constitution. Cette démarche, portée par les principales forces adverses de la majorité, se veut, selon ses promoteurs, un «exercice de salubrité démocratique» destiné à ressusciter un débat politique atone et à soumettre l'Exécutif à ses obligations fondamentales. La motion, dont l'adoption entraînerait ipso facto la démission collective de l'équipe gouvernementale, incarne un désaveu alimenté par «l'incapacité manifeste du gouvernement à honorer les engagements qu'il a librement contractés dans le cadre de son programme et que la majorité avait pourtant avalisés», déclare un communiqué émanant de la direction d'un parti d'opposition, à l'issue d'une réunion tenue à Bouskoura à la clôture de son congrès national. Carence, opacité et dérives unilatérales Les griefs adressés à l'exécutif sont d'une rare sévérité : retrait ou gel de textes relatifs à la transparence publique, contournement des mécanismes de contrôle parlementaire, adoption de lois structurantes touchant aux droits et libertés selon une logique «exclusive et autoritaire», multiplication des conflits d'intérêts et des abus de position, refus d'adhérer à une commission d'enquête parlementaire chargée de faire la lumière sur les irrégularités entourant l'importation du bétail subventionné. La motion doit, conformément à la Constitution et au règlement intérieur de la Chambre, être accompagnée d'un mémoire circonstancié, signé par au moins un cinquième des députés, et précisant les groupes parlementaires ou affiliations des signataires. Le président de la Chambre est tenu d'en assurer la publication au procès-verbal officiel, dans le bulletin interne et sur le portail électronique de l'institution. Une procédure encadrée par la Constitution Aucun député ne peut apposer sa signature sur plus d'une motion de censure simultanément. Toute modification, retrait ou ajout est prohibé une fois le texte déposé. Le bureau de la Chambre fixe la date de la séance plénière dans un délai maximal de sept jours. Le vote ne peut avoir lieu qu'après l'écoulement de trois jours francs et seuls les suffrages favorables sont comptabilisés. La motion n'est adoptée qu'à la majorité absolue des membres composant l'assemblée. En cas d'adoption, aucune nouvelle motion ne pourra être soumise au cours des douze mois suivants. Ce recours, rare dans la pratique institutionnelle marocaine, pourrait inaugurer une nouvelle phase de tensions entre le Parlement et un gouvernement dont la légitimité politique se trouve désormais ouvertement contestée.