Dans un discours empreint de hauteur de vue, lu en son nom par le ministre des affaires étrangères Nasser Bourita à l'ouverture du 34e sommet de la Ligue des Etats arabes à Bagdad, le roi Mohammed VI a appelé les dirigeants arabes à s'engager résolument en faveur d'une paix durable au Proche-Orient, d'un sursaut économique régional et d'un véritable réexamen des mécanismes de coopération interarabe. Soulignant avec fermeté la «situation dramatique» dans les territoires palestiniens, «où la population civile sans défense de Cisjordanie et de la bande de Gaza compte chaque jour des dizaines de victimes», le souverain a dénoncé «les violations graves du droit international, du droit international humanitaire et des droits humains» perpétrées contre le peuple palestinien. Dans un plaidoyer structuré autour de cinq mesures concrètes, le roi du Maroc a proposé : «l'arrêt immédiat des opérations militaires», «le retour à la table des négociations», «la levée des entraves à l'acheminement de l'aide humanitaire», «le soutien sans équivoque à l'UNRWA» (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine), et «la mise en œuvre effective du plan de reconstruction adopté au Caire, sous supervision arabe et internationale». «La réconciliation nationale demeure la clé majeure pour conforter la position palestinienne dans tout processus de paix à venir», a insisté le souverain, qui a également rappelé son engagement personnel, en tant que président du Comité Al-Qods, à préserver le caractère sacré et l'identité spirituelle de Jérusalem, par l'action conjointe de la diplomatie marocaine et de l'Agence Bayt Mal Al-Qods. Un appel à repenser l'architecture institutionnelle arabe Elargissant sa réflexion à l'état de la région, le roi a déploré le caractère morcelé et inabouti de l'édifice institutionnel arabe. «L'Action arabe conjointe ne saurait être pleinement efficace que si le chantier de réforme de notre Organisation (...) est mené à terme», a-t-il observé, appelant à une reconfiguration des priorités autour de la sécurité alimentaire, de la rareté de l'eau, du bouleversement climatique et de la transition vers un modèle économique soutenable. À ce titre, il a souligné la nécessité d'investir dans «les énergies renouvelables, l'intelligence artificielle et les nouvelles technologies» afin d'arrimer la région arabe aux transformations à l'œuvre dans le monde. Tout en déplorant «la faiblesse persistante des échanges intra-régionaux», le roi Mohammed VI s'est particulièrement attardé sur «la paralysie prolongée de l'Union du Maghreb arabe», affirmant que celle-ci «ne remplit pas son rôle naturel de levier de développement commun». Le Maroc plaide pour la souveraineté, le dialogue et la réconciliation Sur le terrain politique, le souverain chérifien a réaffirmé la constance des positions marocaines en faveur de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et du rejet de toute immixtion étrangère dans les affaires internes des Etats arabes. À propos de la crise libyenne, il a rappelé l'engagement du Royaume «en faveur d'un dialogue fécond entre les acteurs politiques». Quant à la Syrie, il a annoncé une décision de portée historique : «le Royaume du Maroc a décidé la réouverture de son ambassade à Damas, fermée en 2012», saluant «la promesse d'un processus politique de réconciliation». Le roi s'est dit «vivement préoccupé» par les tensions persistantes au Yémen, au Soudan et au Liban, assurant que «le Maroc appuiera toute démarche sérieuse en faveur de la paix et de la stabilité». En conclusion, le souverain a réaffirmé la disposition de Rabat à s'engager «dans toute dynamique susceptible de rehausser l'action arabe conjointe», exhortant à «une volonté politique sincère» qui repose sur «le respect mutuel, la coopération équitable et la lucidité historique».