Allier expansion industrielle et préservation du patrimoine forestier n'est plus un rêve utopique. L'Agence Nationale des Eaux et Forêts (ANEF) inaugure un programme novateur de modernisation et de professionnalisation de la récolte du liège grâce à l'intégration d'une nouvelle technologie de pointe. Cette initiative est lancée en parallèle avec le début de la campagne de récolte du liège pour l'année 2024 dans la Région de Rabat-Salé- Kénitra. Ce programme de modernisation s'inscrit dans le cadre du troisième axe de la stratégie « Forêts du Maroc 2020-2030« , qui vise à moderniser les métiers forestiers. Il se concrétise par le renforcement des capacités techniques et matérielles des entreprises spécialisées dans la récolte du liège, l'introduction d'équipements modernes de récolte, le déploiement de mesures incitatives appropriées, ainsi que la mise en place de formations et d'un encadrement adéquats. Approché par Hespress FR, Abderrahim Houmy, directeur général de l'ANEF, qui nous a expliqué que "dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie "Forêts du Maroc 2020-2030," l'ANEF se réjouit de lancer aujourd'hui une opération pionnière intégrant les nouvelles technologies dans la récolte du liège. Cette initiative s'inscrit dans l'engagement du Maroc à moderniser les métiers des forestiers et à optimiser la gestion des précieuses forêts. La méthode traditionnelle de récolte du liège, bien que efficace dans le passé, causait souvent des blessures aux arbres, menaçant leur santé et leur longévité. Aujourd'hui, grâce à cette nouvelle technologie, nous assurons une protection accrue des arbres. En réduisant les dommages physiques causés par le prélèvement du liège, nous préservons mieux les arbres, assurant leur vitalité et leur capacité à continuer de produire du liège de qualité pour les années à venir". Améliorer le rendement et préserver les forêts est désormais accessible Deuxième objectif : améliorer le rendement. Cette nouvelle technologie permet une augmentation significative du rendement de délignage. "Grâce à des machines sophistiquées, la production de planches de liège est augmentée tout en minimisant la production de morceaux résiduels. Cela se traduit par une utilisation plus efficiente des ressources, maximisant la quantité de liège utilisable et, par conséquent, valorisant chaque arbre récolté", nous indique Houmy. S'adapter aux changements climatiques, cheval de bataille de tout projet novateur. Dans une ère où les caprices climatiques deviennent une réalité, des solutions durables sont plus que jamais nécessaires. En ce sens, le DG de l'ANEF souligne que" nous observons que, ces dernières années, les périodes de récolte deviennent plus courtes et moins prévisibles en raison des changements climatiques. Les nouvelles machines nous permettent de récolter le liège dans des délais plus restreints et avec une performance accrue, rendant notre processus plus résilient face aux aléas climatiques". Cette étape fait partie d'une démarche plus large visant à mieux valoriser la récolte du liège et à s'adapter aux défis contemporains. Nous envisageons de généraliser ce système innovant d'ici 2025. Et de conclure, Houmy déclare que "cela inclut non seulement la formation des professionnels de ce secteur mais aussi la mise à disposition des équipements nécessaires à l'échelle nationale. Notre objectif est de voir toutes les forêts marocaines bénéficier de cette méthode moderne de récolte du liège". Le liège, une richesse marocaine à préserver Il convient de noter que la production de liège nécessite plus de 27 ans après la plantation initiale. Dans le cadre de cette initiative, un programme de formation est lancé pendant la campagne actuelle, en partenariat avec l'Association Marocaine des Industriels du Liège, et animé par des formateurs spécialisés. Egalement joint par Hespress FR, Anas Mohammed, Président de l'association qui nous a expliqué que " la campagne de récolte du liège, bien que brève – s'étendant du 1er juin à la fin de juillet – revêt une importance capitale pour notre industrie. En tant que professionnels, nous faisons face à une contrainte temporelle exigeante : maximiser notre productivité pour satisfaire les besoins croissants du marché. Chaque jour compte, et chaque action que nous entreprenons durant cette période est déterminante pour notre succès collectif". Le contexte actuel ajoute une dimension supplémentaire à ce défi. Partageant avec nous les difficultés dont souffrent le secteur, Anas Mohammed réitère qu'après "deux années marquées par une sécheresse implacable, nous avons affronté des récoltes médiocres qui ont engendré une stagnation sans précédent dans l'industrie du liège. Cependant, face à ces défis, nous ne nous laissons pas abattre. Nous abordons cette nouvelle campagne avec cette technologie innovante et une détermination renouvelée". "Notre objectif est triple, accroître significativement la quantité récoltée pour répondre à la demande, de plus grâce à des méthodes respectueuses et avancées, nous éviterons les dégradations souvent causées par les techniques traditionnelles et optimiser le temps", se réjouit notre interlocuteur. Il convient de souligner que les forêts de chêne-liège du Maroc occupent le quatrième rang mondial en termes de superficie, offrant un potentiel économique considérable à exploiter. Ces forêts fournissent du liège, un produit forestier non ligneux, à une dizaine d'entreprises industrielles spécialisées. En moyenne, ces entreprises valorisent plus de 80.000 stères de liège par an lors d'années favorables. La valorisation de ces forêts génère environ 54 millions de dirhams de recettes annuelles en moyenne pour les 52 communes territoriales concernées. Maroc- Portugal, vers la durabilité et la résilience Cette innovation a pu voir le jour grâce à un partenariat entre le Maroc et le Portugal, à cet effet, Francisco Carvalho, administrateur groupe Amorim Portugal nous a dévoilé un autre aspect auquel répond cette innovation : le déficit de spécialistes en récolte de liège. "Grâce à cette innovation, même les moins expérimentés peuvent désormais récolter le liège efficacement sans risquer de blesser les arbres", révèle l'expert.. Le problème majeur auquel le monde, et particulièrement le bassin méditerranéen, est confronté concerne les blessures infligées aux arbres par des pratiques de récolte inadéquates. " Les approches traditionnelles peuvent provoquer des dommages, créant des ouvertures où les maladies peuvent s'infiltrer, menaçant la santé et la longévité des arbres", explique-t-il. Dans le détail, il indique qu'au Portugal, "nous avons consacré des années à résoudre ce défi. Cette nouvelle technologie représente la cinquième génération de notre processus d'amélioration continue. Elle offre une solution qui non seulement minimise les risques de blessures mais assure également une récolte plus propre et plus efficace".