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Gestion défaillante, comptes incomplets, normes ignorées : la Cour des comptes dresse un tableau accablant de la comptabilité partisane au titre de l'année 2023
L'examen annuel de la Cour des comptes relatif aux finances des formations politiques laisse apparaître, une fois encore, un relâchement manifeste dans le respect des règles les plus élémentaires de la comptabilité publique. Sur les 33 partis enregistrés, seuls 27 ont produit leurs comptes au titre de l'exercice 2023, marquant une régression par rapport aux années précédentes. Parmi ceux-ci, une majorité écrasante se distingue davantage par ses manquements que par sa rigueur. Selon ce rapport, 22 partis seulement ont déposé leurs documents dans les délais impartis par la loi, tandis que cinq se sont exécutés hors échéance et six se sont purement abstenus de toute transmission. La certification des comptes, pourtant exigée, n'a été effectivement obtenue que par 23 partis — contre 28 en 2021 — et quatre d'entre eux ont livré des états financiers sans aucune attestation d'un expert-comptable. La Cour note que même parmi les comptes dits certifiés, la conformité demeure incertaine : deux partis ont utilisé une formulation non réglementaire dans les rapports de certification, contrevenant à la norme 5700 du Conseil national de l'Ordre des experts-comptables du Maroc. De plus, quatre formations ont vu leurs comptes assortis de réserves, révélant des carences structurelles inquiétantes : absence de manuel de procédures, opacité des flux financiers au niveau provincial, irrégularités relatives au Code du travail, ou encore flou juridique entourant la propriété de certains biens. Le constat ne s'arrête pas à ces écarts techniques. Sur les 27 partis ayant produit des comptes, 23 sont concernés par des observations critiques : défaut de production des états financiers complémentaires (ETIC), absence de relevés bancaires complets, ou encore non-remise des états de dépenses et des rapprochements bancaires. Pire encore, certains partis semblent ignorer les principes comptables fondamentaux tels que l'intangibilité du bilan ou la spécialisation des exercices. La Cour déplore également la persistance de manquements déjà signalés les années antérieures. Parmi eux, l'absence de comptabilisation des montants à restituer au Trésor (15 partis), des erreurs d'imputation comptable (11 partis) ou encore la méconnaissance des modèles normalisés exigés par le plan comptable spécifique aux partis politiques. Quant à la gestion administrative et humaine, le tableau n'est guère plus reluisant. Sur les 27 partis interrogés, 27 % ne prévoient aucun budget prévisionnel, plus de la moitié ne disposent d'aucun mécanisme de suivi pour les cotisations et dons, et une partie importante fonctionne sans employés déclarés. Le déséquilibre est criant : deux partis regroupent à eux seuls plus de 60 % du personnel recensé, quand six autres n'emploient personne. La formation du personnel, quant à elle, reste négligeable, confinée à quelques sessions sporadiques. Par cette synthèse, la Cour des comptes ne fait que confirmer un état de fait préoccupant : les partis politiques, bénéficiaires de fonds publics, échappent pour beaucoup à l'exigence de redevabilité. Entre lacunes comptables, opacité administrative et incurie dans la gestion des ressources humaines, ces formations peinent à répondre aux exigences minimales d'une transparence que leur rôle démocratique devrait pourtant leur imposer.