Le think-tank espagnol « Institut Elcano » estime que l'accroissement de la population d'origine arabe et berbère dans les présides occupés de Sebta et Melillia, constitue une « menace pour leur stabilité sociale et politique ». Dans son dernier rapport, l'institut Elcano souligne qu'n l'absence d'un développement économique parallèle, cet accroissement pourrait avoir des conséquences sur la dégradation des conditions de vie. Le document met en garde contre les « conflits de type ethnique et religieux qui s'expriment déjà électoralement ». L'institut prévoit une détérioration irréversible dans la mesure où les problèmes causés par le changement démographique et culturel dans les deux villes « ont un caractère structurel dont les effets peuvent être retardés mais pas évités ». Le think-tank donne comme exemple la pression exercée sur l'hôpital Comarcal de Melillia, qui, le 3 décembre dernier, a connu une « avalanche » de femmes enceintes marocaines qui viennent accoucher dans cet établissement. Ce jour là, 15 enfants marocains sont nés contre un seul espagnol.
En l'absence d'un recensement de la population par groupes ethniques de la part de l'Institut national des statistiques espagnol, Elcano estime qu'à Melillia, 50% de la population et 70% des écoliers sont arabes ou berbères. Par ailleurs, prés de 28% des naissances enregistrées à Sebta en 2015 l'ont été de femmes étrangères, alors qu'à Melillia, 75% des naissances enregistrées durant les 15 dernières années sont d'origine marocaine. Cette inquiétude, selon cet institut, n'a pas encore atteint la sphère politique et d'aucuns estiment qu'il est seulement question de temps. Il en veut pour preuve, les voix recueillies par des partis politiques à idéologie musulmane (24% à Melillia et 17% à Sebta). A ce rythme, prévient Elcano, « Melillia sera prochainement, si elle ne l'est déjà, une ville principalement berbère et arabe, et Sebta finira par lui emboiter le pas plus tard ». Pour l'Espagne, les risques d'un changement démographique et d'identité culturelle à Sebta et Melillia sont d'ordre social, politique et de sécurité nationale. Le rapport indique par ailleurs que la population de Sebta s'est accrue de 29%, contre 60% pour celle de Melillia depuis 1986, comparé à une croissance moyenne de 22% dans l'ensemble de l'Espagne. L'institut Elcano n'hésite pas à parler de « marocanisation ethnique » de la population dans ces deux présides en raison de l'augmentation du taux de nuptialité (5,6% pour Sebta et 4,3 pour Melillia comparé à la moyenne nationale espagnole qui est de 3,5% de mariages para an pour chaque 1000 habitants. Le document révèle en outre que le taux du chômage atteint 38% à Sebta et 32% à Melillia, une situation qui illustre bien l'échec scolaire, le plus élevé en Espagne, à cause notamment du fait que la majorité des élèves parle l'amazigh et l'arabe dialectal chez eux, et que l'espagnol n'est utilisé que comme langue scolaire. Par ailleurs, la séparation des formes de vie entre les communautés de culture chrétienne et musulmane, ne fait qu'exacerber les conflits sociaux, politiques, ethniques et religieux, souligne le rapport. Ce dernier constate d'ailleurs une augmentation de la « radicalisation » au sein des communautés musulmanes, ce qui fait de Sebta et Melillia, aux cotés de la Catalogne, deux foyers principaux de recrutement jihadiste en Espagne. Ajouter à cela, une augmentation du nombre d'arrivées dans ces deux enclaves d'immigrés irréguliers provenant de la Syrie tout au long des années 2013 et 2014. Le changement démographique et culturel à Sebta et Melillia peut donner lieu à l'apparition de « cygnes noirs », menaces imprévues pour la sécurité nationale, ou l'entrée en conflit du Maroc et l'Algérie, deux acteurs fondamentaux pour les intérêts et la survie de l'Espagne. Elcano signale qu'une éventuelle « convulsion » au Maroc, en particulier si elle remet en question la monarchie, peut amener ce pays à « serrer la corde avec l'Espagne comme il l'a fait dans le passé ».