Le Maroc multiplie les contributions de haut niveau lors de la 42e Conférence européenne sur l'énergie solaire photovoltaïque (EU PVSEC), ouverte ce matin à Bilbao et prévue jusqu'au 26 septembre. Cette grand-messe mondiale du solaire, qui rassemble plusieurs centaines d'experts issus de plus de trente pays, offre aux chercheurs marocains une tribune d'exception pour exposer leurs travaux, révélateurs d'un engagement soutenu dans les technologies émergentes du photovoltaïque. La recherche marocaine élabore des méthodes inédites en environnement désertique et semi-aride Les équipes marocaines, issues notamment du Green Energy Park (Ben Guerir), de l'université Mohammed V (Rabat), de l'université Cadi Ayyad (Marrakech), de la FST Fès, ou encore de l'université Chouaïb Doukkali (El Jadida), abordent des problématiques concrètes et localisées, tout en s'insérant dans une réflexion globale sur l'avenir du solaire. Trois chercheurs marocains du Green Energy Park apportent notamment leur concours à une étude mondiale sur les bases de données de rayonnement solaire, saluée pour sa rigueur méthodologique : «Anne Forstinger, Stefan Wilbert, Adam R. Jensen (...) Faiza Azam, Jesus Polo (...) Abdellatif Ghennioui, Mounir Abriam...» figurent parmi les auteurs du projet international présenté dans la session 4AO.7.1 sur l'évaluation des ressources solaires. L'étude vise à enrichir une base de données mondiale soumise à un contrôle qualité renforcé, permettant une comparaison fiable entre les mesures satellitaires et au sol. «Green Energy, Ben Guerir, Morocco» est explicitement cité comme institution contributrice, aux côtés d'une trentaine de partenaires internationaux. Dans le prolongement de cette réflexion sur la caractérisation solaire, les chercheurs Mounir Abraim, Faïza Zahra Ouchani et Abdellatif Ghennioui livrent une cartographie scientifique des pertes de rendement dues à l'encrassement des panneaux photovoltaïques au Maroc. Présentée sous le titre «Mapping and Analysis of Soiling Losses in Morocco for PV Performance Optimization», cette communication orale (4CO.8.3) fait état d'une corrélation étroite entre les dépôts de poussières et le taux de perte énergétique. L'approche croise données météorologiques, observations in situ et modélisations statistiques. L'université Mohammed V met en avant les recherches de Mehdi Alla, Soukaina Daim, Hicham Zalrhi et Lahcen Atourki sur des pérovskites chalcogénures sans plomb à base de baryum, simulées via SCAPS-1D et méthodes DFT, avec des rendements théoriques supérieurs à 30 %. Leur communication, «SCAPS-1D Simulation and DFT Study of Lead-Free BaXSe3 (x = Zr, Ti, Hf) Chalcogenide Perovskite Solar Cells...», présentée sous forme de poster (2CV.3.68), explore de nouveaux matériaux semi-conducteurs, adaptés aux exigences environnementales contemporaines. Les institutions marocaines conçoivent des plates-formes hybrides et des outils d'évaluation avancée Dans le champ de la conception modulaire et de l'ingénierie de systèmes, une équipe conjointe du Green Energy Park et de l'université Chouaïb Doukkali présente une méthode innovante pour l'analyse des modules à demi-cellules PERC. Leur présentation visuelle 3AV.3.1, intitulée «A New Method for Comprehensive Power Rating and Performance Analysis of PERC Modules...», introduit des critères de classification jusqu'ici peu explorés, à partir de mesures dynamiques en environnement réel. De son côté, la Faculté des sciences et techniques de Fès (FST) dévoile une plate-forme de suivi solaire dédiée aux systèmes à concentration (CPV). Le poster «Research Platform for Evaluating Solar Tracking in CPV Applications», signé par Imane Ourraoui et Abdelali Ahaitouf (4DV.1.59), met en avant une architecture de contrôle adaptatif conçue spécifiquement pour les régions à fort ensoleillement. L'université Cadi Ayyad, en collaboration avec l'université Ibn Zohr d'Agadir, présente une analyse complète de la dégradation d'un système photovoltaïque hybride couplé à un stockage par batterie. L'étude, «Performance Degradation of a Hybrid Photovoltaic System with Battery Storage», explore l'évolution des performances en conditions de fonctionnement prolongées et souligne l'importance de stratégies de maintenance spécifiques aux contextes sahariens. Enfin, les ingénieurs du Green Energy Park clorent leur série d'interventions par une proposition audacieuse autour de la cogénération photovoltaïque et éolienne appliquée à la production d'hydrogène. La communication 5DV.3.44, «PV+Wind Cogeneration for Hydrogen Development... Using OPA-GIS», défend une approche cartographique intégrée (OPA-GIS) pour identifier les zones optimales de production couplée. «Faïza Zahra Ouchani et Abdellatif Ghennioui» y explorent une méthode prospective de modélisation du potentiel hydrogène dans le cadre de la transition énergétique marocaine. Panorama mondial : les nations s'organisent autour des grandes familles technologiques Outre les interventions marocaines, l'EU PVSEC 2025 confirme le rôle central de plusieurs grands pôles technologiques. L'Allemagne, omniprésente dans les domaines des cellules TOPCon, HJT et IBC, s'illustre à travers les institutions Fraunhofer ISE, ISFH et HZB. L'Espagne (IREC, CIEMAT), la France (CEA-INES, IPVF), la Suisse (EPFL, CSEM) et les Pays-Bas (TU Delft, TNO) livrent également des communications majeures dans les technologies tandem (pérovskite/silicium), les systèmes BIPV, et les méthodes de prévision solaire. En matière de thématiques scientifiques, les cellules CIGS donnent lieu à des échanges nourris lors d'une session dédiée, avec des contributions venant d'une quinzaine de laboratoires européens. De nombreux travaux sur les modules colorés pour le bâtiment (BIPV), les techniques de cartographie de l'irradiance, ou encore les outils de modélisation prédictive fondés sur l'intelligence artificielle structurent le débat. Les éléments constitutifs de l'événement en font une plate-forme incontournable de la recherche photovoltaïque La conférence se tient à Bilbao, du 22 au 26 septembre sous l'égide du Joint Research Centre (JRC) de la Commission européenne, de Fraunhofer ISE et de plusieurs instituts de recherche européens. Elle se déroule en format exclusivement présentiel, avec une succession de sessions plénières, panels de discussion, présentations orales et posters. Le programme compte plusieurs centaines de communications scientifiques, regroupées en près de 80 sessions distinctes. Les organisateurs n'ont pas fourni de chiffre officiel quant au nombre de participants, mais les affiliations des auteurs suggèrent une représentation étendue couvrant plus de trente nations. Parmi les orateurs principaux figurent Gaëtan Masson (Becquerel Institute), Walburga Hemetsberger (SolarPower Europe), Teresa Barnes (NREL, Etats-Unis), José Donoso (UNEF, Espagne), et Anita Mohan Goel (SECI, Inde). La session inaugurale, intitulée «PV Everywhere», donne le ton, en évoquant les perspectives d'un photovoltaïque intégré à tous les niveaux, des satellites aux exploitations agricoles, en passant par les toitures urbaines. «Outlook into PV Growth Beyond Grid Flexibility via Integration with Storage and Fuels», comme le résume Uwe Rau, souligne l'importance d'un couplage fort entre production solaire, stockage et vecteurs énergétiques secondaires. Loin de se borner à une approche techniciste, l'EU PVSEC 2025 montre que la recherche photovoltaïque actuelle articule désormais des considérations d'ingénierie, d'urbanisme, de climatologie et de politique industrielle. Le Maroc, par ses contributions nombreuses et rigoureuses, s'y distingue comme un acteur scientifique pleinement conscient des enjeux globaux.