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Pendant que d'autres rêvent de l'impossible eldorado, : Des centaines de mre s'installent au Maroc
Publié dans La Gazette du Maroc le 08 - 05 - 2006

Il y a à peine cinq ans, les observateurs les plus avertis ne pouvaient prévoir le phénomène. Aujourd'hui, ce sont des centaines et, si le mouvement continue à s'amplifier crescendo, des milliers à décider de rejoindre le Royaume avec épargne et/ou savoir-faire. Ce phénomène s'inscrit dans un mouvement de ressourcement qui a bénéficié de l'«effet M6». Il mérite d'être examiné de plus près.
D'une douzaine de milliards de DH vers la fin du siècle dernier, la manne des transferts des MRE a évolué pour atteindre l'année écoulée plus de 36 milliards. Un coefficient-trois qui a énervé nombre de milieux politiques et fiscaux européens, au point que les justices italienne et française osèrent frapper à la porte des délégations de la première institution financière marocaine installée en Europe, à savoir la Banque Chaâbi, pour tenter de savoir ce qui s'y passe. Malgré son volume impressionnant, ce mouvement de transferts de devises n'était guère annonciateur d'une quelconque métamorphose du rapport des MRE au pays d'origine. «En réalité, les fluctuations politiques à l'intérieur des Etats européens ont engendré une immense angoisse parmi les personnes – jeunes et moins jeunes - issues de l'immigration. Les discours exclusionnistes et chauvinistes ont fleuri parmi les opinions publiques européennes. En parallèle à ce mal-vivre sur le sol européen, le Maroc a opté pour la rationalisation de ses procédures et l'engagement des réformes nécessaires à l'encouragement de l'investissement. C'est, en tous cas, cela qui m'a incité à délocaliser au Maroc», me dit Abdelhafid H, revenu depuis quelques mois de Hollande où il possédait un atelier de design et de fabrication de mobilier professionnel. Installé actuellement dans la zone industrielle de Douar Laskar à Marrakech, il dessine et fait fabriquer par les artisans de la ville toutes sortes de meubles professionnels et domestiques. «En vérité, je n'ai pas délocalisé uniquement mon savoir-faire, mon outil de travail et mon épargne.
J'ai également drainé mon portefeuille de clients. Aujourd'hui, je peux livrer sous 48 heures. J'emploie directement six personnes dont quatre de niveau universitaire, sans compter les emplois indirects que j'évalue à une vingtaine de smics », conclut-il.
Ahmed S. a fait ses études en France avant d'émigrer aux USA. L'après-11 septembre lui a été pénible. Pourtant, l'ensemble des signes de son intégration aux States étaient réunis : une épouse américaine dévouée, une belle demeure et un job gratifiant. Que s'est-il donc passé de si grave ? «Le regard des voisins, des collègues et même des caissiers du supermarket a changé. Je n'étais plus que l'Arabe à éviter et, quelquefois, à proscrire. Le président de l'association du quartier m'a clairement signifié le fait que je n'étais plus le bienvenu. Le choix de retourner au Maroc m'a d'ailleurs été soufflé par mon épouse qui a été jusqu'à saisir l'attorney des attitudes racistes dont j'ai été victime», me répond-il.
Le syndrome du faciès ne peut, à lui seul, expliquer le phénomène de retour de ces MRE qui ont décidé de prendre le train du développement du pays d'origine. La répugnance des Algériens issus de l'immigration, par exemple, à s'établir dans leur pays d'origine est là pour attester de l'existence de facteurs endogènes.
De là à affirmer que le Royaume soit devenu attractif et que la visibilité juridique et réglementaire face aux opportunités d'investissement ait atteint un niveau appréciable, il n'y a qu'un pas que des centaines de nos compatriotes de la deuxième et la troisième génération de MRE semblent avoir franchi sans grand mal. « Je ne peux pas dire que c'était facile. Au début, je ne comprenais pas certaines attitudes, réflexes et autres comportements de mes compatriotes marocains : le manque de rigueur, le peu de respect pour les règlements, la nonchalance et l'absence de ponctualité allaient mettre fin à mon rêve marocain. Mais au fur et à mesure que je maîtrisais les codes et que j'intégrais un mental rétif au stress, je me trouvais d'autres raisons de travailler ici», me confie Adil G., patron d'une PME spécialisée dans la fabrication, sous licence, de peinture marine, installée dans une zone industrielle de Rabat.
Nouvelles générations
Tout au long de cette enquête, nous avons rencontré un certain esprit de revanche chez les nouvelles générations issues de l'immigration. «Nos parents et grands-parents ont trimé durant des décennies pour contribuer directement à la prospérité
de l'Europe. Pour cela, il n'ont récolté qu'indifférence et mépris. De plus, ils ont rêvé toute leur vie d'un retour joyeux au bled pour y goûter au repos et peut-être même y finir leur carrière. Je suis de ceux qui désirent ardemment faire aboutir ce rêve à travers ma génération», affirme Mustapha F.
Ce qui nous a le plus surpris, c'est l'hétérogénéité de cette population décidée à s'investir dans le destin entrepreneurial du pays, et ce malgré les décalages, les désemboîtements comportementaux et les procédures difficultueuses.
En effet, ces jeunes MRE – parce que la majorité d'entre eux n'a pas encore atteint la quarantaine – viennent de tous les milieux. Les parents étaient ou sont encore ouvriers, commerçants, d'extraction bourgeoise, de profession libérale ou même chômeurs endémiques. Ils semblent, en revanche, partager une somme de valeurs dont la plus flagrante est la ténacité. Soutenue en permanence par le désir de se joindre à l'effort modernitaire engagé par le Royaume à tous les niveaux de la vie économique, politique et sociale, cette ténacité tient du défi que l'on oppose, avant tout, à soi-même. « Que n'ai-je pas entendu, y compris de la bouche de mes propres parents, sur les obstacles administratifs, les tours de filouterie que je risquais de subir ici et même le degré de propagation de la corruption ? Mais j'ai décidé de m'assurer moi-même de la véracité de ces choses. Trois voyages initiatiques accomplis durant l'année 2004 ont réussi à déclencher en moi la décision de plier bagages pour m'installer ici. Si tu ajoutes à cela le fait que tu contribues quand même à la prospérité du bled, tu te dis que c'est vraiment le pied ! Un an et demi après, je ne regrette pas une seconde mon geste. L'aventure est trop belle pour être interrompue», atteste Ilias K., tenancier d'un petit motel-restaurant dans la région d'Agadir. Cette jeunesse n'a pas investi le seul champ entrepreneurial
stricto sensu. Elle a également intégré des institutions prestigieuses régionales, locales ou nationales. L'ingénierie de la lutte contre l'exclusion a été confiée par le Wali de Casablanca à un ex-travailleur social en France et ancien conseiller de Mme Aubry au ministère du travail et de la solidarité sociale. Mais un exemple autrement
plus parlant est bien celui de Moulay Abderrahmane E.O., cadre supérieur de la première institution financière publique marocaine : la Caisse de Dépôts et de Gestion (CDG). Ex-centralien, ex-banquier à Paris, appartenant actuellement au staff de M. Bakkoury, ce jeune homme, armé d'un excellent savoir financier que la modestie n'aliène à aucun moment, offre l'exemple du MRE motivé, avant tout, par le service du pays. Il a préféré abandonner une situation quasiment directoriale à Paris
au profit d'une fonction apparentée à un devoir sacerdotal. « La CDG se trouve au centre de la mise à niveau économique et sociale de notre pays. Sous la direction de M. Bakkouri, elle conquiert des espaces partenariaux inédits, sans faillir aux impératifs que sont le retour sur l'investissement et la profitabilité. La feuille de route royale articulée autour de la modernité et assise sur la transformation du pays en immense chantier en vue des échéances historiques qui nous attendent est on ne peut plus claire. Pour ce qui est du rôle central de la CDG, la vision royale est mise en musique par un homme auprès duquel je suis fier de servir mon pays», dit-il. Quoi de plus élégant que ce souci de coller aux aspirations de la patrie d'origine? Des jeunes MRE ont choisi de s'investir pleinement dans le caritatif en mettant à la disposition de leur ville, village, ou parfois douar d'origine, les process et les moyens logistiques de la lutte contre la grande pauvreté et les « fatalités du destin ». Les uns ont creusé des puits, d'autres ont récupéré des équipements médicaux et paramédicaux, d'autres encore ont créé des
«entreprises d'insertion» à vocation associative…etc. «Après m'être aguerri à la confrontation avec la misère sociale et culturelle dans les banlieues françaises, j'ai regagné mon pays d'origine pour contribuer modestement à l'œuvre sociale initiée par le «Roi des pauvres», dit Abdellah Q., secrétaire général d'une association caritative souirie, qui ajoute aussitôt : «Continuer à travailler dans la transfusion pécuniaire d'un système bâti sur la gestion du chômage endémique dans les banlieues était devenu désuet à mes yeux. La reconnaissance s'est soustraite au profit d'un mépris qui ne disait pas son nom, mais que je ressentais à chaque instant.» Tout à coup songeur, il conclut :
«J'avais l'impression d'allumer des bougies de glace pour illuminer des non-voyants. Aujourd'hui, je suis au service d'une œuvre qui me passionne et qui s'inscrit dans un élan de solidarité nationale impressionnant. A travers mon humble action, j'ai presque le sentiment de m'approprier l'Initiative de développement humain lancée par le Roi.»
Les femmes aussi
La gente féminine n'est guère absente du mouvement de retour au bled. Dans les secteurs de la communication, de l'esthétique, de la haute couture, de la joaillerie de luxe, de l'artisanat décoratif et même de l'industrie et du bâtiment, ce sont probablement des centaines et davantage à percer. On est immédiatement séduit par leur fierté à s'accomplir ici, alors qu'elles ne manquaient point de chances de réussir là-bas. «Ici, on me “voit” réussir. Là-bas, on garde le goût de sa réussite pour soi. Même ma propre famille ne pouvait se représenter mon épanouissement professionnel en Belgique. Une cousine m'a même traité de menteuse. Elle a dû s'excuser à mon troisième défilé de mode à Casa.», raconte Nadia. Lorsqu'elles se décident enfin à revenir définitivement au bled, les Marocaines issues de l'immigration rencontrent invariablement les problèmes de scolarisation des enfants. Francophones, hispanophones, italophones ou anglophones, ces derniers peineront à intégrer les établissements pédagogiques appropriés. «Notre liste d'attente est équivalente à 28% de nos effectifs d'élèves. On n'y peut rien, c'est peut-être la rançon du succès. », nous confie un responsable
du Lycée Victor Hugo de Marrakech. Fondatrice d'une unité de traitement, de conditionnement et d'exportation de produits esthétiques traditionnels marocains (henné, huile d'argan etc.), Aïcha L. n'hésite pas à recommander la création d'un groupement associatif fort, capable de «faire prendre conscience aux autorités de la gravité du problème de la scolarisation des enfants» rapatriés par leurs parents MRE : « Ce sont des Marocains qui ont droit à une scolarisation digne. J'ai dû faire changer mon fils d'établissement secondaire trois fois en deux ans ! Ce qui est asséné à mon fils durant l'année scolaire n'est jamais conforme à ce qu'on m'a promis à l'inscription. C'est inadmissible de laisser ces “marchands de l'enseignement privé” continuer à « commercer » tranquillement, se jouant ainsi du destin de nos enfants».
Climat serein
Leïla, une amie également récemment retournée au pays, confirme le malencontreux désagrément, mais elle y met le bémol de saluer le nouveau code de la famille et la décision royale de permettre à
la femme marocaine de transmettre sa nationalité d'origine à sa progéniture. «Nous avons obtenu des droits fondamentaux.
Les problèmes relevant de la gestion quotidienne de la chose publique ne résisteront pas longtemps à la dynamique de mise à niveau sociale du pays», affirme-t-elle. Si l'observateur peut aisément toucher du doigt l'enthousiasme communicatif trouvé auprès de ces MRE qui ont opté pour le retour et l'accomplissement de soi dans le pays d'origine, il acquiert vite la conviction qu'il existe de sérieuses difficultés auxquelles cette catégorie de nos compatriotes fait face non sans un
certain courage. En effet, le déficit du pays en infrastructures hospitalières et en couverture sociale efficiente vient en tête de ces difficultés. L'absence d'une fiscalité capable de contextualiser – de préférence sans dispositifs pompeux – la démarche hautement salutaire de ce type d'investissement patriotique en est une autre. Le jeune Kamel Améziane (voir encadré) le dit avec des mots bien plus pertinents. A côté de ces soucis inhérents à la vie de tous les jours et qui, si l'on n'y prend pas garde, peuvent aliéner des carrières, voire des destins, la sempiternelle problématique de la représentation au sein de l'échiquier démocratique national continue à angoisser, parfois indigner, nos Marocains du monde devenus Marocains Résidents au Maroc (MRM). « Même si nous vivons dorénavant dans notre pays d'origine, nous ne pouvons tolérer le fait que la classe politique ait pu exclure, à ce jour, plus de 10% de
nos concitoyens. Nous savons ce qu'ils ressentent pour l'avoir vécu nous-mêmes. Il est temps de mettre bon ordre à ce déni de démocratie, notamment en prenant garde à ne pas resservir le traditionnel choix para-consulaire de type “amicalier”. A nos yeux comme aux yeux de nos concitoyens restés “là-bas”, cela pourrait mettre en péril le projet modernitaire et démocratique promis et initié par S.M. Mohamed VI», nous confie Ali D, récemment recruté par une grande école marocaine de gestion et de management. Le phénomène du retour au bled s'amplifie d'année en année.
Ceux qui tentent l'aventure sont éblouis par le nombre et les dimensions des grands chantiers, le train des réformes engagées, la transformation accrue de l'environnement urbain au centre et à la périphérie des grandes villes, les ambitions permises par l'Initiative Nationale de Développement Humain (INDH). Mais ils s'estiment en droit de bénéficier d'une attention particulière du fait que la majorité d'entre eux ait pu trouver en elle assez d'audace pour oser croire au destin de la nation d'origine au détriment des opportunités offertes par le pays d'accueil. En vérité, les Fondations Mohamed V et Hassan II pour les MRE devraient étendre leurs (louables) services au champ de la réintégration de ces MRE, au lieu de leur «faire la fête» chaque été pour les zapper de leurs priorités à la veille de l'automne. Mesdames et messieurs, nous assistons à un phénomène digne d'intérêt et dont la portée historique, en termes de développement économique et social, ne tardera guère
à s'affirmer. Saisissons les instruments institutionnels et convoquons notre imagination pour rechercher les réponses appropriées aux problématiques engendrées par la réintégration de ces concitoyens. Bienvenus, chers compatriotes !
3 questions à Kamel Ameziane (*)
Q : Quelle a été la motivation première de votre installation au Maroc ?
R : Avant tout, je souhaite préciser le fait que je suis né en France de parents marocains. Quant à ma motivation, elle vient de bien loin : Réintégrer définitivement le Maroc, j'ai rêvé de cela bien avant mon adolescence. J'ai franchi le pas dès qu'une première opportunité m'ait été offerte. Ma motivation, aujourd'hui, c'est de contribuer, à mon humble niveau, à réduire ce qu'on appelle communément la « fracture numérique » dont souffre le Sud par rapport au Nord. J'ai, pour ce faire, emprunté les interstices d'un dogme mondial énoncé par nombre de multinationales occidentales, celui de faire appel à des profils comme le mien : formation pointue sur des cœurs de métiers technologiques, capacité de pénétrer des marchés extra-occidentaux, maîtrise de la culture et des codes ethnoculturels et, si possible, appartenir à la nationalité du pays.
Q : Vous vous êtes installée à Casablanca depuis six mois. Quelles ont été les difficultés rencontrées par vous à votre arrivée ?
R : Je ne vous cache pas que j'angoissais beaucoup au début. Je n'arrivais pas à saisir certains aspects « pittoresques » de la mentalité marocaine. Le rapport, largement élastique, de mes compatriotes du Maroc au temps et à l'espace m'exaspérait, qui plus est en ma qualité de collaborateur de l'une des multinationales les plus performantes en matières de technologie de l'information et d'intelligence artificielle.
Mais, plus concrètement, je me suis heurté au problème de la couverture sanitaire qui laisse à désirer. Comment faire si l'on se retrouve subitement frappé par une maladie ? Depuis ma naissance, je suis habitué à un système (re)connu universellement pour son efficacité et sa «générosité» professionnelle. Mon adaptation au système de santé marocain me paraît pour le moins problématique. Des gens comme moi n'hésitent pas à prendre le premier avion pour aller se faire soigner en Europe. Un autre problème mérite aussi d'être signalé. Il s'agit du statut au regard de la législation sur le change. Disposant d'un compte bancaire en dirham convertible, et alors que je suis moi-même payé en devises, il m'a fallu plus de quatre mois pour finaliser…un crédit bancaire immobilier !
Q : Que préconisez-vous pour améliorer la réintégration des MRE comme vous ?
R : Pour résumer, je dirais : l'amélioration des services publics (transport, santé…etc.) et l'initiation de mesures fiscales incitatrices en direction des MRE désirant s'établir durablement ou définitivement au Maroc. Croyez-moi, si des efforts sérieux sont consentis à ce niveau, ce sont des milliers de nos compatriotes qui accourront la passion pour la patrie dans le cœur, le savoir-faire dans la tête et l'épargne plein la poche. Cela dit, l'émergence du Maroc n'est plus un slogan. Mon pays a été transformé en chantier et, j'en suis intimement convaincu, nous nous présenterons à l'Europe, à l'horizon 2010-2012, dans une tenue économique, sociale et, espérons-le, culturelle honorable.
(*) Basé à Casablanca, Kamel Ameziane est « channel account manager »
pour l'Afrique du Nord au sein de la multinationale cisco


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