Mehdi Bensaid et la génération Z : quand la communication ministérielle se transforme en réunion partisane fermée    Maroc : Quatre ans de prison ferme pour un meneur de violences à Agadir    Maroc : Des manifestations sans usage contraire au droit au rassemblement pacifique (CNDH)    Edito. L'heure de vérité    Espagne : La COAG engage des poursuites contre l'accord agricole Maroc-UE    Cobalt : le Maroc dans le top 10 africain    La Chine déclenche une alerte d'urgence après le typhon "Matmo"    Moroccan U17 team to face Senegal in friendly matches ahead of FIFA World Cup in Qatar    Abdessamad Ezzalzouli shines as Real Betis secures victory over Espanyol Barcelona in La Liga    Construction : une croissance de 4,5% prévue pour 2025    Ministère de la Santé : le Conseil de gouvernement acte une réorganisation    Marrakech: le musée Yves Saint Laurent accueille une exposition sur le couturier et ses chiens    Salon international du livre de Bakou : la Bibliothèque nationale présente en force    Le Parti du Progrès et du Socialisme : la plus longue présence au ministère de la Santé, mais la plus courte distance vers la réforme    "Chergui 2025" : coopération militaire maroco-française pour renforcer la sécurité régionale et faire face aux menaces transfrontalières    Tour du Faso : top départ prévu le 24 octobre    Le Prince Héritier Moulay El Hassan préside la cérémonie de remise du Grand Prix SM le Roi Mohammed VI de saut d'obstacles    En Couv'. Sahara : Les signaux d'un changement très attendu    Côte d'Ivoire. Un Datacenter d'IA voit le jour    Le Togo prévoit une croissance robuste en 2025    Catastrophes naturelles. Le Rwanda bâtit son bouclier climatique    Tactical Tactics et Dar Si Hmad : un partenariat RSE qui relie l'Amérique du Nord au Maroc    Omar El Hilali attire les convoitises en Angleterre    Revue de presse de ce lundi 6 octobre 2025    France : Lecornu a remis sa démission, quelques heures après l'annonce d'un nouveau cabinet    Accord agricole Maroc-UE : le texte amendé signé à Bruxelles    Generation Z fuels healthcare reform as Morocco appoints 543 specialist doctors    UN Chief : Moroccan Army assured «civilian use» of road between Amgala and Mauritania    Mondial U20 : Les Lionceaux de l'Atlas connaissent leur adversaire pour les 8ès    Liga : Ezzalzouli porte le Betis à la victoire face à l'Espanyol (2-1)    Près de 150.000 visiteurs au 16e Salon du Cheval d'El Jadida    France : Naima Moutchou et Rachida Dati au gouvernement de Lecornu    Maroc-France : L'exercice Chergui lancé, silence à Alger    Manifestations GenZ au Maroc : L'UE appelle au clame    France: le nouveau gouvernement nommé    Rabat : des milliers de Marocains manifestent contre le génocide à Gaza et la normalisation avec Israël    Le Salon du cheval d'El Jadida, miroir des liens Homme-cheval    Mondial U20 (3è journée) : Après la phase de groupes, le Maroc va préparer sereinement les huitièmes de finale (Mohamed Ouahbi)    Nouvelle tournée diplomatique du ministre chinois des Affaires étrangères : l'Italie et la Suisse au cœur de la stratégie européenne de Pékin    Espagne : la police madrilène violemment confrontée aux manifestants propalestiniens    Marrakech : les allégations relatives à la mort d'un individu lors des événements de Sidi Youssef Ben Ali dépourvues de tout fondement    MAGAZINE : Abdelhadi Belkhayat, la vie aux chants    CNDH : Les manifestations se sont déroulées sans aucun comportement de nature à transgresser le droit au rassemblement pacifique    Décès d'un citoyen à Marrakech : le Parquet clarifie les faits et écarte tout lien avec les manifestations    El Guerguerat. Saisie de près de 54 kg de cocaïne    L'envoûtante Meknès se vêtit à l'international pour fêter son deuxième festival interculturel sur le soufisme et la poésie    Line Producers India étend son maillage au Maroc et tisse un pont cinématographique entre l'Inde et le monde arabe    Diaspo #409 : Noura Mennani rend hommage à son père par le pop art    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



[Entretien] Dématérialisation des processus douaniers : Larbi Belbachir se penche sur les défis à relever
Publié dans EcoActu le 23 - 01 - 2023


Interivewé par L.Boumahrou |
Larbi Belbachir, ancien haut fonctionnaire à l'Administration des douanes et des impôts indirects (ADII) et actuellement enseignant s'apprête à publier le 2ème tome de son ouvrage « Les Douanes aux frontières du numérique« . Un tome où il se penche sur le numérique non seulement en tant que cible d'actes de malveillance, mais le questionner comme étant à la fois l'instrument et le corps du délit en douane. Eclairage.
EcoActu.ma : Le livre que vous publiez ces prochains jours est le second volet d'un précédent ouvrage sorti en 2020. Pourquoi avoir choisi de lui consacrer une suite ?
Larbi Belbachir : Les Douanes aux frontières du numérique traitaient spécifiquement de l'infraction informatique telle qu'elle est prévue et sanctionnée par le droit pénal douanier. Il s'agit en résumé d'atteintes ou de cyberattaques qui sont portées au système informatique douanier au moyen de procédés informatiques ou électroniques.
Très vite, l'adoption de l'outil informatique en douane a en effet été rattrapée par la fraude car aucun système informatique n'est totalement vulnérable aux intrusions à des fins d'attaque, de vol ou de détournement de données. Dans ce premier tome, j'ai ainsi voulu mettre en évidence les failles de la législation pénale douanière et préconiser des solutions. Le livre s'est toutefois limité aux seules incriminations et sanctions dont nous disposons actuellement.
Avec ce deuxième tome, j'ai souhaité approfondir le sujet : ne plus considérer le numérique comme cible d'actes de malveillance, mais le questionner comme étant à la fois l'instrument et le corps du délit en douane. Car la donne numérique engendre d'autres menaces. Je pense notamment au commerce électronique transfrontalier dont le contrôle échappe, en grande partie, aux douanes du monde entier du fait que ces transactions ont supprimé la notion de barrière physique, principalement à travers l'achat et la vente de produits et de services sur internet.
En même temps que le commerce électronique se développe, la fraude qui l'accompagne croit également. Le risque touche tous les acteurs de ce commerce : les consommateurs, les producteurs, les vendeurs… Cela peut être de la sous-évaluation d'articles, de la commercialisation de marchandises de contrefaçon ou de voitures volées, ou encore des transactions négociées sur des marchés plus obscurs, ce que l'on appelle communément le Darknet.
Si certains pays ont déployé des moyens statistiques pour évaluer cette cyberdélinquance, les chiffres restent inconnus à l'échelle de la planète. Pour vous donner une idée, l'e-commerce représentait près de 20% des ventes au détail dans le monde en 2021, et les prévisions indiquent que d'ici trois ans il représentera un quart du total des ventes au détail ! Pour maîtriser ce phénomène, les douanes ont passé des accords et mis en place des protocoles très stricts avec les opérateurs des services postaux et express.
Quels sont les défis liés à la dématérialisation des processus au niveau des douanes ?
Il est difficile de cerner avec précision ce que seront les défis futurs posés par le numérique en douane. L'actuel secrétaire général de l'ONU a bien résumé la situation en expliquant que cette activité a « créé de nouveaux risques qui vont des failles de cybersécurité à la facilitation d'activités économiques illégales en passant par la remise en cause de la notion de vie privée ».
António Guterres a aussi rappelé, à juste titre, que « les pouvoirs publics, la société civile, les milieux universitaires, la communauté scientifique et le secteur des technologies doivent travailler ensemble pour trouver de nouvelles solutions ». Dans le contexte que nous connaissons, avec la généralisation de l'utilisation des technologies numériques, il est de plus en plus facile de conduire des activités économiques sur internet sans se soucier des obligations fiscales ou douanières auxquelles sont soumis les échanges extérieurs. Aussi, les administrations douanières dans le monde sont démunies face à la cyberfraude.
Pour relever les défis fiscaux, économiques et sécuritaires liés au tout numérique, elles doivent être correctement dotées de moyens, notamment juridiques et technologiques. Cette évidence a déjà été rappelée par Kunio Mikuriya, le secrétaire général de l'Organisation mondiale des douanes, pour qui « la douane numérique consiste en des systèmes numériques capables de percevoir et de préserver les droits de douane, de contrôler la circulation des marchandises, des personnes, des moyens de transport et de l'argent, et de sécuriser le commerce transfrontalier contre la criminalité, y compris contre le terrorisme international qui continue de frapper les populations à travers le globe ».
Comment garantir la dématérialisation de procédures douanières pour fluidifier les échanges, tout en limitant les risques cyber ?
Il faut rappeler que le processus de dématérialisation avance. Au Maroc, le dépôt des déclarations douanières et leur traitement est assuré par voie électronique depuis des décennies. C'est aussi valable pour les protocoles d'accord qui sont établis avec les opérateurs des services postaux.
La question désormais est de savoir comment garantir l'efficacité et l'efficience des procédures pour maintenir la fluidité des flux avec le minimum de risque. L'une des principales motivations d'un achat sur internet est le souhait de disposer d'une marchandise ou d'un service dans un temps beaucoup plus court et aux meilleures conditions.
En plus du respect des délais de livraison auquel s'engage le vendeur, cette exigence n'a de sens que si les procédures douanières garantissent la même célérité dans le traitement de l'opération : elles doivent être chirurgicales, rapides et efficaces malgré le volume considérable des envois. Pour l'heure, cette équation est résolue grâce à ce que l'on appelle en douane le ciblage automatique, un procédé qui permet une gestion électronique du risque à l'import et à l'export de sorte à identifier, selon des critères préétablis, les envois qui présentent un risque potentiel. Mais il n'existe pas de système idéal. Et la dématérialisation des procédures douanières peut offrir de nouvelles possibilités de fraude.
Le cadre juridique est-il adapté aux enjeux du secteur au Maroc ?
La codification de la législation douanière est relativement récente puisque le code des douanes date de 1977 et que l'adoption des dispositions répressives liées à la fraude informatique remonte aux années 1980. Les textes n'ont donc pas véritablement connu d'évolution depuis plus de trente ans, alors même que les technologies numériques se diffusent très largement dans les produits et applications dont l'usage est continuellement détourné par les cyber fraudeurs.
Tout autant que les solutions et équipements technologiques, les lois et règlements douaniers doivent ainsi s'adapter voire anticiper l'évolution des nouvelles pratiques numériques. C'est l'image d'une spirale sans fin : les douanes appréhendent sans cesse les nouveaux usages numériques pour établir des moyens de contrôle ou de riposte efficaces. Le problème, c'est qu'à chaque solution trouvée, un nouveau problème apparaît qui nécessite une nouvelle solution, et ainsi de suite…
Pour assurer la prévention des actes de cyberfraude transfrontalière, il convient d'abord de résoudre deux difficultés : il faut que les procédures et les mécanismes douaniers soient en mesure d'appréhender de telles opérations pour qu'ensuite le droit pénal douanier puisse en assurer la répression. En d'autres termes, si le volet des équipements en moyens électroniques est important, tout repose en premier lieu sur le droit.
Ce qui implique que le dispositif juridique doit être constamment adapté au contexte numérique pour doter les agents des douanes de nouvelles prérogatives à même de leur permettre de lutter à armes égales contre la cyberdélinquance, notamment aux frontières.
On a l'habitude au Maroc de prendre modèle sur les pays occidentaux. Vous parlez bien sûr de l'Europe et des Etats-Unis, mais vous mentionnez surtout le Sénégal. En quoi ce pays peut-il être un modèle ?
Au Sénégal, le législateur a apporté des éclaircissements en levant certaines équivoques qui améliorent la lisibilité des lois, ce qui a facilité leur application aussi bien par les agents verbalisateurs que les juridictions. En poursuivant dans cette direction, le Sénégal s'est également attaché à définir les conditions d'intervention des agents des douanes en matière de techniques d'investigation numérique.
Par exemple, la législation douanière ne se contente plus de la terminologie classique limitée au mot « document ». Elle va jusqu'à désigner les données informatiques et fait référence à l'existence d'une autre évidence : le « support » informatique qui contient ce même document et sans lequel les données ne sauraient avoir d'existence utile. La loi douanière est ainsi venue anticiper le problème pour mieux traiter des difficultés techniques liées à des investigations numériques.
S'il est encore possible aux agents enquêteurs de prendre en charge les documents saisis pour procéder à un examen approfondi dans les locaux de leurs services, il n'est pas possible d'en faire de même pour des systèmes informatiques qui peuvent être volumineux (équipements multiples) ou épars (informations fractionnées par dissémination dans d'autres sites) et dont la saisie, tout aussi bien que le déplacement, serait une entreprise aussi laborieuse que téméraire.
Le législateur a donc tenu compte de ces difficultés : le code des douanes est venu apporter les solutions techniques qui permettent la lecture et le décryptage des données, qui sont des opérations nécessaires à la saisie et à l'exploitation des pièces et documents récupérés. Il ne s'agit pas de droit commun : c'est bien la législation douanière qui est venue organiser l'intervention des douaniers afin de faciliter l'exercice de leur mission de manière légale.
Le Sénégal est même allé plus loin en dotant les douaniers de prérogatives légales qui étaient jusque-là réservées aux seules autorités en charge de la sécurité. Afin de pouvoir traquer la fraude, les douanes sénégalaises ont désormais le droit de procéder à des livraisons surveillées ou à l'infiltration des réseaux de trafiquants. Ce qui place le Sénégal au rang des quelques nations dans le monde ayant mis en place une véritable cyber législation douanière.
Biographie
Larbi Belbachir a exercé près de quarante ans au sein des douanes marocaines. Major en 1973 de la promotion internationale de l'Ecole nationale des douanes françaises de Neuilly, il
poursuivit des études supérieures en droit, en parallèle à un cycle supérieur de gestion à
l'ISCAE. Nommé successivement directeur régional du Centre, puis de l'Oriental, après avoir
dirigé plusieurs unités d'intervention opérationnelles, il achève sa carrière en tant que
conseiller du directeur général de cette même administration. Actuellement enseignant, son
expérience dans les domaines du renseignement douanier, de la lutte contre la fraude et le
trafic illicite des stupéfiants font de lui un expert reconnu en la matière.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.