La pauvreté multidimensionnelle a nettement reculé au Maroc entre 2014 et 2024, d'après une nouvelle étude du Haut-Commissariat au Plan (HCP). Néanmoins, de profondes disparités territoriales subsistent, puisqu'on est toujours face à un phénomène touchant essentiellement le milieu rural. « À l'échelle nationale, la part de la population en situation de pauvreté est passée de 11,9% à 6,8%. En valeur absolue, le nombre de personnes concernées a diminué d'environ 4 millions à 2,5 millions », indique le HCP dans son étude intitulée « Cartographie de la pauvreté multidimensionnelle : Paysage territorial et dynamique ». Parallèlement, l'intensité de la pauvreté, mesurée par le pourcentage moyen des privations subies par les pauvres, s'est légèrement atténuée, de 38,1% à 36,7% », précise l'étude qui s'appuie sur les données des recensements généraux de la population et de l'habitat de 2014 et 2024. Lire aussi | Inflation : hausse de 0,7% de l'IPC en avril Combinant ces deux baisses, l'indice de la pauvreté multidimensionnelle, qui extrapole ces privations à l'ensemble de la population marocaine, a été quasiment divisé par deux, reculant de 4,5% à 2,5% sur la décennie, fait savoir la même source. Pourquoi le HCP a-t-il opté pour cette méthode pour mener son enquête ? L'institution de Chakib Bensmoussa explique que l'approche de mesure de la pauvreté absolue, fondée exclusivement sur la distribution sociale des dépenses des ménages, ne reflète qu'un aspect partiel de la réalité vécue, en laissant de côté les privations liées à l'éducation, à la santé, au logement ou encore à l'accès aux services sociaux de base. Quant à l'approche de la pauvreté multidimensionnelle, elle reconnaît que les privations subies par les ménages ne se limitent pas au pouvoir d'achat mais aussi leur accès à ces besoins fondamentaux. Cette approche repose sur trois dimensions, éducation, santé et conditions de vie, pondérées de manière égale. Par ailleurs, le HCP relève la forte persistance des disparités territoriales. En 2024, près de 72% des personnes pauvres résident encore dans les campagnes, contre 79% en 2014. Lire aussi | Le Maroc enregistre des avancées notables en matière d'inclusion financière, estime l'ONU Sur la même période, le taux de pauvreté rurale a certes reculé, passant de 23,6% à 13,1%, mais il demeure plus de quatre fois supérieur à celui des zones urbaines, stabilisé à 3% en 2024, contre 4,1% en 2014. Le taux de vulnérabilité à la pauvreté multidimensionnelle – c'est-à-dire la part de la population exposée à des privations modérées, entre 20% et 33% des indicateurs retenus – a également reculé, passant de 11,7% à 8,1% entre 2014 et 2024. Cela représente près de trois millions de personnes se situant encore dans cette zone intermédiaire, dont 82% en milieu rural. Une telle concentration atteste du risque réel de basculement dans la pauvreté pour les ménages ruraux. Ladite étude révèle aussi que toutes les régions du Royaume ont enregistré une baisse du taux de pauvreté multidimensionnelle au cours de la dernière décennie, avec des reculs particulièrement nets dans les zones initialement les plus touchées. Lire aussi | Les résultats de l'enquête du HCP sur le niveau de vie des ménages en 9 chiffres clés Les baisses les plus marquées ont concerné Marrakech-Safi (-7,9 points de pourcentage), Béni Mellal-Khénifra (-7,5 points), Tanger-Tétouan-Al Hoceïma (-6,8 points) et Drâa-Tafilalet (-6,7 points), toutes caractérisées en 2014 par des niveaux élevés de pauvreté. En revanche, dans les régions du Sud et les grandes régions urbaines, où les taux étaient déjà bas, les diminutions sont restées modestes, avec -0,9 point à Laâyoune-Sakia El Hamra, -2 points à Dakhla-Oued Eddahab, -2,4 points à Casablanca-Settat et -3,4 points à Rabat-Salé-Kénitra.