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Justice : Coulisses d'une réforme jonchée d'épines [INTEGRAL]
Publié dans L'opinion le 16 - 08 - 2025

L'invalidation de la Procédure civile par la Cour Constitutionnelle donne un coup de frein à la réforme du système judiciaire qui paraissait inarrêtable. Rétrospective.
C'est la première fois que le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, se heurte à un obstacle majeur dans son parcours réformateur du système judiciaire. Depuis qu'il s'est lancé dans ce chantier, il a voulu imprimer son empreinte personnelle au point de soulever une colère d'une rare virulence chez les avocats qui s'opposent à toutes ses réformes. Grèves, boycott des tribunaux, manifestations, sitin, diatribes médiatiques... Les avocats ont usé de toutes formes de contestation imaginables pour s'indigner de ce qu'ils appellent "une hérésie législative". Un terme assez fort pour dénigrer le style Ouahbi qu'ils jugent attentatoire à leur profession et, surtout, à l'accès à la Justice et au procès équitable. Certains même parlent de "virage autoritaire", cet épithète n'en fait pas moins unanimité. Ouahbi semble assumer sa vision de la refonte du système judiciaire, qu'il trouve archaïque et très lent. Il est souvent critiqué pour avoir préparé les réformes sans tenir assez compte de l'avis des avocats, qui se sont toujours sentis mis à l'écart et les parents pauvres d'un remue-ménage trop brutal.
Malgré les oppositions, plusieurs réformes, dont celles de la Procédure civile et de la Procédure pénale ont été votées au Parlement. Le bras de fer d'Abdellatif Ouahbi avec ses confrères date depuis sa prise de la fonction ministérielle. Dès le début, le ministre n'a pas caché sa volonté de remodeler le système en profondeur. Le clash a commencé en 2021 sur la question du pass vaccinal qui a paralysé les tribunaux, avant de prendre plus d'envergure en 2023 avec l'annonce du nouveau régime fiscal.
Le choc fut tel entre les deux parties que le Chef du gouvernement a dû intervenir pour calmer les esprits. Un accord fut ensuite trouvé. Cela n'a pas empêché la poursuite des tensions qui se sont exacerbées lorsque le projet de réorganisation de la profession d'avocat a fuité dans la presse.
Les robes noires ont fulminé une nouvelle fois, à tel point que le projet est resté en suspens. Mais, c'est la Procédure civile qui a fait déborder le vase. Les avocats ont décidé cette fois-ci de passer à l'action avec une série de sit-in devant le Parlement. Pour eux, la réforme restreint trop le droit de la défense et empiète sur les prérogatives des juges et, surtout, empêche, disent-ils, les gens d'accéder à la Justice avec le plafonnement du recours en appel et en cassation dans les affaires civiles. Et ce ne fut pas là le comble de la colère. Le 22 septembre 2024, à l'appel de l'Association des Barreaux du Maroc (ABAM), 18.000 avocats appartenant à 17 barreaux se sont rassemblés à Rabat pour dénoncer «l'offensive du gouvernement». Certains se sont même dits agressés par les réformes proposées par le ministre de tutelle.

Le désaveu de la Cour Constitutionnelle ou la revanche des avocats !
Jusque-là, l'élan réformateur d'Abdellatif Ouahbi paraissait inarrêtable. Le ministre continue de préparer ses textes dans le calme absolu. Sa philosophie est claire : c'est au gouvernement élu qu'incombe la réforme, pas aux instances ordinales des avocats qui ont simplement un rôle consultatif. La loi, c'est l'Exécutif, dirait-on.
Puis l'arrêt de la Cour Constitutionnelle tombe comme un coup de couperet. Le 4 août, après avoir été saisie par le président de la Chambre des Représentants, l'assemblée des sages invalide la Procédure civile telle qu'adoptée en deuxième lecture à la Chambre des Conseillers et révoque une série de dispositions jugées inconstitutionnelles.
La copie doit être revue. Au ministère de tutelle, la décision est reçue avec calme et humilité. Ouahbi a tâché de faire preuve de fair play lorsqu'il a réagi officiellement. "Nous n'avons jamais craint le contrôle constitutionnel, bien au contraire : nous l'encourageons et le considérons comme une véritable garantie de l'Etat de droit", a-t-il déclaré.
La décision de la Cour Constitutionnelle est perçue par les uns comme coup de massue à la méthode jugée trop personnelle du ministre qui, selon ses contradicteurs, n'a pas pris le temps nécessaire pour consulter assez tous les acteurs concernés par la justice civile. Quelques avocats sollicités par «L'Opinion» se félicitent du verdict de la Cour qu'ils voient comme une revanche qui leur rend justice. "C'est une décision qui démontre une nouvelle fois le bien-fondé de notre opposition à ce texte qui aurait eu des conséquences irréversiblement funestes sur le fonctionnement de la justice civile s'il était entériné", glisse un avocat au barreau de Casablanca.

Ouhabi accuse le coup !
Maintenant, M. Ouahbi s'apprête à revoir sa copie. "Cette décision ouvre la voie à un débat juridique de haut niveau et renforce notre projet de réforme dans et par les institutions", a-t-il déclaré à la presse au lendemain du verdict.
La réforme est décriée dès que son ébauche est annoncée par tous les barreaux qui se sont ligués pour y faire barrage. Le texte est jugé restrictif à l'accès à la Justice et attentatoire à la séparation des pouvoirs. Ils sont nombreux à décrier le fameux article 17 en vertu duquel le Parquet pouvait demander d'annuler une décision judiciaire définitive dans un délai de cinq ans. Une aberration judiciaire qui portait atteinte aux magistrats du siège. La Cour l'a abrogé pour peu qu'il porte atteinte à la sécurité juridique. Idem pour les restrictions imposées aux voies de recours en appel et en cassation.
D'autres dispositions sont perçues comme ingérences dans les prérogatives du pouvoir judiciaire, comme c'est le cas des articles 408 et 410 qui ont été, à leur tour, censurés. Le ministre de la Justice et le procureur général du Roi avaient la capacité de contester la constitutionnalité d'une décision judiciaire pour peu qu'ils aient un «doute légitime». La Cour n'a laissé point de doute sur la motivation des jugements qui demeure absolue, alors que le texte voulait la limiter en cas de rejet de la demande.

Et maintenant ?
La censure de la Procédure civile a poussé plusieurs avocats à revendiquer l'examen de constitutionnalité de la Procédure pénale qui vient d'achever son circuit législatif. Toutefois, le texte a été tout aussi décrié que la réforme de la Procédure civile, surtout en ce qui concerne l'accès de la société civile à la Justice. La réforme a ôté aux associations le droit de porter plainte dans les affaires de corruption et de détournement des deniers publics, accordant le monopole de lancer des actions judiciaires au plus haut sommet du Parquet (Procureur du Roi près la Cour de Cassation). En parallèle, le droit des associations d'ester en justice est restreint. Des dispositions jugées inconstitutionnelles par les observateurs sachant que le Conseil national des Droits de l'Homme, le Médiateur du Royaume et le Conseil économique, social et environnemental s'y sont opposés dans leurs avis respectifs sur la Procédure pénale. Autant d'indices qui fragilisent davantage le texte face à la loupe constitutionnelle au cas où la Cour serait saisie.

Anass MACHLOUKH
3 questions à Ahmed El Majdi : « C'était un texte de pure insécurité juridique »
* Pensez-vous que le texte pose problème dans son intégralité ?
La réforme de la procédure civile est un texte de pure insécurité juridique. Il est clair que l'article 17 met fin au principe de l'autorité de la chose jugée. Cet article prévoit qu'une fois qu'une décision judiciaire est rendue sur un litige, cette décision, bien que définitive peut être remise en cause par le Parquet sans délai pour motif d'atteinte à l'ordre public, notion très vaste. Il est inacceptable qu'on fasse fi d'un principe qui garantit la stabilité des décisions judiciaires de sorte à éviter les litiges répétitifs sur les mêmes questions. Sinon, on tombe dans l'anarchie judiciaire. Aussi, est-il inconcevable qu'une décision judiciaire définitive soit remise en cause après 30 ans de la date de jugement.

* La création d'un intermédiaire menace-t-elle le rôle de l'avocat ?
C'est une aberration. L'article 76 instaure le "wakil" qui peut représenter les parties et déposer des requêtes introductives sans être soumis aux obligations afférentes à l'avocat comme l'obligation de réserve, et celle de préserver les documents... Le wakil dans le subconscient collectif populaire est le ou l'un des représentants du Parquet et cela prête à confusion. Un wakil peu scrupuleux pourra utiliser ce titre à mauvais escient. Dans un Etat de droit qui se veut démocratique, l'avocat détient le monopole de défense des droits et intérêts des individus devant une justice sereine. Or, l'article 8 permet au juge de confier la mission de médiation des parties au litige à un assistant social ou toute autre personne. La médiation nécessite une connaissance préalable du dossier. Seul l'avocat maîtrise ces mécanismes.

* Le texte a été invalidé par la Cour constitutionnelle. Comment l'amender ?
Si les avocats ont manifesté, ils l'ont fait pour défendre les droits des citoyens qui seront bafoués. Nous appelons donc à la raison et au retour au dialogue.

Recueillis par A. M.
Procédure civile : Un texte voté trop vite ?
L'Association des Barreaux du Maroc (ABAM) a fustigé la rapidité déconcertante par laquelle le projet de loi relatif à la réforme du Code de Procédure civile a été discuté et voté au Parlement. Cette célérité est jugée problématique pour les ténors de l'Association qui estiment que les avocats ont été exclus. Lors d'une conférence de presse tenue lundi 22 juillet, le président de l'ABAM, Houssine Ziani a fait part de sa sidération du fait qu'une réforme si profonde avec des centaines de dispositions soit discutée et amendée en si peu de temps. Il s'est dit sidéré que plus de 1000 amendements soient examinés en une seule journée. En réalité, selon nos informations, les députés ont mis 78 heures de travail à discuter l'intégralité du texte. Le bâtonnier a regretté que l'Association ne soit guère conviée aux concertations. Aussi, a-t-il déploré qu'aucune de ses propositions ne soit prise en considération.
Pour rappel, le projet de loi a été déposé au Parlement le 9 novembre 2023, avant d'être transféré à la Commission compétente quatre jours plus tard. Le texte a été présenté par le ministre pour la première fois le 19 décembre 2023. La discussion détaillée a commencé dès avril 2024. Dix-sept séances ont eu lieu au total. Les amendements ont été déposés dès le 17 juillet. Le texte a été voté deux jours plus tard en commission. Plus de 1000 amendements ont été présentés, dont 321, soit 27%, ont été retenus. Le texte a été voté le 17 juin 2025 par les députés, avant d'être adopté le 8 juillet par les Conseillers.


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