Avec la validation des offres de partage non activé de Maroc Telecom, Orange Maroc et Wana Corporate, l'ANRT redéfinit le cadre d'accès aux réseaux FTTH. Cette décision, pierre angulaire de la deuxième phase de mutualisation, intervient au moment où le Royaume active la 5G, renforçant l'importance d'une infrastructure fibre ouverte, harmonisée et capable de soutenir la prochaine génération de services numériques. La régulation de la fibre franchit un cap. En approuvant les offres techniques et tarifaires des trois opérateurs intégrés, l'Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) formalise le dispositif de partage non activé du réseau FTTH et engage le secteur dans un modèle où les infrastructures devront être ouvertes, transparentes et accessibles aux opérateurs commerciaux. Cette validation marque l'entrée en vigueur de la deuxième phase du processus de mutualisation prévu par la décision 05/25. Elle intervient au moment où le Maroc lance la 5G, renforçant la nécessité d'un socle fibre robuste et partagé pour accompagner cette transition technologique. Un cadre réglementaire consolidé et un processus longuement négocié La décision s'inscrit dans un corpus réglementaire déjà riche, fondé sur la loi 24-96 relative à la poste et aux télécommunications et les décrets fixant les modalités d'interconnexion et d'organisation du marché. Depuis 2018, les lignes directrices relatives au partage FTTH encadrent les aspects opérationnels, tarifaires et contractuels de la mutualisation. En 2025, l'ANRT a invité les trois opérateurs à soumettre leurs projets d'offres techniques et tarifaires concernant le partage non activé, une approche qui consiste à mettre à disposition les infrastructures passives de la fibre sans activation du service. Les versions successives, amendées entre juin et octobre 2025, ont fait l'objet d'échanges approfondis entre le régulateur et les opérateurs avant d'être consolidées dans cette décision. Le partage non activé, un outil central pour éviter la duplication des réseaux Au cœur de cette étape réglementaire figure le principe de partage non activé. L'opérateur propriétaire d'une infrastructure FTTH doit mettre à disposition une ligne non activée, permettant à un opérateur commercial d'offrir un service FTTH à ses clients sans déployer de nouveaux ouvrages. Le mécanisme couvre également la mise à disposition d'emplacements au Point de mutualisation (PM), l'accès à des fibres optiques noires reliant le PM au Nœud de raccordement optique (NRO), ainsi que l'hébergement éventuel des équipements de l'opérateur commercial dans les locaux du NRO. Cette logique de mutualisation répond à l'objectif d'éviter la duplication coûteuse des infrastructures, d'accélérer la couverture nationale et de permettre aux opérateurs commerciaux de bénéficier des investissements déjà réalisés. L'ANRT rappelle d'ailleurs que la mise à disposition d'informations géoréférencées sur les zones couvertes en fibre constitue une obligation majeure, afin de garantir la transparence et la planification des déploiements. Une dimension nouvelle : l'usage de la fibre FTTH pour le réseau mobile La décision introduit un élément structurant pour l'écosystème mobile. Chaque offre doit désormais inclure un Point de raccordement aérien mobile (PRAM) permettant aux opérateurs de raccorder leurs sites mobiles via l'infrastructure FTTH passive. Ce dispositif vise à renforcer la couverture mobile, à faciliter la densification du réseau et à réduire les coûts liés à la construction de nouvelles liaisons. Ce lien entre fibre fixe et réseau mobile traduit l'évolution des télécommunications, où la performance des services mobiles dépend largement de l'accès à une connectivité fibre jusqu'aux antennes. Des tarifs de gros encadrés pour stimuler la concurrence L'analyse de l'ANRT, fondée sur les propositions des opérateurs et les conclusions de la décision 05/25, insiste sur la nécessité de proposer des tarifs de gros favorables à la concurrence. Le régulateur souligne que ces niveaux tarifaires doivent contribuer à dynamiser le marché et bénéficier aux utilisateurs finaux. À l'issue de son évaluation, l'ANRT recommande l'application de réductions tarifaires significatives, comprises entre 20% et 70%, selon les services concernés. Cette orientation traduit la volonté de favoriser une plus grande diversité d'offres commerciales FTTH. La décision approuve formellement les offres techniques et tarifaires actualisées des trois opérateurs, dans leurs versions arrêtées au 2 octobre 2025. Chaque opérateur est désormais tenu de publier son offre sur son site Internet et de répondre à toute demande d'accès émanant d'un opérateur commercial. L'ANRT se réserve toutefois un pouvoir d'intervention permanent. Elle peut exiger des opérateurs concernés d'ajouter ou de modifier certaines prestations, si cela s'avère nécessaire pour garantir les principes de non-discrimination, de transparence et d'objectivité, ou pour faciliter l'introduction de nouveaux services. Ce mécanisme assure une capacité d'ajustement continue face aux évolutions technologiques et aux dynamiques concurrentielles. Vers une nouvelle phase de maturité du marché FTTH La mise en œuvre du partage non activé ouvre un cycle déterminant pour l'écosystème de la fibre. Elle permet d'articuler, autour d'un cadre normatif clair, les investissements massifs réalisés depuis plusieurs années et les attentes d'un marché en pleine expansion. En renforçant la mutualisation des infrastructures, la décision crée les conditions d'un déploiement plus rapide, d'une concurrence mieux structurée et d'une utilisation plus efficiente des réseaux. Le Maroc se dote ainsi d'un levier essentiel pour soutenir la montée en capacité du très haut débit fixe et accompagner l'essor des usages numériques liés à l'arrivée de la 5G.