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Quel avenir pour nos « vieux » ?
Publié dans Le Soir Echos le 22 - 12 - 2010

Le Maroc est en passe de vivre une formidable transition démographique. Tandis que l'espérance
de vie se rallonge, que la société aspire à un mode de vie moderne, la demande de structures d'accueil,
de spécialisations et d'un système de retraite est de plus en plus pressant. Reportage.
Le Maroc vieillit et dans l'expression de ses premières rides, une nouvelle problématique tant sanitaire que sociale apparaît. Les chiffres du dernier recensement réalisé en 2008 par la CERED sous la tutelle du Haut commissariat au Plan sont éloquents. En 2004, le pays comptait 2,4 millions personnes âgées de plus de 60 ans. La projection à 2030 compte 5,8 millions de personnes et pratiquement 24%, soit un quart des citoyens, à l'horizon 2050. Des données d'autant plus alarmantes qu'elles se heurtent à un double constat : l'absence de spécialisation en gériatrie sur le plan sanitaire se confronte aujourd'hui à une évolution de la société de moins en moins apte à assurer la prise en charge d'une personne âgée. Dans son bureau de l'Hôpital Sekkat à Casablanca, Mustapha Oudrhiri, gériatre et président fondateur de l'association l'AGE tire la sonnette d'alarme : «On ne peut pas attendre 20 ans pour commencer à réfléchir et à travailler sur ce problème émergent. Il faut se préparer à l'arrivée des personnes âgées qu'il va falloir prendre en charge correctement».
La gériatrie : une non-priorité
Jusqu'en 2004, année de la signature d'une convention entre le Ministère de la santé et l'Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (APHP), le pays ne disposait d'aucune formation de médecins en gériatrie. A partir de cette date et pendant quatre ans, une dizaine de médecins internistes ont suivi une année de spécialisation en France. Une vague d'espoir pour la prise en charge du 3ème âge au Maroc. Malheureusement, ces médecins furent rapidement confrontés à l'impossibilité d'appliquer leur savoir dans des structures non préparées à la gériatrie. En effet, excepté quelques gériatres éparpillés entre Casablanca, Rabat, Kénitra, Agadir et Fès, il n'existe à l'heure actuelle aucun service de gériatrie dans les hôpitaux du Royaume. Pour pallier le manque, l'Hôpital Sekkat de Casablanca a monté sa propre unité de gériatrie à effectif réduit : deux gériatres, une infirmière, deux kinésithérapeutes et une diététicienne, un minimum pour répondre aux besoins d'une population aussi fragile que complexe.
Autre considération, la gériatrie arrive en fin de liste des priorités du Plan d'Actions 2008/2012 du Ministère de la Santé. Dans cet état de faits, le Ministère du Développement social, de la Famille et de la solidarité a lancé l'élaboration d'une stratégie nationale – ciblée dans les domaines sanitaire, social, du logement et des revenus – en faveur des personnes âgées. Présentée au Conseil du gouvernement en 2009, cette stratégie se dotait d'une approche transversale nécessitant la participation des autres ministères concernés. Mais le Ministère de la Santé préférant mettre en place son propre plan de santé, la stratégie, aujourd'hui à l'état d'inertie, tarde à voir le jour. Principal argument: la mise en place de services de gériatrie au sein des hôpitaux nécessite des moyens trop importants. Or, de nombreuses études mondiales prouvent qu'au contraire, la prise en charge d'une personne âgée au sein d'un service spécialisé qui centralise les activités et travaille en coordination avec les autres services offre une prise en charge rapide et revient donc moins cher à l'Etat.
Protection sociale et associations
En attendant un réveil du gouvernement, une quarantaine d'établissements de Protection sociale pour personnes âgées, autrement nommés les Maisons de bienfaisance, représentent les seules structures d'accueil dont nous disposons aujourd'hui. Des établissements à la population hétérogène comptant, parmi orphelins et victimes de troubles psychiatriques, des personnes âgées en situation précaire, sans famille et terriblement seuls. «Le fait de garder les personnes âgées noyées dans une structure avec d'autres profils et d'autres pathologies n'est pas une solution. Les personnes âgées ont besoin d'une prise en charge comme il en existe pour les enfants avec la pédiatrie. La prise en charge d'une personne âgée est une course contre la montre. Si on perd du temps, on a du mal à remonter la pente et on prend le risque que ces personnes qui étaient autonomes deviennent dépendantes à cause d'un retard de la prise en charge», ajoute M. Oudrhiri. En effet, une personnes âgées plus que tout autre individu nécessite l'attention d'une équipe disciplinaire de médecins spécialisés. Parce qu'elle est polypathologique, elle multiplie les médicaments et déclare des symptômes atypiques qui sont en réalité de véritables maladies. Ainsi, selon le docteur Oudhriri, un corps en position de repli est un trouble du comportement qui risque d'être attribué à l'âge alors qu'il s'agit en réalité d'une maladie que seul un spécialiste est capable de diagnostiquer. Pour pallier le manque, quelques associations s'engagent dans la protection de la personne. C'est le cas de l'Association de Gérontologie «Espoir» (AGE), créée en 2007 à l'instigation des personnels de santé. «Il y a beaucoup de choses à faire sur le plan médical et social. Nous organisons des rencontres annuelles en matière de gérontologie à destination du corps médical. Egalement, en partenariat avec le Ministère du développement social, de la Famille et de la Solidarité, nous offrons une initiation et une sensibilisation du personnel des établissement de protection sociale des personnes âgées par le biais de séminaires. En octobre, nous avons commencé par la formation des médecins qui se poursuivra par celle des infirmiers et des assistantes sociales en 2011. Nous montons enfin des «caravanes» constituées d'équipes mobiles gériatriques à destination des centres» précise le docteur Oudrhiri.
Société : entre devoir et manque de moyens
Le travail du gouvernement et l'engagement des associations est d'autant plus pregnant que la société évolue. D'une part l'individu enclin à l'occidentalisation mène de front travail et vie citadine, trouvant de moins en moins le temps ou l'espace de prendre en charge un proche. Pour autant ce même individu reste inéluctablement rattaché à une notion de devoir familial. En effet, si occidentalisation il y a, force est de constater que cette dernière ne saurait enfreindre les principes traditionnels de solidarité familiale. Selon une étude démographique réalisée par le Haut Commissaire aux Plans, en 2008 seulement 6,8% des personnes âgées sont dépourvues de prise en charge, les autres vivant au sein du foyer familial. En revanche, cette même étude laisse voir que pratiquement 65% de ces personnes prises en charge disent souffrir de solitude. Isolement, manque d'activités, atonie, régression psychomotrice et dépendance, dans la pérennité d'un système traditionnel de la prise en charge, les conditions de vie du 3e âge vont de mal en pis. «La solidarité familiale existe mais elle est en train de s'effriter progressivement. Et ceci, nous le ressentons vraiment en tant qu'acteur de santé. On sent que les familles ont du mal à s'occuper de leurs personnes âgées car soit elles n'ont pas les moyens, soit elles sont prises par autre chose.» En effet, que ce soit sur le plan sanitaire, social et psychologique, la prise en charge d'une personne âgée coûte cher. Selon cette même étude du Haut Commissariat au Plan, seulement 16,1% des personnes âgées touchent une retraite. Un chiffre beaucoup trop faible aux vues de l'ampleur des besoins. Ainsi la réflexion du gouvernement doit-elle avant tout tenir compte de l'élaboration d'un régime des retraites permettant aux personnes âgées d'assurer leur autonomie et leur indépendance financière. «Les gens n'ont pas les moyens d'une telle prise en charge, d'autant plus quand il s'agit d'une personne âgée malade. Beaucoup de personnes sont victimes de maladies psychiques ou neuro-psychologiques et dans ce cas, la famille a besoin d'être soulagée ne serait-ce que par un passage du proche dans une institution gériatrique. Ceci doit devenir une priorité car on ne peut pas laisser une famille en situation de détresse!», lance M. Oudrhiri. Car si la famille reste le plus précieux des foyers d'accueil, les besoins en matière de prise en charge globale sur les plans médico-psycho-sociale et de préparation à la vieillesse sont, aujourd'hui moins que demain, terriblement brûlants.
Témoignages
Yasmina, 24 ans
Aujourd'hui, les personnes âgées comme les enfants ne sont pas pris en considération. C'est comme s'ils n'existaient pas. Par exemple, on oublie de mettre des mains courantes dans les escaliers, de faciliter leur mobilité. Ce sont des choses banales mais indirectement, elles excluent les personnes âgées de la société. En revanche à mes yeux, il est hors de question de laisser mes parents à la merci des autres. La prise en charge ne doit pas être un problème, que ce soit sur le plan moral ou financier. C'est ainsi dans notre religion.
Leila, 42 ans
Je n'ai jamais envisagé de laisser ma mère en maison de retraite ou dans un centre d'accueil. Par contre, j'ai réalisé combien la prise en charge d'une personne âgée pouvait être difficile. Ma mère souffre d'une maladie psychomotrice et j'aimerais qu'elle puisse profiter des soins adaptés, au moins pendant quelques temps. Mais les soins coûtent cher et nous n'avons aucune mutuelle pour en bénéficier. Parfois, je me dis que les choses seraient plus simples si nous avons ce type d'aides.
Sajid, 30 ans
Selon moi, le Maroc, sans prise en charge de l'Etat ni sécurité sociale, ne peut avoir le même fonctionnement que les pays occidentaux. Une grande partie de la population n'a pas les moyens de placer ses personnes âgées dans une structure d'accueil. Pour les autres, ils préfèrent sans doute mettre les moyens dans une maison familiale et une personne qui s'occupe de notre proche. Les foyers d'accueil n'ont pas de sens dans notre société. Après, je ne vais pas prendre l'initiative pour mes proches mais si demain il existe des centres tels que des maisons de retraite, même si je suis un citoyen actif et citadin, je n'envisage pas de laisser mes parents loin de moi. Si j'en ai les moyens, je préfère ramener le centre à la maison, avec toutes les prises en charge médicales possibles. Quoiqu'il arrive, nous resterons les uns près des autres.


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