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Les Assises de la Fiscalité ou le mur des lamentations ? - EcoActu
Publié dans EcoActu le 02 - 05 - 2019

Engager une réforme d'envergure pour moderniser le système fiscal en vue de le rendre plus efficace et plus équitable, c'est le vœu formulé par tous ceux qui ont répondu à l'appel «à contribution» lancée par le ministère de l'Economie et des Finances. Mais lorsque vous consultez les listes de doléances exprimées, vous vous posez des questions. En fait, qui doit les exhausser et à qui s'adresse-t-on ? Au Ciel, à l'Etat ou à la CGEM, présente en force dans les différents ateliers des Assises ?
Une appétence effrénée pour les incitations fiscales
D'ailleurs, le document présenté par cette organisation -une longue liste de demandes sectorielles- ressemble à la carte d'un restaurant gastronomique. Normal, en matière fiscale c'est difficile de concocter un seul menu «équilibré », ou plutôt une seule assiette, qui arrive à satisfaire 90 000 membres à la fois. Cette organisation est insatiable, malgré la baisse importante de l'IS notamment pour les sociétés qui réalisent un bénéfice fiscal inférieur ou égal à 1 000 000 DH.
En effet, pour ce niveau de bénéfice, avec le barème progressif, le taux réel d'imposition est passé de 30% à 15,25% dès 2018, puisque le barème de 2019 à été appliqué avec effet rétroactif aux résultats de l'exercice 2018. Ce taux s'applique également aux exportateurs pour le même montant de bénéfices, après l'exonération de 5 ans.
Autrement dit, pour un bénéfice net de 1 000 000 DH, l'IS versé est égal à 152 500 DH :
[(1 000 000 X 17,5%)-22 500] et donc un taux réel d'IS de 15,25% : (152 500/ 1 000 000).
Deux jours de débats où chacun va tenter d'obtenir des avantages en transférant le poids de la charge fiscale sur d'autres, c'est aussi cela la cohésion sociale et le nouveau contrat social.
En faveur de la classe moyenne, la CGEM se montre très «généreuse» en proposant « d'indexer les tranches de l'IR sur le taux d'inflation ». Elle ne précise pas s'il faut se baser sur le barème actuel, qui date de 2010, ou en élaborer un nouveau qui intégrerait l'érosion cumulée sur 10 ans. Si ! En fait, elle demande que le salaire mensuel jusqu'à 5 000 DH soit exonéré, c'est-à-dire un salaire annuel de 60 000 DH, sans préciser si c'est en net ou en brut.
Dans le même sens, on retrouve la proposition des experts-comptables qui demandent l'augmentation du seuil exonéré de 30 000 DH à 36 000 et une augmentation des frais professionnels de 30 000 à 60 000 DH.
La surenchère et la méconnaissance du fonctionnement des impôts enfantent des propositions délirantes, qui sont présentées pour la forme, n'ayant aucune chance d'être acceptées, si on examine la situation de l'IR et les niveaux de salaires des principaux contributeurs. Une réduction de l'impôt qui pèse sur les salariés est une exigence qui vise à instaurer une réelle équité fiscale et obtenir un rééquilibrage de la charge fiscale par rapport aux différents avantages accordés aux sociétés.
Mais, il est important de fonder de telles demandes sur des études de faisabilité qui prennent en compte les contraintes actuelles des finances de l'Etat, étude qui aurait dû normalement précéder les baisses de l'impôt sur les sociétés.
Il faut préciser que la baisse de la charge fiscale sur les salaires peut être obtenue en agissant sur trois variables :
* le mode de calcul du revenu imposable, en appliquant des déductions et abattements sur le brut ;
* les taux d'imposition progressifs appliqués au revenu imposable, en faisant varier les tranches de revenus ou les taux ;
* les réductions d'impôts en relevant le montant de la réduction pour charges de famille.
Selon la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), le salaire mensuel moyen déclaré en 2017 s'élevait à 5 120 DH. De plus, les statistiques sur le nombre de salariés affiliés par tranche de salaire mensuel moyen montrent que plus de 90% ont un salaire ne dépassant pas 10 000 DH.
A partir de ces éléments, on peut avancer que ces propositions de barème aboutiraient à l'exonération de plus de 90% des salariés. En effet et selon un calcul simple, ne prenant pas en compte les déductions pour charges sociales et autres, un employé qui perçoit un salaire brut annuel de 120 000 DH, bénéficierait d'un abattement pour frais professionnels de 60 000 DH ; d'où un salaire net imposable de 60 000 DH qui n'excédera pas le seuil exonéré proposé.
A ce titre, il est intéressant de présenter le barème de l'IR suggéré par le Cercle des Fiscalistes, qui propose à l'instar des deux autres, de relever le seuil d'exonération et d'autres déductions, pour le comparer au barème en vigueur :

Une première question concernant le barème proposé : combien d'employés du secteur privé touchent un salaire annuel de 120 000 DH et plus ? Selon la CNSS, seuls 7% des salariés déclarés reçoivent un salaire égal ou supérieur à 10 000 DH par mois.
Par ailleurs, il convient de rappeler que le barème progressif de l'IR s'applique également aux retraités, aux activités professionnelles exercées sous la forme de sociétés de personnes ou d'entreprises individuelles, aux professions libérales ainsi qu'aux revenus des agriculteurs.
Par facilité, la comparaison a été faite, en gardant la même déduction pour frais professionnels dans les deux barèmes (20% plafonnés à 30 000 DH). Sachant qu'en accordant une déduction, comme proposé, de 60 000 DH, un revenu brut imposable de 120 000 DH serait exonéré et toutes les tranches supérieures bénéficieraient de la baisse.
De plus, il convient de préciser que le taux réel dans le tableau est obtenu en divisant l'impôt calculé par le revenu net imposable. Ce taux serait plus faible si on divisait l'impôt par le revenu brut imposable, c'est-à-dire avant déduction des frais professionnels. En même temps, la prise en compte de la réduction pour charge de famille réduit davantage l'impôt à payer.
Bien entendu, il n'est pas facile d'évaluer la perte de recette fiscale pour le budget, mais sur la base de ces éléments partiels, on peut déjà affirmer que le total des gains pour les contribuables constituerait un manque à gagner important.
Il apparaît clairement que les propositions sont formulées sans étude préalable. Elles ne s'appuient sur aucune donnée socio-économique fiable et cohérente. Déjà, les statistiques publiées par différents organismes ne sont pas homogènes. En 2017, la CNSS a enregistré 221 271 entreprises affiliées déclarant 3,38 Millions de salariés. La CGEM, pour sa part et comme elle le mentionne dans son bilan 2012-2018, emploie au travers de ses membres 3 millions de salariés, presque égal au nombre déclaré à la CNSS et pour 90 000 membres uniquement.
La même année, dans son rapport d'activité de 2017, la DGI faisait état d'une population fiscale composée de 338 579 personnes morales soumises à l'IS et de 641 837 personnes physiques relevant de l'IR, ainsi que 521 540 personnes assujetties à la TVA.
Si on compare le nombre de sociétés, uniquement celles soumises à l'IS, identifiées aux impôts au nombre de sociétés affiliées à la CNSS, on constate une différence de 117 308 entreprises. Cela voudrait-il dire que ces sociétés n'emploient aucun salarié ?
Pour sa part, le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE), nous présente dans son rapport de 2019 un tableau sur le poids des charges sociales et fiscales (ou pression fiscale). Ce tableau est identique à celui publié dans son rapport de 2012, avec la suppression de quelques niveaux de revenu pour le rafraîchir. Il faut expliquer à ceux qui ont la lourde charge d'éclairer les décideurs publics par leurs travaux et recommandations que la paresse intellectuelle risque d'aboutir à de mauvaises décisions. En effet, il faut préciser que même si le barème de l'IR n'a pas changé depuis 2010, les charges sociales (patronales et salariales) dans le privé comme dans le public ont été relevées (voir notamment site de la CNSS).
Comment financer les dépenses publiques et qui s'en soucie ?
La question que personne ne semble se poser, c'est quelle va être la perte de recettes fiscales si l'on adoptait ces mesures, mêmes étalées sur plusieurs années ? Les préoccupations budgétaires sont ignorées. Faut-il le rappeler, en 2018, grâce au Ciel, le budget de l'Etat a bénéficié, selon le bulletin statistiques des Finances Publiques établi à fin décembre 2018 par la Trésorerie Générale du Royaume (TGR), d'un versement exceptionnel de 24 MMDH effectué à partir du compte d'affectation spéciale intitulé «Compte spécial des dons des pays du Conseil de Coopération du Golfe». Le montant de ces dons est passé de 7,2 MMDH en 2016, à 9,5 MMDH en 2017 pour baisser à 2,793 MMDH en 2018.
Il est important de savoir que l'exceptionnel est hypothétique et qu'il faut éviter de prendre des décisions qui engagent les finances de l'Etat en se basant sur ce qui est de l'ordre de l'improbable. De la même manière, la recette prévisionnelle des privatisations de 5 MMDH prévue dans la loi de finances 2019, et qui est mentionnée dans le rapport économique et financier, ne réglera pas la question prégnante de la soutenabilité des dépenses publiques.
Par ailleurs, l'augmentation annuelle des recettes de l'IS comme de la TVA n'est pas tout à fait exacte, car affichées en montant brut. Ces rentrées englobent des sommes qui doivent être remboursées. Il s'agit donc d'une partie de la ressource recouvrée, qui n'est pas définitivement acquise au Trésor. En effet, dans les statistiques de la TGR, il est noté que «les demandes de remboursement de la TVA et de restitution de l'IS avaient atteint respectivement 33,2 MMDH et 3,9 MMDH à fin décembre 2017».
Au lendemain des Assisses Fiscales de ce mois de mai, des études sérieuses devront être menées pour déterminer la charge fiscale réelle de chaque secteur d'activité, notamment en matière d'impôts d'Etat directs. Dans le même sens, une révision profonde des multiples systèmes incitatifs est indispensable afin de supprimer les avantages ou, tout au moins, les conditionner à des créations d'emplois réelles. Il faut bien comprendre que, quelque soit le nouveau modèle de développement adopté, le grand et principal défi restera celui de la lutte contre le chômage et l'amélioration du pouvoir d'achat.
Zaya Mimoun, Docteur en Droit Public


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