Finalement, Fadel Drissi n'a pas eu le privilège de prendre sa retraite à la Marocaine des jeux et des sports (MJS). La décision de l'évincer et de le remplacer par Younès Mechrafi, ancien DG du cabinet conseil Archos, a littéralement bouleversé tous ses plans, lui qui a passé une quinzaine d'années dans la boîte, qui en connaît tous les rouages et toutes les failles, et qui pensait y rester jusqu'à souffler ses 60 bougies. Personne ne pouvait se douter que ses jours étaient désormais comptés à MJS, y compris ceux qui ont assisté à la conférence de présentation du nouveau master en management du sport ce 10 novembre 2009, animé par Drissi, responsable pédagogique du cycle. Il avait l'attitude et l'assurance de quelqu'un qui avait encore beaucoup de chemin devant lui, et de nombreux projets pour l'entreprise et beaucoup de punch pour les mettre à exécution. Anguille sous roche? Mais voilà, tout s'est arrêté un lundi 16 novembre, suite à un conseil d'administration présidé par Moncef Belkhayate, ministre de tutelle. La sentence est tombée comme un couperet : Drissi est remercié, alors qu'il était à cinq mois seulement de la retraite. Et c'est justement ce détail qui a laissé libre cours aux commentaires de tout genre. «Belkhayate pouvait attendre encore quelques mois avant de procéder à ce changement de management. Il y a anguille sous roche», s'interroge un proche du dossier. «Je n'ai pas de temps à perdre. Il fallait apporter du sang neuf à l'entreprise. Mechrafi a toutes les compétences requises quant aux nouveaux challenges de MJS», répond Belkhayate. Exactement le genre de boutade qui peine à convaincre tout le monde. «Le scénario est d'autant plus louche que l'ouverture des plis pour le choix d'un nouveau distributeur intégrateur est imminente. Elle est programmée pour le 5 décembre. Et c'est un gros marché en perspective», souffle un cadre à la CDG, actionnaire de MJS. En effet, c'est ce jour-là que le sort des deux soumissionnaires à l'appel d'offres sera scellé. Un opérateur grec et l'américain GTech sont en course. Ce dernier est un habitué du marché marocain. Spécialiste dans le développement d'applications pour la gestion des jeux de hasard, il a signé des contrats successifs avec la Marocaine des jeux, dont le dernier porte sur la bagatelle de 180 MDH, pour une durée d'un an et demi et qui est arrivé à terme. «C'est complètement décroisé. Je ne vois pas en quoi une nouvelle nomination pouvait avoir de rapport avec un appel d'offres», réplique Belkhayate. De source proche, il est possible qu'aucun des deux soumissionnaires ne soit pris lors de l'ouverture des plis. MJS peut se réorienter vers les compétences internes. Une thèse confirmée par le ministre des Sports. «Rien ne nous en empêche», souligne-t-il. Un scénario qui permettra de dégager de l'argent afin de profiter davantage au fonds national de développement du sport. La préparation d'un business plan pour optimiser le financement de ce fonds fait partie d'ailleurs des chantiers prioritaires du nouveau ministre. Le fabuleux destin de Younès Mechrafi Ceux qui l'ont côtoyé de près parlent d'un homme courtois, gentil et extrêmement doué en matière de... réseautage. «Il connaît tout le monde, se montre serviable infiniment, et attend bien sûr qu'on lui renvoie l'ascenseur au moment opportun», confie un de ses amis. Il faut dire qu'il a le background qu'il faut pour faire partie des people. Le gendre du Premier ministre, Abbas El Fassi est qualifié de connaisseur en systèmes d'informations à travers son expérience à Archos. Entre autres, ce sont ces compétences-là qui sont officiellement mises en avant pour justifier sa cooptation à la tête de MJS. FNDS, le grand gagnant 4 milliards de DH : c'est le chiffre d'affaires réalisé par le marché du jeu au Maroc en 2008, en progression de 11,3% par rapport à l'année précédente. La Marocaine des jeux (MDJ) a réalisé pour sa part 704,2 millions de DH de CA (17,2% du marché), loin derrière le Pari mutuel urbain (PMU) et ses 2,8 milliards de DH mais mieux que la Loterie nationale, dont le CA en 2008 n'a pas dépassé les 562,7 millions de DH. A l'horizon 2012, la MDJ projette d'atteindre 20% de parts de marché avec un CA de 1 milliard de DH, l'objectif étant de porter sa contribution au Fonds national de développement du sport (FNDS) à hauteur de 220 millions de DH, contre 140 millions de DH au titre de l'exercice 2008. Pour se donner les moyens d'atteindre cet objectif, la MDJ ambitionne d'accroître le nombre de ses points de vente, passant d'un peu moins de 2 000 aujourd'hui à 4 000. L'intelligence économique reste le principal axe de développement stratégique. Concrètement, il s'agit simplement de rester attentif aux formules qui réussissent chez nos voisins. Cette stratégie semble donner ses fruits, ainsi qu'en témoigne le lancement en 2008 de "Chrono". Consistant à choisir 8 chiffres parmi 21, ce produit, à lui seul, a engrangé près de 257,5 millions de DH, occupant ainsi la tête du peloton avec 36% du CA de la MDJ, loin devant le légendaire "Totofoot", qui contribue à hauteur de 17% du CA. À l'origine de ce succès, la reprise exacte du concept de "Rapido", jeu lancé par la FDJ en 1999, pour compenser l'érosion du CA du Loto. Tout bénef pour le FNDS.