La lecture du rapport de Bank Al Maghreb (BAM), présenté au souverain le 29 juillet, bien que non exclusive, est incontournable quant à la connaissance de l'état des lieux de l'économie nationale dans l'environnement international. Voici une synthèse qui ne pourra certainement pas apaiser la soif en cet été chaud, où le thermomètre, y compris dans sa dimension sociale, indique des températures en hausse. Cette synthèse a tout au moins l'avantage d'être moins sélective que le discours gouvernemental qui préfère n'évoquer que les aspects qui lui paraissent politiquement favorables. D'après le rapport de BAM, en 2024, l'économie mondiale a continué à évoluer dans un climat caractérisé par l'incertitude et marqué par des tensions géopolitiques persistantes. La croissance mondiale a connu un ralentissement pour atteindre 3,3% contre 3,5% en 2023, principalement tirée par les Etats-Unis, la Chine et l'Inde. Les prix de l'énergie ont connu une baisse, avec cependant une hausse importante des prix des métaux précieux, notamment l'or (+22,9%). La baisse du taux d'inflation au niveau mondial à 5,7% a poussé plusieurs banques centrales à alléger leur politique monétaire, sauf la Banque du Japon qui a remonté son taux pour la première fois en 17 ans. Le niveau d'endettement public mondial a atteint un pic de 92,3%. Malgré les chocs externes et le réchauffement climatique, l'économie nationale a pu maintenir sa résilience. En effet, la croissance économique s'est maintenue à un taux de 3,8%, en 2024, contre 3,7% en 2023, malgré la baisse du PIB agricole suite la sécheresse quasi-continue, et ce grâce à une forte expansion des secteurs non agricoles, en particulier les BTP, le tourisme et l'industrie. L'investissement a connu un bond de 10,9%, grâce notamment aux projets liés à la préparation d'événements internationaux (horizon 2030). Le taux d'inflation a continué à décélérer pour atteindre 0,9%, en lien avec la politique monétaire, le soutien gouvernemental et la baisse des prix des produits pétroliers et des principaux produits alimentaires sur le marché international. Dans ce contexte, le taux directeur a été ramené à 2,5% après deux baisses successives pour soutenir la relance. Néanmoins, la situation actuelle de l'emploi et du marché du travail impose une vigilance. En effet, si la création nette d'emploi a pu atteindre le chiffre de 82 000 emplois, il y a lieu de noter une perte de 137 000 emplois dans le secteur agricole. Ainsi, le chômage continue sa hausse, atteignant un taux de 13,3%, avec des taux beaucoup plus élevés pour les femmes et les jeunes, et un taux d'activité global de 43,5%. L'évolution économique n'arrive toujours pas à compenser le million d'emplois agricoles perdus depuis 2019. Au niveau des finances publiques, le déficit budgétaire a été ramené à 3,9% du PIB (hors privatisations), grâce à des recettes fiscales exceptionnelles, à la décompensation partielle du gaz butane et aux financements dits innovants. La dette publique directe a connu une baisse pour atteindre un taux de 67,7% du PIB. Alors que le déficit courant a été contenu à 1,2% du PIB malgré un déficit commercial de 19,1%. Les recettes du tourisme (112,5 Mds DH) ont connu un record, ainsi que les transferts des MRE (119 Mds DH). De ce fait, les réserves en devises se sont stabilisées à 375 Mds DH (5 mois et 9 jours d'importations), confortées par des IDE en hausse à 2,7% du PIB. Dans ce contexte, BAM a pu mener des actions stratégiques parmi lesquelles : la mise en place de nouveaux marchés de couverture (swaps de change et de taux) ; un régime amélioré de ciblage de l'inflation ; la création d'un fonds FinTech (100 M DH) et d'une entité dédiée au développement de l'innovation financière ; la finalisation d'un projet de loi sur les cryptoactifs ; et une évaluation des impacts du climat menée conjointement avec la Banque mondiale, donnant lieu à de nouvelles directives bancaires sur les risques inhérents au climat. Face aux défis structurels, BAM a aussi émis des recommandations stratégiques. C'est notamment le cas en matière de résilience climatique, en termes de politiques d'encadrement, d'appui à la demande (tarification différenciée, gestion locale de l'eau) et de renforcement qualitatif des infrastructures. De même, certaines recommandations visent à améliorer le tissu productif actuellement faible, caractérisé notamment par la prédominance des TPE informelles à faible valeur ajoutée. D'où l'Importance de promouvoir l'entrepreneuriat, d'encadrer les petites entreprises, d'améliorer la qualité de l'éducation, de lutter contre la corruption et de poursuivre les efforts d'intégration de l'informel. Ce qui nécessite un cadre macroéconomique équilibré pour pouvoir assurer la soutenabilité des finances publiques et la continuité des réformes sociales entamées. D'où l'urgence de la mise en œuvre des réformes structurelles (retraites, budgétisation, aides sociales), tout en tenant compte des risques inhérents à l'accumulation des crédits additionnels. Ainsi, le Maroc, grâce à sa stabilité et à la vision du Souverain, déclinée à travers des réformes ambitieuses, amorce un nouveau cycle économique. A cet égard, le discours royal du 29 juillet offre des repères stratégiques pour mener une action plus efficace en vue d'une résilience plus forte face aux chocs et d'une meilleure agilité dans un environnement toujours incertain, tout en assurant la stabilité macroéconomique comme socle de croissance durable. En définitif, BAM prône des politiques publiques ambitieuses mais réalistes, avec un impact positif réel sur les conditions de vie de la population, en particulier dans les zones qui demeurent enclavées.