CEO et cofondateur de Docline Portée par une levée de fonds réunissant Arcano Partners et CDG Invest via 212Founders, Docline accélère son implantation au Maroc avec une ambition assumée : structurer la montée en puissance de la santé digitale B2B au moment où l'extension de l'AMO recompose le rôle des assureurs et des entreprises dans l'accès aux soins. La levée marque une étape importante pour Docline. Quels sont les axes prioritaires que ce financement va permettre d'accélérer au Maroc et à l'international, notamment en Afrique francophone ? Cette levée est un moment structurant pour Docline. Elle confirme la pertinence de notre modèle et l'intérêt d'acteurs institutionnels majeurs, marocains comme espagnols, pour une approche de Virtual Care capable de répondre aux défis actuels des systèmes de santé. Elle nous permet d'accélérer sur trois axes clés. Le premier axe consiste à renforcer le cœur médical de notre plateforme. Nous investissons dans l'intégration d'IA, dans l'enrichissement de nos parcours en médecine générale, santé mentale, maladies chroniques et programmes de prévention. L'objectif est d'offrir au Maroc un standard international de soins digitaux, fondé sur la qualité médicale, la continuité du suivi et l'orientation structurée des patients. Le deuxième axe porte sur le déploiement à grande échelle de nos premiers succès marocains. Les use cases menées avec de grandes entreprises marocaines ont produit des résultats très solides — en termes d'adoption, de satisfaction, d'accessibilité et d'impact sur les parcours. Cette levée nous permet d'adapter notre offre aux spécificités culturelles, réglementaires et opérationnelles du marché. Le troisième axe concerne la dimension régionale. Nous opérons déjà en Espagne, au Maroc et en Amérique latine, et notre ambition est que le Maroc devienne notre base d'expansion en Afrique francophone. Le pays dispose d'un écosystème assurantiel avancé, d'une dynamique de digitalisation rapide et de la montée en puissance de l'AMO. C'est un terrain idéal pour construire des modèles de Virtual Care exportables et adaptés aux réalités du continent. Vous qualifiez le Maroc de marché clé en pleine digitalisation. Quels besoins spécifiques du système de santé avez-vous identifiés comme prioritaires pour le déploiement de votre modèle de Virtual Care ? Le Maroc vit un moment charnière de son histoire sanitaire. Avec la généralisation progressive de l'Assurance maladie obligatoire, le pays se rapproche d'une couverture quasi-universelle : plus de 30 millions de personnes sont désormais assurées, contre moins de la moitié avant la réforme. Ce progrès social entraîne toutefois une hausse rapide de la demande de soins, dans un système déjà marqué par un déficit de ressources humaines et de fortes inégalités territoriales en matière d'accès médical. Dans certaines régions, la densité de médecins reste largement inférieure aux standards de l'OMS, tandis que les zones mieux dotées connaissent déjà une sur-utilisation des services et une pression croissante sur les praticiens. Avec l'extension de l'AMO, ces tensions devraient s'amplifier, comme on l'observe en Europe, où la fréquence de recours dépasse les capacités d'absorption. Dans ce contexte, le Virtual Care n'est plus un simple outil de convenance. Il devient un levier structurel pour recentrer la santé autour du patient et mieux aligner les intérêts sur l'Etat, les assureurs et les professionnels. Il permet de structurer des parcours de soins, d'améliorer l'orientation des patients, de renforcer l'accessibilité à des soins de qualité et de maîtriser la sinistralité. Concrètement, le Virtual Care optimise le temps médical en libérant les médecins de nombreuses tâches paramédicales et administratives. À l'échelle du système, il constitue aussi une infrastructure de veille et de prévention : meilleure gestion des maladies chroniques, détection anticipée des signaux faibles, capacité à piloter plus finement les politiques de santé publique. C'est exactement le type d'outil dont le Maroc aura besoin pour réussir la généralisation de l'AMO sans compromettre la qualité ni l'accessibilité des soins. Docline met en avant une expertise de plus de dix ans en Espagne, avec plus de deux millions de patients pris en charge. Comment cette expérience internationale vous donne-t-elle un avantage comparatif sur le marché marocain B2B ? Notre expérience en Espagne constitue un avantage décisif pour le Maroc. Nous arrivons avec un modèle de Virtual Care éprouvé depuis plus de dix ans auprès d'assureurs leaders, ayant accompagné plus de deux millions de patients dans un contexte très proche de celui vers lequel évolue le Maroc. Nous disposons ainsi de parcours de soins structurés, validés et mesurés – accès, résolution, orientation, gestion de la chronicité, santé mentale, prévention – déjà testés à grande échelle et intégrés chez des acteurs exigeants. Cela nous confère une capacité d'exécution immédiate, avec un modèle performant que nous adaptons aux spécificités locales, répondant aux attentes d'assureurs et d'entreprises en quête de solutions fiables, rapides à déployer et générant un impact mesurable. Notre présence continue au Maroc nous a permis d'observer l'usage réel de la santé digitale. Les pilotes menés avec des entreprises marocaines ont affiné notre compréhension des comportements de recours, des types de demandes et des spécialités sollicitées. Ces données locales ont renforcé la précision de nos protocoles, la structuration de nos équipes et l'adaptation de nos parcours. L'expérience espagnole nous apporte également une forte expertise d'intégration avec les payeurs, un atout pour accompagner la transformation du système de santé marocain et accélérer l'adoption de solutions digitales par les entreprises et assureurs. Cet avantage international n'aurait toutefois pas suffi sans notre investissement précoce au Maroc. Depuis plusieurs années, Docline s'est conformée aux exigences réglementaires, aux standards de sécurité et aux pratiques locales, ce qui nous a permis de travailler avec de grands comptes et de déployer des pilotes à grande échelle. Cette implantation nous a aussi amenés à personnaliser nos protocoles, nos parcours et notre expérience utilisateur selon les réalités marocaines. Nous disposons aujourd'hui d'un modèle hybride, éprouvé internationalement, validé localement, conforme et immédiatement déployable. Le Maroc est un marché dans lequel nous avons choisi d'investir tôt, convaincus de son potentiel de leadership régional dans la santé digitale. Sanae Raqui / Les Inspirations ECO