Face aux tensions migratoires, le Maroc appelé à accélérer les réformes    CAN 2025 : Walid Regragui dévoile la liste des Lions de l'Atlas retenus    Coupe arabe : Le Maroc dans le dernier carré après sa victoire sur la Syrie    Alerte météo : Chutes de neige et fortes pluies de vendredi à dimanche dans plusieurs régions    Atlantic Dialogues 2025 : Coup d'envoi de la 14e édition axée sur l'avenir des démocraties et la coopération atlantique    Le Maroc réélu à la tête de l'Union africaine de la mutualité    Les dirigeants de la BERD au Maroc pour des réunions de haut niveau    Drame de Fès : Le CNDH exige une réponse nationale urgente    Cours des devises du jeudi 11 décembre 2025    Taux directeur : BKGR prévoit un statuquo à l'issue du prochain Conseil de BAM    Allemagne : Angela Merkel qualifie la pandémie de Covid-19 de "mise à l'épreuve démocratique"    Gaza: lancement de la campagne « Hiver chaud » au profit de Palestiniens déplacés, avec un financement marocain    Effondrement à Fès : L'émir du Qatar présente ses condoléances à Mohammed VI    Ukraine : Zelensky prêt à envoyer sa proposition du plan Trump    Manœuvres aériennes : Séoul proteste auprès de Pékin et Moscou    Condoléances royales au Président d'Indonésie suite aux inondations ayant touché son pays    Effondrement à Fès : les Emirats expriment leur solidarité avec le Maroc    Prix de la société civile : le Maroc célèbre les acteurs locaux et la diaspora    Renforcement de la position des Femmes, de la Paix et de la Sécurité en Afrique    Classement FIFA : les Lionnes de l'Atlas terminent l'année à la 66e place mondiale    Jamal Ben Saddik condamné à quatre ans pour enlèvement à Anvers    Maroc vs Syrie : les Lions de l'Atlas évolueront avec leur maillot domicile    Maroc-France : La nouvelle géopolitique d'un partenariat militaire stratégique    Températures prévues pour vendredi 12 décembre 2025    Moroccan press unions challenge minister's claims on National Press Council reform    Spain : Pedro Sanchez's PSOE isolated on the Sahara issue in Parliament    AfDB approves €150M credit line to boost sustainable infrastructure in Morocco    L'inscription conjointe du Deepavali et du caftan marocain à l'UNESCO renforce le partenariat culturel entre l'Inde et le Maroc    Edito. Un patrimoine intouchable    Maroc : Megarama ouvre sa première salle IMAX® à Rabat    Diplomatie chinoise : tournée de Wang Yi dans trois pays arabes    Bourse de Casablanca : ouverture en baisse    CA FIFA 2025 / Palestine - Arabie saoudite : un quart de finale explosif pour une place dans le dernier carré    FIFA : Une plainte vise Gianni Infantino pour violation présumée de la neutralité politique    Poivron doux : record des exportations pour la 5e année consécutive    Fonds d'Equipement Communal : 1,61 MMDH de la BAD pour consolider le développement territorial    Marocanité du caftan : L'Algérie battue à plate couture à l'UNESCO [INTEGRAL]    SILA 2025 : Abidjan, carrefour littéraire    Alerte météo : Averses et chutes de neige mercredi dans plusieurs provinces    L'Accord quadripartite antiterroriste, une expérience pionnière    Armement : les FAR renouent les contacts avec KNDS après le fiasco des CAESAR    Ligue 1: Le Marocain Ahmed Kantari nouvel entraineur du FC Nantes    La Déclaration de Rabat sur le Désarmement, la Démobilisation et la Réintégration publiée comme document conjoint de l'ONU    Drame à Fès : les enquêtes se poursuivent, d'autres immeubles restent menacés    Le Caftan marocain inscrit au Patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO    Plein succès pour la 2e édition du Festival des Arts Numériques tenue à l'UM6P    L'UNESCO valide l'inscription du Caftan en tant que patrimoine marocain sur sa liste représentative    Effondrement de deux immeubles à Fès : Le bilan grimpe à 22 morts, le Parquet ouvre une enquête    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Après l'orientalisme, L'Orient créé par l'Orient
Publié dans Le Soir Echos le 26 - 12 - 2011

Après l'Orientalisme - L'Orient créé par l'Orient, volume de 572 pages qui vient d'être publié aux éditions Karthala sous la direction de François Pouillon et Jean-Claude Vatin, avec le concours de l'Institut du monde arabe et de l'Ecole des hautes études en sciences sociales en collaboration avec Guy Barthélemy, Mercedes Volait et François Zabbal, réunit une bonne part des contributions au colloque « L'orientalisme et après ? Médiations, appropriations, contestations » qui se tint en juin dernier à Paris.
Cet ouvrage est d'un intérêt considérable et la lecture en est absolument passionnante. Dès lors, on se réjouit de savoir que la Fondation du Roi Abdul-Aziz Al Saoud pour les études Islamiques et les sciences humaines, sise à Casablanca envisage une publication marocaine de cet ouvrage rendant son prix de vente plus accessible.
La chose s'impose car les trente-deux contributions données à lire constituent un ensemble inégalé de réflexions aussi savantes que stimulantes. Elles balayent un champ exceptionnellement large. Qu'il s'agisse de l'évocation de la contribution des Orientaux à la controverse et à l'érudition au cours du XVIIe siècle par Léon Buskens et Baudoin Dupret ou de l'étude qu'Abdou Filali-Ansary consacre à la conscience historique et au défi de l'historicisme en contextes musulmans, on est d'emblée saisi par la richesse des faits examinés et la finesse d'analyse. Une trentaine d'années après l'événement que fut la parution du livre d'Edward Saïd, L'Orientalisme - L'Orient créé par l'Occident (traduit de l'anglais au Seuil en 1988), il nous est proposé de considérer ces autres orientalismes : l'Orient des Orientaux.
Si on est épaté, c'est aussi, sans doute parce qu'on n'a point lu les mille pages que comportent les deux volumes concoctés à l'initiative de Jean-Claude Vatin D'un Orient l'autre. Les métamorphoses successives des perceptions et connaissances (CNRS, 1991).
François Pouillon nous prévient : « Si, à coup sûr, (…) nous ne sommes pas dans la ligne saidienne, nous ne pensons pas pour autant que la restauration d'une science orientaliste pure soit aujourd'hui tenable. Car l'imbrication, fût-elle relative, de la science et du politique a été suffisamment démontrée (…) mais imbrication ne signifie pas enrôlement, et ce n'est pas rien que de réaffirmer un idéal quand bien même il confine à l'illusion : le plus simple est de repérer l'encerclement par le politique sans en accepter la fatalité ; assumer ainsi la part du jeu, de l'exception, de la différence, qui rétablit précisément l'intellectuel dans sa dignité ».
Les réflexions de Pouillon sur la réhabilitation de l'académisme en peinture qui pousse vers les salles des ventes « tout un stock d'œuvres jusque-là remisées avec le statut de croûtes » attirent l'attention quand il nous invite à penser que « contrairement à ce qu'en dit Saïd, cette peinture a toujours été caractérisée par un jeu complexe de significations ». Esprit libre, le fils de l'architecte François Pouillon (qui lui a donné son prénom) écrit par ailleurs : « Je ne vais pas me faire que des amis en soulignant le fait que des choses qui s'appellent ‘coopération', ‘aide au développement', ‘devoir d'ingérence', voire ‘intégration' mais là, c'est plus discutable, sont à la vérité autant de métastases de l'idéal colonial ».
Ce n'est pas une moindre liberté qui se repère dans l'examen critique auquel s'adonne Zakaria Rhani : Ne touche pas à mon Orient ! Auto-exotisme et anti-anthropologie chez quelques intellectuels marocains contemporains.
Construisant un dialogue sans concessions avec Abdelkebir Khatibi, Tahar Ben Jelloun, Fatima Mernisi et Abdellah Laroui, il en vient à écrire, à propos de Marabouts, Maroc (Gallimard, 2009) : « Ben Jelloun, de son propre aveu, n'avait jamais songé qu'il y avait autant de saints dans son propre pays ; et sans l'intervention de Claudio Bravo, un peintre chilien, il serait resté, pour reprendre un célèbre passage poétique d'Al-Mutanabbi, bienheureux dans sa triste ignorance ».
Ce que Zakaria Rhani vient à pointer dans « l'idéal exotique » apparaissant sous la plume de Ben Jelloun contrairement à ce qui apparaît à lire Le culte des saints dans l'Islam maghrébin (Gallimard, 1954) d'Emile Dermenghem, c'est carrément « l'équation psychologique suivante : « La possibilité pour l'individu du cru de dire sur sa propre société ce qu'il interdit aux Autres de dire ; le droit à l'exotisme et aux fantasmes pour soi sur soi, mais pas pour l'Autre sur le Même ». On mesure par cet exemple la vivacité des intuitions (voire des admonestations) qui font d'Après l'orientalisme - L'Orient créé par l'Orient une lecture constamment roborative.
La place manque pour déployer tout l'arc-en ciel.
Songez que cet ouvrage contient l'explication de « comment le Japon a échappé à l'orientalisme (de l'Occident) » et une généalogie du folklore égyptien, une étude de la réception arabe des Mille et une nuits (XVIIe-XXe Siècle) ou encore une analyse très serrée par François Zabbal de l'islamologie des universitaires musulmans en France. On notera, en regrettant de devoir conclure trop rapidement ce survol, la contribution particulièrement fine de Mohammed Hatimi concernant les tenants de la critique religieuse de l'orientalisme.
Ce qui frappe, à la lecture d'Après l'orientalisme- L'Orient créé par l'Orient, c'est la manifeste loyauté intellectuelle des contributeurs ainsi que l'érudition partagée sans emphase mais non sans verve.
Salim Jay


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.