Le cumul des crédits distribués est en hausse de près de 8% d'une année à l'autre, mais les dépôts augmentent moins rapidement de 5,33%. Le ratio crédits/dépôts est donc passé de 100,8% à presque 103%, alors que la réglementation Bâle devrait imposer un retour progressif vers un taux de 100%. Comment les banques marocaines corrigeront-elles le tir ? En attendant les chiffres officiels de Bank Al-Maghrib dans son «Rapport annuel sur le contrôle, l'activité et les résultats des établissements de crédit», on peut déjà dresser un premier bilan sur les chiffres des banques cotées. Ces dernières ont distribué plus de 51 Mds de dirhams de crédits en 2012 pour porter le total des prêts inscrits à leurs bilans à 694 Mds de dirhams. En face, les dépôts (forme classique) ont augmenté de 34 Mds de dirhams pour atteindre 671 Mds de dirhams en cumuls à fin 2012. En parallèle, le taux des créances en souffrance devrait peut-être tourné autour de 5% cette année encore, étant donné que ce niveau est maîtrisé depuis plus de cinq ans. Les trois tiers de ces créances en souffrance sont historiquement provisionnés par les banques. On attendra les chiffres de BAM pour savoir ce qu'il en est cette année. Paradoxe Mais le fait marquant est la hausse du ratio crédits/dépôts qui passe à plus de 103% en moyenne pour les six banques cotées, contre 100,8% l'année dernière. Cette hausse est paradoxale alors que les prochaines directives de Bâle III exigeront aux banques de revenir à des ratios autour de 100%. L'objectif est que les banques retrouvent leur orthodoxie financière à travers une adéquation entre les ressources stables et les emplois stables. Concrètement, les banques, de par le monde, devront laisser de côté leur modèle économique actuel basé sur le phénomène de transformation (utiliser les ressources du court terme pour financer les crédits à long terme), pour un modèle économique plus cohérent où les crédits seront financés à travers les dépôts et les ressources stables (dettes long terme et capitaux propres). Chez les banques cotées, il existe quelques disparités à l'égard de ce ratio. Cela va de 91% chez la Banque Populaire à 154% chez le CIH. Economiquement, cela signifie que le CIH fournit un effort supplémentaire pour mobiliser les ressources nécessaires à son activité de prêteur, car pour 154 DH de crédits il ne dispose que de 100 DH de dépôts. Par contre, la Banque Populaire peut s'appuyer sur les dépôts du public pour assurer sa survie face à une crise potentielle de liquidité ou de confiance qui toucherait le secteur. En effet, pour 91 DH de crédits, elle dispose de 100 DH de dépôts. Ce gisement de dépôts lui permet de garder un coût moyen des ressources des plus faibles du marché. Comment corriger le tir ? Ainsi, toute l'acrobatie demandée aux banques est de trouver le juste équilibre entre l'ensemble de ces facteurs. Contrairement à ce que l'on peut penser, la hausse du ratio crédit/dépôts en 2012 n'est pas exclusivement due à la hausse des crédits. Car, en comptabilité bancaire, tout crédit distribué donne lieu automatiquement à l'enregistrement d'un dépôt équivalent. C'est la transformation des dépôts en titres ou en devises qui crée la hausse du ratio. Par exemple, l'acquisition de bons du Trésor ou de certificats en tous genres pour prêter aux autres banques ou à l'Etat, oblige les banques à reclasser les dépôts utilisés dans le bas du bilan. Pour pallier le problème, les banques peuvent, soit baisser le rythme des crédits, auquel cas les dépôts baissent moins rapidement, voire augmentent. Ce qui ramène le ratio à 100% avec toutes les conséquences néfastes qu'on peut imaginer pour l'économie, ou alors augmenter la taille des dépôts. C'est cette deuxième option qui paraît raisonnable. Pour ce faire, elles doivent fournir un effort commercial envers les déposants en leur proposant des produits d'épargne alléchants. En Europe, le ratio crédits/dépôts peut atteindre jusqu'à 400%, et les banques ont pris des décisions radicales pour le réduire. On peut citer, par exemple, la banque espagnole Banesto qui offre un véhicule à tous les épargnants qui déposent entre 18.000 et 160.000 euros pour des durées allant de 24 à 36 mois. Moins orignal, les banques peuvent tout simplement rémunérer les comptes courant ou rehausser la rémunération des comptes bloqués.