Au quartier général de la DGI à Rabat-Agdal, ce n'est pas que la bonne campagne des recettes (30 milliards DH de plus à fin octobre et 20% de croissance) qui suscite l'enthousiasme en cette fin d'année. Les conclusions de l'évaluation réalisée par les auditeurs du FMI à l'automne confirment l'impact de réformes sur le rendement de l'impôt et la mise sur orbite de la transformation de l'administration fiscale. Le «relevé des notes» sur la plupart des indicateurs tranche avec celui de 2018, qui était franchement mauvais. Le management de la DGI assure que «le plus dur commence car cet audit n'est pas une enquête d'autosatisfaction». Le programme, dit «Tax Administration Diagnostic Assessment Tool» (Tadat), évalue les forces et les faiblesses du système d'administration fiscale d'un pays par rapport aux bonnes pratiques internationales à travers un ensemble de domaines et d'indicateurs. Les domaines passés au crible sont : la gestion efficiente des recettes, la redevabilité et la transparence, l'intégrité du registre des contribuables, la gestion efficace du risque, le règlement efficace des contentieux fiscaux, l'exactitude des informations déclarées, le paiement des impôts dans les délais, le dépôt des déclarations fiscales dans les délais et la promotion du civisme fiscal. Le recours au «Tadat » permet au Maroc de «disposer d'un diagnostic objectif et comparable internationalement basé sur la performance de son administration fiscale». Dans leur diagnostic, les experts du FMI relèvent des progrès depuis la dernière évaluation de 2018. Le bond le plus spectaculaire concerne la mobilisation des recettes, la conformité fiscale, la gestion des risques, la transformation numérique et l'amélioration des services aux contribuables. De nombreux indicateurs notés D ou C, c'est-à-dire mauvais, basculent dans la catégorie A1 sept ans plus tard. Au total, quatorze indicateurs ont décroché ce graal contre seulement quatre en 2018. La note «A» correspond à une performance qui satisfait ou se positionne au-dessus des bonnes pratiques internationales. La note «B» renvoie à un «bon niveau de performance» mais un échelon en dessous des bonnes pratiques internationales. La note «C» signifie une performance faible, tandis que la note «D» indique «une performance insuffisante». Plusieurs pistes d'amélioration Le rapport du FMI soulève quelques axes d'amélioration. L'intégrité du registre des contribuables demeure perfectible, notamment en ce qui concerne l'actualisation des données et la radiation des entités inactives. Le délai réglementaire de trois ans avant de classer un contribuable dans la catégorie «inactif» est jugé excessif par le FMI. Par effet de cascade, ce délai dégrade plusieurs indicateurs de performance examinés, notamment le taux de télédéclaration fiscale dans les délais et le niveau élevé des arriérés d'impôts. Plus surprenant, malgré une amélioration enregistrée ces dernières années (60 jours en moyenne), les délais de remboursement de la TVA sont jugés encore longs, de même que les délais de la résolution des contentieux fiscaux, comparés aux bonnes pratiques internationales. Ces axes d'amélioration feront l'objet d'une mission d'assistance technique du FMI en 2026 afin d'accompagner la DGI pour l'élaboration d'une feuille de route intégrant des mesures à court, moyen et long terme pour combler les lacunes identifiées par le diagnostic. Le message central de l'audit du FMI insiste sur les progrès significatifs réalisés par le Maroc et son alignement progressif sur les standards internationaux en matière d'administration fiscale. Il met, par ailleurs, en évidence la nécessité de poursuivre et d'accélérer les chantiers de modernisation, notamment sur le volet législatif et organisationnel, afin de fiabiliser les données, optimiser les processus de gestion et renforcer la performance de l'administration. Les experts du FMI ont particulièrement tressé des lauriers au fisc sur la mobilisation de recettes et la digitalisation des services, la DGI étant par ailleurs citée parmi les locomotives de l'e-administration au Maroc, «ce qui renforce la transparence, la traçabilité et la qualité de gestion». La mise en place d'une approche intégrée et centralisée de gestion des risques de non-conformité, soutenue par un système de recoupement et d'analyse des données, est le lubrifiant du moteur qui fait exploser les recettes fiscales depuis cinq ans avec des taux de croissance à deux chiffres. Fait rare, même une partie des parlementaires de l'opposition ont récemment salué la performance du ministère des Finances au cours des discussions sur le projet de loi de finances. Si le compteur des rentrées d'impôt explose, c'est aussi parce que beaucoup de «passagers clandestins» se sont identifiés, mais il faut surtout noter l'efficacité du contrôle fiscal basé sur les risques, dont «l'exécution est suivie de manière rigoureuse, permettant d'améliorer la qualité et l'impact des vérifications». Que contient la grille d'évaluation du FMI Le «Tax Administration Diagnostic Assessment Tool» (Tadat) est un cadre méthodologique international destiné à apprécier le niveau de performance des administrations fiscales à travers une évaluation, factuelle et standardisée, des grandes composantes du régime d'administration fiscale d'un pays et de son niveau de maturité par rapport aux bonnes pratiques internationales. Ces évaluations permettent d'identifier les forces et les faiblesses des systèmes, des processus et des institutions d'administration fiscale ; d'établir le programme de réforme, y compris les objectifs, les priorités, les initiatives et le déroulement de leur mise en œuvre ; de faciliter la gestion et la coordination de l'appui extérieur aux réformes et parvenir à une mise en œuvre plus rapide et plus efficace. Le dispositif «Tadat» repose sur 9 domaines d'analyse et 32 indicateurs de performance, notés sur une échelle graduée (A à D) garantissant une comparabilité internationale. Ces indicateurs sont chacun fondés sur une à cinq dimensions de mesure pour un total de 55 dimensions. Abashi Shamamba / Les Inspirations ECO