Alors que la confrontation entre Israël et l'Iran fait grimper les cours du pétrole et pèse sur la stabilité régionale au Moyen Orient, le Maroc pourrait ressentir des effets indirects sur le plan économique, commercial et diplomatique. L'escalade entre Téhéran et Tel-Aviv suscite une vigilance au Maroc, en raison de ses liens avec plusieurs acteurs de la région, de sa dépendance énergétique, et de l'impact potentiel sur le commerce maritime international. Si le Royaume n'est pas impliqué dans le conflit, les répercussions globales de cette confrontation pourraient affecter notamment ses équilibres économiques. Des conséquences économiques directes Dans une analyse livrée à Hespress Fr, le professeur d'Études stratégiques au National defence college (NDC) des Émirats Arabes Unis à Abou Dhabi, Mohamed Badine El Yattioui, affirme que « l'escalade des hostilités entre Israël et l'Iran ajoute de l'incertitude pour les marchés pétroliers mais également les marchés financiers, sans oublier bien évidemment les conséquences géopolitiques directes pour le Moyen-Orient ». Selon lui, « des Iraniens acculés pourraient bloquer le Détroit d'Ormuz, ce qui aurait pour conséquence une hausse des cours du pétrole et donc un nouveau cycle d'inflation sur les produits alimentaires, l'énergie et le transport, pour un pays comme le Maroc ». Toujours d'après le professeur, « au plan financier, les banques centrales pourraient être contraintes d'intervenir pour stabiliser leurs devises, au risque d'épuiser leurs réserves de change et aggraver le déficit commercial. Les importations de pétrole, avec un baril au-delà des 80 $, ont aussi un impact sur les finances publiques ». Il souligne également qu'« une augmentation du prix du pétrole aurait un impact négatif sur l'industrie marocaine, notamment l'industrie pétrochimique, la métallurgie et la sidérurgie ». Sécurité maritime, commerce mondial et positionnement diplomatique Sur le plan commercial, le professeur El Yattioui fait remarquer que « depuis novembre 2023, les attaques des Houthis en mer Rouge ont bouleversé 12 à 15 % du commerce international, provoquant une crise affectant également le Canal de Suez. Elles risquent de s'intensifier ». Il prévient que « les compagnies maritimes seront contraintes de continuer d'aller vers le Cap de Bonne-Espérance, ce qui allonge les trajets de 12 à 14 jours ». Cela entraînerait, selon lui, « une augmentation des coûts de carburant et des primes d'assurance, donc une augmentation des prix pour les ménages marocains ». Enfin, sur le plan diplomatique et sécuritaire, le professeur rappelle que « le discours de SM le Roi devant le sommet Maroc-Pays du Golfe en 2016 était clair. Le Souverain avait clairement indiqué que "le Maroc a toujours considéré que la sécurité et la stabilité des pays du Golfe Arabe sont indissociables de la sécurité du Maroc. Ce qui vous porte préjudice nous affecte aussi et ce qui nous touche vous touche également" ». Ce qui revient à dire que le Maroc considère la sécurité des pays du Golfe comme une extension directe de sa propre stabilité nationale. En d'autres termes, toute menace ou déstabilisation dans cette région est perçue par Rabat comme un enjeu stratégique qui le concerne au premier plan. Cette position traduit une solidarité politique affirmée, mais aussi une convergence d'intérêts sécuritaires et géopolitiques, en particulier face à des acteurs régionaux comme l'Iran, perçu comme un facteur de tension par plusieurs États du Golfe.