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Electricité : aubaine pour les ménages, la stabilité des prix ne cache-t-elle pas une bombe à retardement ?
Publié dans Les ECO le 27 - 02 - 2025

Alors que la TVA sur l'électricité passe à 18% en 2025, le maintien des tarifs stables interroge. Hausse de la TVA, baisse des tarifs HT : décryptage des mécanismes qui transfèrent la pression fiscale vers les distributeurs.
La hausse de la TVA sur l'électricité, compensée par une baisse des tarifs HT, crée un transfert fiscal risqué, et pas seulement pour les opérateurs. Quand on voit comment la gestion de l'eau au Maroc a suscité plusieurs préoccupations et controverses après coup, on est en droit de s'interroger si le Maroc ne serait pas en train de jouer à un équilibre périlleux entre justice sociale et viabilité énergétique.
En 2024, la TVA sur l'électricité est passée de 14 à 16%, sans peser sur les ménages. Idem cette année. Alors que cette TVA passe de 16 à 18% en 2025, les factures des ménages et des entreprises restent inchangées.
Cette mesure, présentée comme un amortisseur social, cache pourtant des mécanismes fiscaux et réglementaires complexes, révélateurs des tensions entre impératifs budgétaires, équilibres économiques et enjeux sociaux. Décryptage d'une réforme aux multiples facettes.
Piqûre de rappel
La réforme de la TVA sur l'électricité au Maroc, lancée en 2024 dans le cadre d'une refonte plus large du système fiscal, prévoit un alignement progressif du taux sur une période de trois ans. Cette mesure, intégrée dans une approche différenciée par produit (eau ou électricité) et par usage, vise à harmoniser les taux avec les standards internationaux tout en atténuant l'impact immédiat sur les consommateurs.
Pour l'électricité, le taux de TVA est passé de 14% à 16% depuis le 1er janvier 2024, marquant la première étape de cette transition. La deuxième phase, enclenchée le 1er janvier 2025, porte le taux à 18%, tandis que la troisième et dernière étape, applicable à partir du 1erjanvier 2026, achève cet alignement en fixant la TVA à 20%.
Cette progression graduelle, étalée jusqu'en 2026, répond à un double impératif : générer des recettes fiscales supplémentaires pour financer les priorités sociales et économiques du pays, tout en permettant aux ménages et aux entreprises de s'adapter progressivement aux nouvelles normes.
Cependant, cette hausse régulée s'accompagne d'un mécanisme compensatoire complexe, où les tarifs hors taxes (HT) de l'électricité sont ajustés à la baisse pour neutraliser l'effet sur les prix finaux (TTC), transférant ainsi une partie de la charge fiscale vers les opérateurs du secteur.
La stabilité sociale actuelle ne se paie-t-elle pas au prix d'une vulnérabilité du secteur ?
La hausse progressive de la TVA sur l'électricité (de 14% à 20% entre 2024 et 2026) s'inscrit dans une logique d'alignement sur les standards internationaux et de renforcement des recettes fiscales. Toutefois, le maintien des prix TTC malgré cette augmentation repose sur un équilibre fragile : les tarifs hors taxes (HT) sont révisés à la baisse pour compenser la hausse de la TVA, réduisant mécaniquement la marge des distributeurs.
Ainsi, la révision à la baisse des tarifs hors taxes (HT) pour absorber la hausse de la TVA, tout en maintenant les prix TTC stables, opère un transfert silencieux de la charge fiscale vers les distributeurs d'électricité. Ce mécanisme, bien qu'indolore pour le consommateur final, comprime directement les marges des opérateurs énergétiques, dont les revenus dépendent structurellement de ces tarifs réglementés.
En pratique, chaque point de TVA ajouté se traduit par une réduction équivalente du prix HT, rognant la rentabilité des activités de distribution. En maintenant les prix TTC stables, malgré la hausse de la TVA, le gouvernement cherche à préserver la compétitivité des entreprises, notamment industrielles, en évitant un choc inflationniste immédiat. Cette stratégie, saluée par Younès Idrissi Kaitouni, directeur général de la DGI, lors d'une récente conférence-débat, comme un moyen de «financer le développement sans peser sur l'investisseur», permet de protéger les secteurs énergivores face à la concurrence internationale.
Cependant, cet équilibre apparent masque une réalité moins visible. La révision à la baisse des tarifs hors taxes (HT) comprime mécaniquement les marges des distributeurs d'électricité. Ces derniers, contraints d'absorber une partie de la hausse fiscale, voient leur capacité d'autofinancement et d'investissement dans les infrastructures s'éroder progressivement.
En effet, cette érosion progressive des marges, cumulée sur trois ans (2024-2026), menace la capacité des entreprises à financer des investissements critiques, tels que la modernisation des réseaux, l'intégration des énergies renouvelables ou la résilience face aux aléas climatiques. Si l'Etat évite ainsi un choc social immédiat, il prend le risque de fragiliser un secteur stratégique, déjà confronté à des coûts de production en hausse et à des exigences de transition énergétique.
Un paradoxe se dessine ainsi : si la mesure protège à court terme la compétitivité économique, ne risque-t-elle pas, à moyen terme, de fragiliser la modernisation du réseau électrique et la transition énergétique, pourtant essentielle à la résilience du modèle productif marocain ? À moyen terme, cette compression pourrait conduire à un cercle vicieux : une baisse des investissements entraînant une dégradation de la qualité de service, puis des pressions tarifaires futures pour compenser les manques – une dynamique contraire à l'objectif affiché de compétitivité industrielle.
Comme le souligne un expert des marchés énergétiques, «cette approche revient à puiser dans les réserves des distributeurs pour financer des priorités budgétaires, sans garantir leur pérennité opérationnelle». Un arbitrage délicat, où la stabilité sociale actuelle se paie au prix d'une vulnérabilité sectorielle accrue.
Le paradoxe de la régulation tarifaire
La note synthétique des mesures de la LF 2024 publiée par la DGI précisait, pour le cas de la hausse de la TVA sur l'électricité, que «les tarifs de vente hors taxes […] ont été révisés à la baisse pour compenser la hausse du taux de TVA».
Cette intervention réglementaire soulève des questions majeures : jusqu'où ce modèle va-t-il tenir ? Comme on a pu le voir avec la gestion de l'eau, qui endossera les responsabilités ? En gelant les prix TTC, l'Etat assume un rôle de protecteur du pouvoir d'achat, surtout pour les ménages vulnérables.
Cependant, ce choix reporte le fardeau sur les distributeurs à court terme, contraints d'absorber une partie de la hausse fiscale via une compression de leurs revenus. Si cette mesure est viable à court terme, son extension sur trois ans (2024-2026) interroge.
Comment concilier des objectifs sociaux immédiats avec des impératifs de long terme, dans un contexte où chaque point de TVA supplémentaire grève un peu plus la résilience des acteurs clés de la chaîne énergétique ?
Un équilibre précaire
Les recettes supplémentaires générées par la TVA (estimées à plusieurs milliards de dirhams sur trois ans) alimentent les budgets dédiés à la santé, l'éducation et les infrastructures. Cependant, le report de la charge fiscale, présenté comme une solution indolore pour les ménages, pourrait cacher une bombe à retardement budgétaire.
En sacrifiant la rentabilité des opérateurs énergétiques au nom de la stabilité sociale, l'Etat ne s'expose-t-il pas à un risque de contre-choc fiscal : une dégradation des infrastructures, causée par des investissements différés, pourrait obliger à renflouer les distributeurs via des subventions publiques.
Un scénario qui créerait un paradoxe où les recettes supplémentaires de la TVA – initialement destinées à financer hôpitaux et écoles – seraient partiellement recyclées pour combler les déficits sectoriels, annulant ainsi une partie des gains escomptés.
Une dynamique perverse qui illustre la limite des mécanismes de compensation réglementaire : en substituant une pression fiscale visible (sur le consommateur) par une pression indirecte (sur les entreprises), le modèle transforme les distributeurs en «contribuables-relais», sans garantir leur viabilité à long terme.
Comme le disent plus d'un, «les ressources fiscales servent à construire l'Etat social, mais elles ne doivent pas asphyxier ceux qui le font vivre». Un avertissement crucial, alors que le gouvernement navigue entre impératifs de justice sociale et préservation des équilibres économiques sectoriels..
La quadrature du cercle réglementaire
Le maintien des prix TTC de l'électricité malgré la hausse de la TVA illustre la difficile quadrature du cercle entre justice fiscale, compétitivité économique et viabilité sectorielle. En effet, le maintien des prix TTC de l'électricité, malgré la hausse de la TVA, incarne le dilemme central des politiques publiques marocaines : concilier des objectifs économiques contradictoires avec des outils réglementaires limités.
D'un côté, la justice fiscale exige un élargissement de l'assiette pour financer les services essentiels (santé, éducation); de l'autre, la compétitivité impose de préserver le pouvoir d'achat et la rentabilité des entreprises. Entre ces deux pôles, la viabilité du secteur énergétique devient la variable d'ajustement invisible.
Si le Maroc maîtrise encore l'équation sociale, l'«élasticité réglementaire» atteindra ses limites : chaque point de TVA supplémentaire accentue la pression sur les distributeurs, tandis que les besoins d'investissement dans les réseaux et les énergies renouvelables s'accumulent.
La question n'est plus de savoir si l'élastique cassera, mais quand et comment : une dégradation des infrastructures, une hausse subite des coûts de production, ou un recours massif aux subventions publiques pour éviter la rupture.
Le véritable enjeu, désormais, est d'inventer un modèle où la TVA ne soit plus un outil de compensation, mais un levier au service d'une transition énergétique inclusive – sans sacrifier ni le contribuable, ni l'investisseur, ni l'opérateur.
Bilal Cherraji / Les Inspirations ECO


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