Pendant des décennies, la carte mondiale du progrès technologique s'écrivait selon des lignes bien établies. L'innovation nous venait naturellement du Nord, l'adoption tardive suivait au Sud. Pourtant, en ce mois de novembre 2025, le Maroc ajoute une prouesse de plus à son tableau de chasse particulièrement densifié au cours des derniers mois. En réussissant l'un des déploiements 5G les plus rapides jamais observés dans le monde, notre pays redessine les contours de cette géographie inégalitaire. Pourtant, ce qu'on appelle déjà "un record mondial" n'est pas qu'une démonstration technique. C'est une vision maturée, caractérisée par une architecture réglementaire robuste et un pilotage rigoureux. On a accordé du temps aux opérateurs pour se préparer, bâti des obligations contractuelles détaillées, garanti l'interopérabilité, sécurisé la chaîne d'approvisionnement, fait en sorte de protéger la souveraineté numérique. Et plus loin encore que tout ceci, ce décollage réussi est un cas d'école qui parle aussi à l'Afrique et au monde arabe. Dans une région souvent décrite comme consommatrice passive des révolutions numériques, le Maroc montre l'exemple. Sa 5G n'est pas importée, elle est maîtrisée. Elle s'appuie sur un socle juridique national, une infrastructure locale, une exigence de qualité, et une volonté d'inclusion. De plus, elle n'est pas réservée aux élites technophiles de Casablanca ou Rabat, puisque les plans de déploiement incluent des zones rurales, des capitales régionales et des pôles industriels. Notre lecture ne se situe pas non plus dans une posture de contentement, puisque, bien évidemment, l'essentiel reste à faire. Une semaine seulement est passée depuis le top départ de la fusée 5G, et la vitesse d'exécution ne doit pas masquer les défis immenses. Il s'agira de couvrir l'ensemble du territoire, d'éviter les fractures numériques, de protéger les données des citoyens, d'encadrer les usages industriels et de garantir une souveraineté numérique dans un monde fragmenté. Mais cette réussite initiale suffit déjà à rappeler que le progrès n'est plus une exclusivité du Nord et qu'au lieu d'essayer de rattraper le train, on peut le conduire. Meriem Allam / Les Inspirations ECO