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Prisons : «le phénomène de récidive passera bientôt à 60%»
Publié dans Finances news le 16 - 09 - 2004

Les conditions de détention dans les prisons marocaines ont connu une nette amélioration, ces dernières années.
Un grand vide existe pourtant au niveau du rôle des institutions carcérales en tant que relais de réinsertion sociale des détenus. Les prisons servent-elles donc seulement à punir ? Voici le sentiment de Youssef Madad, membre du bureau exécutif de l’Observatoire Marocain des Prisons.
Finances News Hebdo : Comment l’idée vous est-elle venue de créer cet observatoire ?
Youssef Madad : Les membres de l’Observatoire œuvrent tous dans le domaine associatif et la défense des Droits de l’Homme. Nous nous sommes ainsi rendu compte que la situation carcérale est tellement complexe qu’elle ne devait plus être réduite à un simple chapitre dans un rapport quelconque. Il s’agit d’une question si compliquée qu’elle ne saurait être abordée dans une approche globale. Nous avons donc abouti à l’idée qu’il fallait créer une structure spécifique pour le traitement de cette question.
F. N. H. : Quelles ont été les premières étapes de votre travail après la création de votre association en 1999 ?
Y. M. : La première année, nous avons travaillé sur nous-mêmes pour développer nos outils de travail : questionnaires, fiches de visites, structure des rapports…Nous avons ensuite entamé une série de visites dans les prisons, grâce à la coopération de l’Administration Pénitentiaire. Le travail sur le terrain était la seule manière de connaître la réalité des choses dans différentes prisons du pays. Et, effectivement, on s’est rendu compte, suite à nos premières visites, que la prison d’Oukacha n’avait rien à voir avec la prison d’Inzegane ou de Safi, par exemple.
F. N. H. : Avez-vous tracé les objectifs de votre travail ?
Y. M. : Nous avons défini deux objectifs essentiels. D’abord, produire un rapport annuel ayant une vision critique sur la situation carcérale au Maroc, et ce à partir du référentiel international qui énumère les règles minimales de traitement des détenus, ainsi que du référentiel national qu’est la loi 23-98 relative à l’organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires. Ce rapport a été assorti de recommandations visant l’amélioration des conditions de détention. Notre deuxième objectif est de travailler comme une structure d’alerte sur toutes les infractions par rapport à ces lois, afin de sensibiliser les acteurs concernés aux manquements et pour faire réparer les préjudices causés aux détenus. Notre première réussite a été de briser le tabou qui entoure le monde carcéral et d’informer l’opinion publique de tout ce qui se passe dans les prisons marocaines. Nous avons produit, à ce jour, trois rapports annuels accompagnés de toutes les remarques consignées sur le terrain. Le premier rapport a d’ailleurs été soumis au directeur de l’Administration Pénitentiaire. Cela prouve que nous avons réussi à instaurer un dialogue avec cette Administration. Mais, nous ne nous contentons pas des rapports pour sensibiliser. Nous organisons aussi des tables rondes sur la question. Pour étayer notre mission, nous avons instauré, depuis plus d’une année, une structure de traitement des plaintes émanant des détenus. Nous estimons, en effet, qu’il s’agit d’un pas essentiel pour consolider nos actions. Deux avocates réceptionnent les plaintes, les étudient et émettent des conseils sur la démarche à suivre. Nous contactons ensuite l’Administration pénitentiaire pour essayer de résoudre les problèmes qui nous ont été soumis.
F. N. H. : Quels genres de problèmes peuvent avoir les détenus à l’intérieur d’une prison ?
Y. M. : La réalité carcérale est atroce. Mais, il faut dire que les conditions de détention ont connu une nette amélioration durant ces quatre dernières années. Autrefois, la prison était un espace hermétique, cloisonné, où les responsables de l’administration avaient pleins pouvoirs et pouvaient tout se permettre sans crainte d’être contrôlés. Les détenus souffraient notamment d’un déficit atroce d’hygiène. Lors de nos premières visites, nous avons été choqués de constater une absence totale d’activités. Nous l’avons été aussi par le degré d’oisiveté qui régnait au sein de la prison. Les détenus s’ennuyaient à mourir.
F. N. H. : Ils ne suivaient aucune formation ?
Y.M. : Prenons l’exemple de la prison d’El Jadida. Il y avait des ateliers qui pouvaient accueillir une dizaine de détenus alors qu’il y en avait plus de 800. Le pire est qu’ils n’avaient droit qu’à une demi-heure de promenade le matin et une autre demi-heure l’après-midi. Le reste du temps, ils le passaient dans leurs cellules, entassés, car les prisons marocaines sont surpeuplées.
F. N. H. : Malgré l’amélioration des conditions de détention, le séjour dans une prison permet-il une réintégration facile après la liberation ?
Y. M. : Non, je ne le pense pas. Personnellement, je crois qu’il faut d’abord situer les priorités dans une prison. Il faut tout d’abord alléger le quotidien carcéral du poids des tensions et de la violence, faute de quoi le climat est inadéquat pour la moindre démarche d’insertion. Voilà pourquoi nous avons lancé, au début de l’année en cours, un programme de formation pour le personnel des prisons, axé sur la politique d’accompagnement. L’objectif est de sensibiliser ce personnel à l’importance d’instaurer un canal de communication horizontal avec les détenus et non pas un rapport de force. La première cible de notre programme a été le corps des gardiens qui sont en contact direct et permanent avec les détenus. Ces gardiens peuvent, en effet, gérer les conflits entre détenus au lieu d’être obsédés, uniquement, par la sécurité. Créer un climat plus serein dans les prisons est la première étape à franchir avant d’entamer toute action d’accompagnement. Il y a également des éléments d’ordre matériel pouvant accroître les tensions à l’intérieur des prisons. Avec le phénomène de surpeuplement, le manque de moyens et d’infrastructures des pénitenciers, les problèmes ne peuvent que s’aggraver.
F. N. H. : Avez-vous, en tant qu’association, entamé des actions facilitant la réinsertion des détenus, une fois libres ?
Y. M. : Nous avons été sollicités par deux détenus, condamnés, à l’époque, à la peine capitale et ayant bénéficié, après plusieurs années, d’une libération conditionnelle. Il s’agissait de leur trouver un emploi. Cela fait un an et demi que nous frappons à toutes les portes pour essayer de les faire embaucher; nous avons même saisi les autorités à ce sujet. Leurs demandes traînent toujours. Nous avons pourtant tout essayé, mais en vain. Aider les détenus à trouver du travail ou les réintégrer est une mission extrêmement ardue. Il nous est donc très difficile de nous engager dans cette voie. Par contre, on essaye de temps à autre d’organiser des rencontres avec des ex-détenus pour qu’ils nous parlent de leur réinsertion et des problèmes qu’ils ont dû surmonter pour reprendre une vie normale. Les ex-détenus reprennent confiance en eux et savent qu’il y a des gens attentifs à leurs problèmes. Mais, ce suivi doit se faire dans le cadre institutionnel pour garantir un travail de rigueur et un soutien permanent aux ex-détenus. Car, tant qu’il n’y a pas d’assistance post-carcérale, on ne peut pas combattre la récidive qui se situe aujourd’hui à un taux de plus de 45%. Pire encore : dans deux ou trois ans, ce taux passera à plus de 60% ! Et ce sont hélas, les jeunes qui récidivent le plus.


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