Après plus de huit ans depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 77.15, qui interdit la production, la commercialisation et l'utilisation des sacs en plastique sur le marché intérieur, et après le lancement de la campagne nationale « Zéro Mika« , la situation a pris une tournure inattendue. Les sacs en plastique, initialement bannis, sont réapparus sur les marchés, mais à des prix plus élevés, tirant parti de la loi d'interdiction. Cette résurgence est particulièrement notable dans les commerces de proximité et les marchés locaux, surtout dans les grandes villes comme Casablanca. Les sacs en plastique ont retrouvé leur place, défiant ainsi la loi et les autorités en de nombreux endroits. Bien que des restrictions existent sur l'importation et la distribution de la matière polyéthylène, composant principal des sacs en plastique, la production dans des usines clandestines a continué de croître. Cela a eu pour conséquence une augmentation des prix de gros de 40 % par rapport à la période avant 2016. Par exemple, le prix d'un kilogramme de petits sacs fins est passé de 40 dirhams à 60 dirhams. Plusieurs facteurs ont favorisé le retour des sacs en plastique, en dépit de l'interdiction législative. Parmi ces facteurs figurent l'augmentation de l'activité du secteur informel, la difficulté de contrôle et d'application de la loi, l'essor des unités de fabrication clandestines et de la contrebande entre les villes, ainsi que le coût élevé des alternatives durables pour les consommateurs et le manque de canaux de recyclage appropriés et de solutions de gestion des déchets plastiques. L'article 5 de la loi n° 77.15 stipule que, outre les officiers de police judiciaire, les agents assermentés et désignés par l'administration ou les organismes compétents peuvent rechercher les infractions à cette loi, sollicitant la force publique si nécessaire. Lors de la campagne « Zéro Mika », les responsables de l'administration territoriale et les agents des douanes étaient en première ligne. Souleiman Boumehdi, spécialiste en gestion des risques et des politiques publiques, constate que cette campagne appartient désormais au passé et que les agents de surveillance ne sont plus présents sur le terrain. Il explique que la diminution du rythme de surveillance après les deux premières années d'application de la loi a permis la reprise discrète de l'industrie des sacs en plastique. Les opérations de surveillance, souvent documentées et diffusées sur les réseaux sociaux, avaient un effet dissuasif important. Boumehdi souligne que la réduction des contrôles directs a transformé la loi 77.15 en un cadre législatif non contraignant, semblable à la loi anti-tabac dans les lieux publics. Il appelle à une nouvelle campagne « Zéro Mika » pour éradiquer les sources de production des sacs en plastique et encadrer leur commercialisation et leur circulation. Cette initiative nécessiterait une coopération entre les différents services de surveillance et une coordination déléguée aux services de l'administration territoriale, compte tenu de leur connaissance du terrain, en particulier pour la surveillance des unités clandestines en périphérie des grandes villes. Des études récentes alertent sur les dangers de la prolifération des sacs en plastique. Une fois jetés, ces sacs deviennent de la nourriture pour les oiseaux, les poissons et les mammifères, contaminant ainsi la chaîne alimentaire jusqu'aux humains, qui consommeraient chaque semaine l'équivalent d'une carte bancaire en plastique. D'ici 2050, les déchets plastiques dans l'océan pourraient surpasser le nombre de poissons. La difficulté à contrôler les chaînes de production et de commercialisation et à appliquer la loi reste l'une des principales raisons de la persistance des sacs en plastique sur les marchés, urbains comme ruraux. La loi, qui interdit la fabrication, l'importation, l'exportation, la distribution et l'utilisation des sacs en plastique, vise à lutter contre la pollution plastique, protéger l'environnement et renforcer le développement durable.