Mustapha Romli Photographe Véritable référence en matière de photographie au Maroc, Mustapha Romli a très tôt su qu'il voulait faire de sa passion un style de vie, le sien en l'occurrence. Né à Touissit en 1968, il a traversé le monde muni de son appareil pour capturer des moments à jamais figés, sur la pellicule comme dans sa mémoire. Il fera partie de 40 artistes qui exposeront dans «Visions multiples, Multiples émotions photographiques» au Sofitel Tour Blanche à partir du 19 juillet. Les ECO : Quand avez-vous su que vous vouliez devenir photographe ? Mustapha Romli : Je devais avoir 13 ou 14 ans quand j'ai commencé à m'intéresser à la photographie. Mon frère avait un studio photo, j'ai donc fait mes premiers pas dans la photo chez lui. J'ai ensuite acheté mon premier appareil photo à la joutia. Je m'en souviens très bien, c'était un Zenit. Que doit avoir un photographe de plus que les autres pour exceller dans ce qu'il fait ? Si on parle d'un photographe artiste, on opère déjà une distinction entre un «simple photographe» et l'artiste. Un photographe artiste doit maîtriser les techniques photographiques tout en ayant la sensibilité artistique qui lui confère le statut d'artiste. C'est ce qui fait la différence. Vous faites partie des 40 photographes qui exposent au Sofitel Tout Blanche ce 19 juillet. Quel est votre plus par rapport aux autres artistes ? Je dirais pas «ce qui fait le plus» mais plutôt «ce qui fait la différence». Chacun des artistes exposés est singulier de par le sujet qu'il traite et de par sa technique. Vous constaterez cela en visitant l'exposition. En ce qui me concerne, j'y présente un travail qui est photographique à la base, mais avec des interventions plastiques, surtout des peintures, ont été réalisées sur les tirages digitaux. J'ai une palette d'expression très large qui peut mobiliser la photographie, la vidéo, la peinture ou encore des installations. L'essentiel de ma démarche artistique est un processus de recherche. Je commence par la photographie ou la peinture et je finis parfois par la vidéo ou l'installation. Le résultat final est une œuvre composée qui forme un ensemble plus vaste qu'une image seule. Quelles émotions vous procure la photo ? La photographie aboutit toujours à une émotion intense. C'est incroyable: une même chose, une même situation prise parfois dans un même endroit n'est jamais identique. La photographie est toujours une rencontre différente, pleine de surprises. Qu'aimez-vous prendre en photo ? Je n'ai pas de sujet fétiche. C'est différent à chaque fois. Je peux faire une série de portraits -c'est d'ailleurs par le portrait que j'ai commencé en 1989- de l'architecture ou de la mode, surtout dans les années 1990, et des nus, genre artistique que j'ai commencé à aborder dans les années 2000. Aujourd'hui, je dirais que je produis des œuvres plus complexes. Vous avez dit que la photo n'était pas une reproduction mais plutôt une reconstruction. Qu'entendez-vous par là ? J'ai toujours pensé que je ne devrais pas faire de la photographie pour la photographie, la peinture pour la peinture ou la vidéo pour la vidéo. Mon travail s'inscrit dans le champs de l'art. Ainsi, «Un instant d'éternité», ensemble de portraits sous vide enfermés dans des bocaux, n'est pas seulement un ensemble de portraits, c'est aussi un réflexion sur la capture d'un instant T, la capture d'un instant pour l'éternité, une action que permet justement la photographie. Que pensez-vous de la nouvelle vague de photographes et d'artistes d'art contemporain au Maroc ? Je crois qu'il faut faire la différence entre les photographes artistes, c'est-à-dire les artistes qui ont une très grande connaissance technique, et les artistes qui utilisent la photographie comme moyen d'expression. D'une manière générale, la photographie au Maroc a connu une grande progression qualitative. C'est dommage qu'elle n'ait pas encore la place qu'elle mérite dans l'art contemporain marocain. Ne pensez vous que les nouvelles technologies et les applications comme Instagram représentent un danger pour la photographie ? Non, pas du tout, car les vrais artistes sont toujours des avant-gardistes. Ils sont donc toujours en avance par rapport à leur temps. Quels sont vos projets ? Trois projets qui se dérouleront à l'étranger me tiennent particulièrement à cœur. Le premier est une exposition qui débutera en août, au Second Home Art Center de Berlin. Le second se tiendra en automne; il s'agit d'une exposition solo dans une des plus grandes galeries d'art de Tokyo. En novembre, une autre exposition solo s'installera à Valence, en Espagne.