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INTERVIEW exclusive de Nizar Baraka ministre des Affaires économiques et générales : "le système de compensation est un système de subvention généralisé et aveugle "
Publié dans Challenge le 05 - 07 - 2008

Un intéressant tour d'horizon avec le ministre des Affaires économiques et générales du gouvernement. Compensation, mécanismes en place, conjoncture actuelleet perspectives à court et moyen termes…
Challenge Hebdo : quelles sont les failles du système actuel de la compensation au Maroc et quels déséquilibres provoquent–ils sur le pouvoir d'achat confronté au renchérissement des coûts de la vie ?
Nizar Baraka : dès ma nomination à la tête du ministère des Affaires économiques et générales, les services de ce département ont procédé à une remise à plat et à un diagnostic approfondi du système de compensation. Ce diagnostic a permis de déceler un ensemble de dysfonctionnements qui concernent aussi bien le volet juridique, la compensation étant régie par plusieurs textes législatifs et réglementaires obsolètes et non cohérents, que le niveau budgétaire, l'enveloppe réservée à la compensation est devenue importante et non maîtrisable, résultant de la flambée des cours des produits compensés, alimentaires, pétroliers et gaz butane d'une part, et de la croissance de la consommation d'autre part. D'autres dysfonctionnements sont liés au manque de ciblage. En effet, le système de compensation est un système de subvention généralisé et aveugle profitant beaucoup plus aux classes aisées qu'à la population démunie. Cette dernière ne profite que de 9% du budget de compensation alors que 20% de la population aisée bénéficie de 43% de ce budget. Concernant les produits pétroliers, 20% de la population aisée profite de 75% du budget de la compensation alors que 20% de la population démunie n'en profite que de 1%.
C. H. : quelles sont les anomalies héritées de l'ancien système que l'Etat continue de subventionner ?
N. B. : en plus de ce que je viens de citer et qui représente les imperfections globales du système, on peut déceler un nombre d'anomalies liées aux systèmes de compensation appliqués à chaque secteur. Au niveau sectoriel, il est remarqué un ensemble de déperditions de subvention dues à des structures de fixation de prix non conformes aux coûts réels. La majorité de ces structures n'a pas été actualisée et présente des surcoûts qui sont supportés par la compensation. L'organisation des secteurs subventionnés présente des multitudes d'intervenants, ce qui gonfle encore plus les montants compensatoires alloués à ces secteurs.
C. H. : quelles sont les incidences budgétaires suite à l'inflation internationale ?
N. B. : suite à la flambée des cours des matières premières, surtout pétroliers, le gouvernement, dans le souci de préserver le pouvoir d'achat des citoyens, a continué à subventionner lesdits produits en augmentant le budget de la compensation qui atteindrait 36 milliards de DH au terme de l'année 2008, enveloppe qui équivaut à celle prévue au titre de la Loi de finances 2008 pour le budget d'investissement. Pour rappel, elle ne dépassait pas les 4 milliards de DH en 2002. A cette enveloppe s'ajoutent les moins-values résultant de la suspension des droits de douane sur les céréales et le beurre et la suppression de certaines taxes, notamment la taxe sur le son. Il faut signaler que d'autres produits, comme le blé tendre destiné à la fabrication des farines libres et le gasoil destiné à la pêche côtière, ont été intégrés dans le système de compensation pour la première fois.
C. H. : quelles sont les grandes lignes de la réforme en cours de la Caisse de compensation ?
N. B. : suite au diagnostic réalisé, une stratégie de réforme a été mise en place qui vise la maîtrise de l'enveloppe budgétaire, l'efficacité économique et l'équité et le renforcement de la protection sociale. La réforme consiste à transformer le système actuel en un système à deux étages. Le premier niveau porte sur l'optimisation du système de subvention des prix des produits de première nécessité et ce, pour maîtriser l'inflation et préserver ainsi le pouvoir d'achat de la classe moyenne. Le deuxième volet concerne le ciblage direct des démunis dans l'objectif de leur permettre de faire face aux évolutions des prix et de créer pour eux des ponts de sortie de la pauvreté et de l'exclusion.
C. H. : quel est le calendrier pour l'achèvement des études et la mise en œuvre du nouveau système de compensation à deux étages ?
N. B. : la réforme a commencé au 1er juillet 2008 en ce qui concerne le secteur de la farine subventionnée puisque, à partir de cette date, il a été mis en place un nouveau système de redéploiement de la répartition de cette farine. La nouvelle répartition du contingent considéré a été faite sur la base de critères de la pauvreté et en prenant en considération les communes arrêtées comme défavorisées dans le cadre de l'INDH. Une autre disposition entrera en vigueur le 1er octobre 2008 relative à l'affichage du prix de la farine subventionnée sur le sac, ce qui mettra fin à la spéculation. Dans ce cadre, je voudrais rendre hommage aux professionnels de la minoterie industrielle qui se sont inscrits, avec nous, dans la vision de soutien du pouvoir d'achat et d'amélioration du ciblage géographique. D'autres opérations s'inscrivent dans le court terme et intéressent la mise en place d'un système de péréquation des prix du sucre et, éventuellement, l'affichage de son prix sur les emballages, ainsi que la mise en place d'une structure allégée des prix des produits pétroliers et gaziers avant début janvier 2009. Le deuxième étage de la réforme qui nécessite plus de temps consiste en la possibilité d'octroyer une aide directe aux populations démunies combinée à des conditionnalités visant l'amélioration des conditions de vie des populations cibles notamment en matière de scolarisation, de nutrition et de santé. Cette action s'inscrit dans des délais à moyen terme parce qu'il faut agir en concertation avec tous les opérateurs privés et institutionnels dans le but d'arrêter les critères d'éligibilité, les modalités de transferts, les systèmes de suivi et d'évaluation et les organismes chargés du suivi et de l'exécution de cette opération.
C. H. : en quoi consiste la mission des experts marocains en Amérique latine et en Indonésie ?
N. B. : les objectifs de la mission d'experts marocains au Chili, au Mexique et en Indonésie, dans le courant de ce mois de juillet, consistent en la prospection des pistes de réformes engagées par les pays concernés en matière de réforme de la compensation des produits alimentaires et des produits pétroliers et gaziers, surtout le gaz butane. Les experts auront à étudier les mécanismes des réformes, les méthodes d'identification des populations bénéficiaires et les critères d'éligibilité retenus, le mode de gouvernance et de suivi mis en place, l'évaluation des résultats. Les experts approcheront les points forts à adapter au cas marocain de même que les points faibles à éviter.
C. H. : quels sont les points forts de la réforme du secteur de l'énergie et ses répercussions sur la compensation appliquée aux prix des combustibles et carburants ?
N. B. : la réforme du secteur de l'énergie s'inscrit dans le cadre de la stratégie globale de la réforme du système de compensation dont j'ai explicité les grandes lignes auparavant.
Le secteur de l'Energie et, précisément, le secteur des combustibles et carburants, est concerné tout d'abord par l'assainissement de la structure des prix des produits pétroliers.
Cette structure devrait être revue en raison, d'une part, de l'arrivée à échéance de la convention entre la raffinerie Samir et l'Etat au 31 décembre 2008, et de l'obligation d'adapter ses composantes à la réalité du marché pétrolier et aux nouvelles caractéristiques des carburants qui entreraient en vigueur le 1er janvier 2009. Un autre grand point fort de cette réforme concernera la révision de la structure du gaz butane en étudiant la possibilité de forfaitisation de certains postes et en limitant l'usage aux ménages.
C. H. : quels sont les engagements électoraux et gouvernementaux que vous comptez respecter dans l'exécution du programme gouvernemental et les tiendrez-vous jusqu'au terme de la législature ?
N. B. : nous avons veillé, en tant que gouvernement, au respect des engagements pris envers les citoyens lors de la campagne électorale, engagements qui ont été réaffirmés dans la déclaration gouvernementale dans des domaines aussi variés que celui de la promotion de l'emploi, de l'amélioration de la croissance, ainsi que de la mise en œuvre du nouveau contrat social basé sur l'amélioration du pouvoir d'achat, sur le développement des mécanismes de solidarité et sur le rétablissement de l'ascenseur social. Aussi, le gouvernement s'est fixé comme objectif de réduire le taux de chômage au niveau national à 7,5% à l'horizon 2012, en créant plus de 250.000 opportunités d'emploi supplémentaires annuellement. Permettez-moi, à ce titre, de souligner la baisse du chômage enregistrée dont le taux est passé de 10,1% en 2007 à 9.2% au cours du 1er semestre 2008. Cette politique d'emploi s'appuie sur des axes majeurs, notamment le soutien de la croissance endogène à travers la politique des grands chantiers. A ce titre, le gouvernement a poursuivi et accéléré le programme des grands chantiers, qui va mobiliser un volume global d'investissement de 285 milliards de DH pour la période 2008-2012 contre 85 milliards de DH lors de la précédente législature 2002-2007. L'impulsion donnée à ces chantiers, conjuguée à la dynamique initiée par les politiques sectorielles entreprises à travers tout le Royaume, permettra à terme de porter le taux de croissance annuelle à 6%. L'amélioration du pouvoir d'achat représente également un axe prioritaire. Dans ce registre, le gouvernement a prévu un train de mesures fiscales, économiques et sociales pour lutter contre la hausse des prix, en réussissant à maintenir le taux d'inflation à 3%. L'enveloppe budgétaire allouée au soutien des prix de produits de base et pétroliers a d'ailleurs atteint les 36 milliards de DH en 2008. Dans le cadre du dialogue social, le gouvernement a procédé à une amélioration des revenus à travers notamment une hausse des salaires et une baisse de l'IR. Enfin, nous nous sommes engagés, conformément aux orientations du Souverain, à mener les réformes de seconde génération nécessaires au décollage économique et social du pays. A ce titre, nous avons élaboré des stratégies d'urgence dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'agriculture, de l'énergie, de l'eau et de la formation, sans parler bien sûr de la compensation.
C. H. : votre ministère est mal connu du public. Quelles compétences en général et quelles prérogatives sont préconisées en matière de compensation et de régulation du marché et des prix à la consommation ?
N. B. : le ministère des Affaires économiques et générales est chargé de l'amélioration de l'environnement économique des entreprises, de la coordination et du suivi des relations de coopération avec les institutions du groupe Banque Mondiale. Par ailleurs, le ministère est également chargé de la promotion du secteur de l'économie sociale. A ce titre, il a pour mission d'établir la stratégie de développement du secteur, l'élaboration du cadre juridique et règlementaire ainsi que l'accompagnement des opérateurs à travers l'Office de Développement de la Coopération. En matière des prix et de la compensation, le département exerce une compétence transversale de coordination entre différents départements ministériels à travers la mise en œuvre de la politique des prix, la régulation du marché par la mise en œuvre de la loi sur la concurrence, comme il assure également la tutelle de la Caisse de compensation. Il a enfin en charge, en tant que ministère délégué auprès du Premier ministre chargé des affaires générales, d'instruire les dossiers transmis par la primature pour préparer la prise de décision et faciliter l'arbitrage.
Portrait
Baraka : l'homme lige du gouvernement
Le jeune et dynamique titulaire du portefeuille des Affaires économiques et générales du gouvernement, initiateur du concept des rencontres mensuelles «Les Mardi du Gouvernement», dont il a étrenné le cycle des rencontres mensuelles à la primature, ne se départit jamais de son calme légendaire. D'une courtoisie désarmante, moderniste irréductible, Nizar Baraka met sa grande affabilité au service d'une écoute très attentive, disponible en permanence à son corps défendant. En pilotant un département stratégique mis en place avec l'avènement de l'alternance en 1998, il y a pris ses quartiers en faisant résolument face à une conjoncture économique générale des moins favorables qui le pousse nécessairement au-devant de la scène de l'actualité nationale. C'est avec beaucoup de courage et de fermeté que le ministre istiqlalien tient tête aux déséquilibres socioéconomiques sur fond de tensions sociales exacerbées alimentées par la flambée des prix qui s'emballe sous les coups répétés de la spirale inflationniste mondiale. L'ancien patron de la division des études et prévisions économiques du ministère de l'Economie et des Finances est, aussi, un théoricien et un idéologue écouté au sein de l'appareil nationaliste qui a conduit le premier gouvernement démocratiquement élu depuis l'indépendance. Avec la complicité bien comprise de politiques aux profils très pointus des troupes d'Abbas El Fassi, les Hjira, Ghellab et Baddou, il a concocté un programme scientifique inédit dans les annales des batailles électorales dans le Royaume qui a séduit, à la fois, les citoyens électeurs, la société civile, les autres partis et le patronat et associations professionnelles (fameux contrat 1.3.5.7). Le gendre du Premier ministre, sobre, efficace, économiste en diable, politicien, bon père de famille est doté d'une finesse d'analyse qui étonne sans cesse. Il est l'archétype de l'anti-aristocrate dont le rêve sans cesse poursuivi est de rétablir la justice sociale en restituant leur dignité aux couches les plus défavorisées. Nizar Baraka est en passe de révolutionner l'ensemble du système du marché national de la consommation au Maroc pour y faire prévaloir le nouveau système de compensation à deux étages, ciblant en priorité les bénéficiaires les plus démunis des prestations de la Caisse de compensation. Mieux encore, sa ténacité est à même de conduire le Maroc au seuil d'un modèle qui, capitalisant les expériences les plus réussies en Amérique latine et en Asie, s'applique à produire une stratégie innovante dont les politiques publiques mises en œuvre en matière de subvention des prix pour préserver les pouvoirs d'achat les plus équitables au monde.


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