C'est aujourd'hui que Aziz Akhannouch, ministre de l'Agriculture et des pêches maritimes, est attendu pour présenter un bilan d'étape pour le Plan Maroc Vert. Le grand oral d'Akhannouch durera toute une journée, à l'occasion des 3es Assises de l'agriculture, prévues à Meknès. Le thème retenu cette année est «Agriculture solidaire : cap sur la qualité», un choix visant à «mettre en avant toute la dynamique créée autour du pilier II du Plan Maroc Vert, lancé en avril 2008», soulignent les organisateurs. En plus de la signature de conventions, trois ateliers sont au menu de ces Assises dont les thèmes tournent autour de l'«approche différenciée pour l'agriculture solidaire», le «couple produit/marché» et le «Plan Maroc Vert». Et c'est notamment ce dernier atelier qui attire l'attention des professionnels et des observateurs. Il y sera question de bilan d'étape du plan de développement sectoriel, lancé par Akhannouch en 2008. Lors des assises de l'industrie, Ahmed Reda Chami, ministre du Commerce et de l'industrie, avait dressé un bilan critique du Plan Emergence II, sauf pour la partie agroalimentaire du plan, dont les déclinaisons dépendent en grande partie du plan Maroc Vert. Interpellé début avril sur ces questions, Chami a répondu que c'est à son collègue de l'Agriculture de répondre à ces questions. Ainsi, Akhannouch devrait dresser un bilan d'étape de la partie «manquante» d'Emergence II et de Maroc Vert... en principe. En 2009, le Roi Mohammed VI avait sommé son gouvernement de cibler les petits agriculteurs, notamment en matière de financement. Cibler le petit agriculteur C'est d'ailleurs l'objet du pilier II du Plan Maroc Vert. L'année dernière, trois banques (Attijariwafa bank, Crédit Agricole et Banque Populaire) ont annoncé des programmes de financement destinés au Plan. Des sources informées parlent d'une quatrième banque qui devrait annoncer aujourd'hui son intérêt pour Maroc Vert. Aucune information ne filtre quant à l'identité de cet établissement financier, mais les regards se tournent tout naturellement vers la BMCE. Par ailleurs, de l'avis de plusieurs observateurs, au cas où le ministre de l'Agriculture présentait un bilan chiffré de Maroc Vert (peu probable), il serait loin des objectifs présentés au Souverain en 2008, notamment au niveau des projets réalisés, du financement et de la mobilisation de l'assiette foncière. Sur ce niveau, le plan tablait sur 70.000 ha mobilisés par an. Selon cette source de l'Agence de développement agricole (ADA), organe institutionnel désigné officiellement pour le suivi de la stratégie, seulement 21.000 ha ont pu être dégagés. Et ce, après la cession de la troisième tranche de la concession des terrains de l'ex-société Sodea-Sogeta. L'enjeu pour le département de l'Agriculture est de trouver le foncier nécessaire à la réussite du plan Maroc Vert (700.000 sur dix ans). Pour ce qui est des 21.000 ha mobilisés, l'ADA vient de lancer un appel d'offres pour sa concession au privé. Cette opération concerne 57 grands projets de plus de 100 ha, 136 moyens projets dont la superficie est comprise entre 20 et 100 ha ainsi que 83 petits projets pour les exploitations agricoles de moins de 20 ha. Si la concession est ouverte aux personnes physiques ou morales, marocaines ou étrangères, elle est assortie de critères. La deadline fixée par l'ADA pour la remise des offres est le 25 juin 2010. Pour ce qui est des projets programmés, on parle de 180 projets réalisés, dont 66 projets du pilier I, et 114 projets du pilier II ont été initiés». En 2008, «Maroc Vert» avait programmé 700 à 900 projets du pilier I (grands projets à valeur ajoutée) et 300 à 400 projets du pilier II (mise à niveau de la petite agriculture). Toujours sur dix ans. 150 milliards de DH à injecter Au total, la stratégie de développement du secteur de l'agriculture nécessite un investissement de 100 à 150 milliards de DH, à débloquer sur 10 ans. Sur ce total, l'Etat financera 50 milliards de dirhams, le ministre de l'Economie et des finances, Salaheddine Mezouar, s'y est déjà engagé. Reste un reliquat de 100 milliards de dirhams. Sa prise en charge devrait incomber au secteur privé et aux bailleurs de fonds internationaux. 60 milliards de dirhams ont déjà trouvé preneur, puisque le secteur bancaire, à l'occasion des dernières Assises de l'agriculture, s'est engagé à déployer ce montant sur cinq ans. Trois banques sont en fait directement concernées : Attijariwafa bank (AWB), la Banque Populaire (BP) et le Crédit Agricole du Maroc (CAM) à raison de 20 milliards de dirhams chacune. Cependant les trois banques n'y mettent pas le même engagement. En effet, AWB et BP ont certes mis en place des solutions de financement dédiées à la filière agricole, mais sans revoir leur démarche d'octroi de crédits afin de l'adapter à cette cible. «Le facteur temps compte particulièrement dans le lancement d'un projet agricole et c'est toujours un délai de 6 mois qui est requis au niveau d'AWB et BP pour l'étude des dossiers de crédit», relate un observateur. Il se dit même qu'à ce jour aucun financement n'a été débloqué chez ces deux dernières banques. Le CAM en revanche manifeste nettement plus d'implication. L'établissement s'était engagé sur la création du fonds Nebetou, dédié aux produits de terroir à haute valeur ajoutée (chose faite aujourd'hui). La banque a aussi créé une filiale dédiée, Tamwil El Fellah, qui propose des solutions de financement segmentées par besoins et clientèles ciblés.