Le Roi a été clair dans son discours, il faut accorder une attention particulière aux PME et TPE qui constituent 95% du tissu économique marocain. Il est temps de huiler la machine pour permettre à ces entreprises de contribuer activement au décollage économique du pays. Si le Roi a soulevé ce problème dans son discours, c'est parce que malgré les programmes de soutien et de financement mis en place pour les accompagner, force est de constater que sur le terrain l'histoire est toute autre. En effet, outre les problèmes d'accès au financement, de délais de paiement, d'inaccessibilité aux marchés publics, les PME et TPE sont livrées à elles-mêmes dans un secteur où c'est la loi du plus fort qui domine. En l'absence de visibilité, les entreprises n'arrivent plus à s'aventurer sur ce terrain glissant. Chiffres à l'appui, l'investissement privé a accusé une baisse de 8% entre 2015 et 2016 d'après les chiffres publiés par Inforisk. Pis encore les pronostics pour l'année 2017 ne sont pas plus bons puisqu'ils augurent une baisse encore plus prononcée. Même constat dans le rapport annuel de Bank Al Maghreb au titre de l'exercice 2017 qui révèle que l'investissement privé reste faible malgré les incitations accordées et l'effort de la dépense publique, sensée lui servir de levier. « Par manque de visibilité, les opérateurs économiques semblent adopter un comportement d'attentisme, réduisant ainsi les chances d'une reprise rapide de la croissance », lit-on dans le rapport. Plus alarmant encore, le nombre d'entreprises qui ont fait faillite en 2017 s'est élevé à plus de 8.000 entreprises (90% de mises en liquidation et 10% des redressements judiciaires). Un chiffre en progression de 15% en moyenne par an selon la conjoncture. Certes, le gouvernement n'aime pas trop communiquer sur ce sujet, mais les chiffres sont parlants. Ces freins qui entravent les entreprises à renforcer leur compétitivité, à contribuer au développement économique du pays et à apporter une réelle valeur ajoutée entraînent un manque à gagner énorme pour le Maroc. Faut-il rappeler que depuis une décennie, la croissance économique du pays n'a pas pu franchi la barre des 4% du PIB. Il est vrai que le modèle de développement a connu ses limites, toutefois cet état de fait relève également de la responsabilité des pouvoirs publics, du secteur bancaire ainsi que de tous les acteurs. Et pourtant, sans ce tissu économique, le Maroc n'arrivera pas à se positionner dans l'échiquier des pays émergents. C'est pourquoi le Souverain a appelé le gouvernement à prendre ses responsabilités pour faire de l'investissement un réel moteur de croissance. Le Roi a ainsi fixé comme deuxième chantier prioritaire, après celui de l'adoption de la Charte de la déconcentration administrative, l'entérinement de la nouvelle Charte de l'investissement et l'activation de la réforme des Centres Régionaux d'investissement en leur accordant les prérogatives nécessaires pour remplir leur mission correctement. Parmi ces prorogatives : adopter le mécanisme de décision à la majorité des membres présents, en remplacement de la règle d'unanimité actuellement en vigueur ainsi que regrouper les commissions concernées par l'investissement en une Commission régionale unifiée. L'objectif étant de mettre fin aux blocages et aux prétextes invoqués par certains départements ministériels. En effet, l'adoption de la réforme des CRI est aujourd'hui primordiale pour booster l'investissement, réduire le chômage et créer de la richesse. Il semble qu'après plusieurs reports, l'examen du projet de loi 47-18 portant réforme des Centres régionaux d'investissement et création des Commissions régionales unifiées d'investissement sera enfin à l'ordre du jour du prochain Conseil du gouvernement qui se tiendra le jeudi 2 août. Cette réforme, rappelons-le, vise à transformer les CRI en établissements publics dotés de la personnalité morale et de l'autonomie financière. Le but étant de mettre un terme à l'éparpillement des entités en charge de l'investissement au niveau régional. «Justement, l'un des apports majeurs du projet de loi réside dans le fait de vouloir faire converger l'ensemble des actions liées à l'acte de l'investissement. C'est ainsi que le conseil d'administration du CRI va comprendre les administrations impliquées dans le processus de l'investissement. Aussi, ces administrations seront-elles tenues de désigner des représentants au sein des sièges des CRI. Le texte de loi veut canaliser, par le biais des CRI, les différentes interventions en matière d'investissement privé au niveau régional que ce soit sur le plan stratégique (élaboration des plans de développement) ou sur le plan opérationnel à travers le traitement des dossiers d'investissement, l'accompagnement des investisseurs et le suivi des projets réalisés », nous avait confié dans une interview Abdellah Bouhjar, Directeur du CRI Dakhka Oued Eddahab (Lire l'intégralité de l'entretien). L'urgence est de mise eu égard au manque à gagner en matière d'investissement et de point de croissance. Il est temps de donner à ces instances les outils nécessaires pour jouer leur rôle et assumer leur part de responsabilité. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Il suffit de faire un tour des différents sites Web des CRI au Maroc sur le Portail National des Collectivités Territoriales pour se rendre compte que plus de 80% sont inaccessibles. Pis encore, un des liens vous envoie vers un site étranger. C'est pourquoi il faut adopter le plus tôt possible ce projet de loi afin de donner aux investisseurs de la visibilité, de la confiance et surtout faciliter les procédures administratives pour inciter à l'investissement dans notre pays. Lire également : INVESTISSEMENTS PRIVES : LE POURQUOI D'UNE BAISSE DE 8%