Regards des électeurs, Les élections 2002 ne constitueront pas “ le tournant ” de votre vie. Vous vous en doutez ! Et vous le manifestez. “Wakha, je voterai pour toi ! Wakha, ghire Th'na (rassure-toi)! ! ! ”. C'est en affichant un air décidé que cette femme au foyer de 63 ans accueillait à bras ouverts les tracts des différents candidats. Les empilant les uns sur les autres, elle “ jacassait ” avec ses voisines, ravies autant qu'elle par cette nouvelle animation du quartier de Sbata. Cette attitude “ niaise ” prête à confusion. “ Pour qui allez-vous voter ? Bah, pour ceux là ” répond-elle en braquant les tracts. “ Tu sais, tu peux voter pour tout le monde sauf “ Essif ” (épée ou sabre), ils sont des meurtriers, et c'est eux qui massacrent les jeunes filles ”. En décrypté, les derniers meurtres signalés, qui accusent, d'après les rumeurs de la rue, les islamistes extrémistes, déteignent sur le Mouvement populaire (MP) qui a pour symbole le poignard traditionnel. L'anecdote ne prête vraiment pas à rire. Les rumeurs courent bon train et les candidats usent et abusent des symboles, imbriquant des histoires inédites, fausses, mais qui délient bien des langues. Le nouveau scrutin court-circuite les anciennes corruptions de voix achetées ou de “ parachutage”, mais l'électeur l'assimile-t-il pour autant ? Reprend-il confiance ? Le porte-à-porte est toujours de mise, les “ Zroud ” sont du menu et les fournitures scolaires extirpent bien des sourires. L'idéal serait de programmer des élections chaque année. “J'assurerais la scolarité des mômes (fournitures scolaires) ” lançait un commerçant à un autre, en louant les œuvres d'un candidat “ bienfaiteur ”. Cette conversation écoutée à la dérobée traduit le “ désarroi ” d'un bon nombre d'électeurs, voire leur désaffection. Ne nous leurrons pas, les électeurs sont conscients de leur droit et ne se laissent pas duper. Mais, les exigences du quotidien s'imposent. Aussi, ont-ils besoin d'un concret immédiat : payer les factures, assurer les fournitures scolaires, travailler… Des nécessités qui se heurtent à des discours “creux”. Autant profiter de ces candidats véreux, prêts à casquer pour une voix. D'autant plus qu'on ne fournit aucune garantie. Dans tous les cas, ils se ressemblent tous. Il nous faut bien “ l'mssirif ” nous confie cet électeur de 48 ans. Comportement indigne jugerait l'autre, mais tout à fait “ logique” pour ne pas dire “normal” face au manque de confiance, au désintérêt à la vie politique qui règnent en maîtres. Et pour cause, la plupart des personnes interrogées vous renvoient aux précédentes élections pour référence. D'autres ignorent les formations “novices” et doutent de l'efficacité des “ anciennes ”. “ On ne les a jamais vus, et ils te saluent chaleureusement en t'empoignant la main et en te récitant un programme craquelant, incompatible avec tes peines de tous les jours. Vers qui pourrait-on se tourner si des représentants véreux tournent le dos à leurs partis et sont en tête de liste dans d'autres ? Comment garantir la représentativité des électeurs si du jour au lendemain l'élu décide de changer de camp, de peau pour un autre parti ? ”, s'interroge cet instituteur de 50 ans. En effet, l'article 9 de la constitution accorde la liberté d'association et d'adhésion aux organisations syndicales et politiques, sans la restreindre. Une liberté dont jouissent pleinement candidats et électeurs.Mais il semble qu'à ces élections manquera une bonne partie des jeunes électeurs masculins qui ne se sont pas inscrits, de peur d'être appelés au service militaire obligatoire