A un mois des élections en Libye, la candidature de certaines personnalités du pays provoquent de vives réactions. C'est le cas de celle du maréchal Khalifa Haftar, responsable de la guerre en Libye, et qui a laissé tomber son costume militaire pour l'occasion. Dans l'Est, les médias pro-Haftar ne l'appellent plus maréchal mais « monsieur ». Quelques jours après le Sommet de Paris sur la Libye où l'ensemble des Libyens ont été appelés à respecter le calendrier électoral tel qu'arrêté par l'ONU, les tensions sont claires dans le jeu politique miné par des candidatures controversées, surtout que la déclaration finale indique expressément le côté « inclusif » de ces élections, en d'autres termes, l'impératif d'accepter les chefs de factions, comme Khalifa Haftar, qui bénéficie du soutien de certains pays. Si la communauté internationale espère voir une réelle transition politique dans le pays, et avec cela, la réussite du processus politique débuté depuis 2015 avec les accords de Skhirate et qui a engrangé de francs succès ces dernières années grâce aux dialogues inter-libyens ayant pu poser les jalons d'une reconstruction du pays, le rêve des libyens qui souhaitent sortir d'une décennie noire, reste pour le moins encore fragile. Et pour cause, alors que le pays va connaitre le 24 décembre ses toutes premières élections démocratiques de son histoire, ce rendez-vous très attendu est marqué par des incertitudes et des inquiétudes nourries par la candidature de personnalités controversées, une loi électorale jugée comme étant faite sur mesure pour servir certains profils, des doutes sur la transparence du scrutin, ainsi que sur l'après-élections. Ces inquiétudes sont d'autant plus importantes depuis l'annonce, mardi, de la candidature de l'homme fort de l'Est de la Libye, le maréchal Khalifa Haftar, deux jours après celle de Seif Al Islam Kadhafi, l'un des fils de Mouammar Kadhafi. « Je déclare ma candidature à l'élection présidentielle, non pas parce que je cours après le pouvoir mais pour conduire notre peuple en cette période cruciale vers la gloire, le progrès et la prospérité », a lancé le maréchal Haftar dans un discours. « La prochaine étape est difficile et requiert un homme au sujet duquel les libyens doivent faire le bon choix pour ne pas avoir à le regretter », a dit celui qui a mené le pays vers la guerre et l'instabilité politique depuis 2014 car voulant prendre le pouvoir par la force. Cette dernière déclaration sonne comme une menace du maréchal Haftar qui a conduit les offensives contre Tripoli et contre l'ancien gouvernement civil, d'union nationale, le GNA, reconnu par la communauté internationale. En dépit de l'échec de son offensive en juin 2020, le maréchal continue de lorgner le pouvoir et a troqué son habit militaire de chef de l'autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL) pour un habit civil en septembre. Face à ces personnalités controversées qui risquent de saper tous les efforts mis en place pour sortir le pays de la crise, d'autres candidats pourraient leur barrer la route, à l'instar d'Aguila Salah, le président de la Chambre des représentants (le Parlement libyen), ou encore l'actuel Premier ministre, l'homme d'affaires, Abdel Hamid Dbeibah, qui n'a pas encore annoncé leur candidature. Selon lui, il existerait de « gros problèmes » autour de la loi électorale adopté unilatéralement par le Parlement. Il a dénonce une loi électorale taillée sur mesure pour certains candidats, sans mentionner leur nom. Mais il ne fait aucun doute qu'il s'agit du maréchal Haftar qui, en dépit de son passif et de sa fonction militaire a pu se présenter à des élections civiles, et qui, pourra reprendre facilement sa fonction militaire en cas de défaite. Sauf que ce texte est jugé nécessaire pour garantir la stabilité du pays dans un contexte de hautes tensions, à cause du maréchal Haftar, et la communauté internationale, dans la déclaration de Paris, a insisté sur le caractère « inclusif » des élections qui doivent permettre de réconcilier les groupes divergents et les départager selon les urnes. De son côté, la Haute Commission électorale libyenne, a précisé que les candidatures ne seront pas nécessairement acceptées, rappelant qu'il s'agit uniquement d'une procédure de dépôt. Les candidats à la présidentielles auront jusqu'au 7 décembre pour déposer leur dossier.