Russie : L'ambassade du Maroc dément un communiqué sur la communauté estudiantine de Saratov    Affaire Sahara Escobar : La date d'audience a été fixée au 23 mai    Coopération sécuritaire : le Maroc signe un partenariat avec le Brésil    Visa : des frais à la hausse à partir de juin    Justice sélective : Ghalloussi dénonce l'acquittement des accusés dans l'affaire du Plan d'urgence    Transport : Le Maroc souhaite bénéficier de l'expérience turque    La réforme de la protection sociale requiert des mutations profondes de gestion et de gouvernance    Ressources hydriques : Un nouveau protocole entre le Maroc et la Côte d'Ivoire    Entretien. Mohamed Rahj : "Outre la décompensation, l'Etat doit aussi réduire son train de vie"    Ghita Mezzour : La mise en œuvre de la 5G prévue « à moyen terme »    CDG Capital obtient la note « Excellent (mar) » de Fitch Ratings et prévoit une nouvelle certification    SM le Roi adresse un message aux pèlerins marocains devant se rendre aux Lieux Saints de l'Islam    Hamid Enayat: « Le peuple iranien a accueilli la mort de Raïssi avec joie »    Omar Hilale devant le Conseil de sécurité: la protection des civils passe par la prévention des conflits et le règlement pacifique des différends    Afrique du Sud: Jacob Zuma envisage de porter l'affaire de son inéligibilité aux élections devant l'ONU    Guerre à Gaza : Benkirane veut faire annuler le festival Mawazine    Finale Europa League / Leverkusen vs Atalanta : Un Marocain sur le podium !    Foot amical U20 / Maroc-RDC: Les Lionceaux vainqueurs des Léopardeaux    CAF/ 2e Championnat continental de foot scolaire: Demi-finale féminine Maroc-Ouganda cet après midi    Foot: les dix derniers vainqueurs de la Ligue Europa    Le temps qu'il fera ce jeudi 23 mai 2024    Les températures attendues ce jeudi 23 mai 2024    Intoxication alimentaire à Marrakech: Le Conseil de la Commune en action    La Tueuse de Martil condamnée à la perpétuité    Produits médicaux: un nombre record d'organismes de réglementation reconnus par l'OMS    Justice : L'ex-adjoint du maire de Tétouan arrêté à son retour d'un voyage    EU issues new alert over Moroccan hake containing parasites    Le Maroc et la France renforcent leur coopération culturelle    Jeunes étudiants marocains, une élite culturelle qui se démarque à l'international    Année culturelle "Qatar-Maroc 2024": Inauguration de l'exposition "Katara" des monnaies et timbres marocains    Maroc : Le Théâtre Nomade ouvre la marche du «Marrakech fait son cirque»    Les championnats d'Afrique de pétanque, du 6 au 9 juin à Marrakech    L'ambassade du Maroc à Moscou dément l'authenticité d'un communiqué sur la communauté estudiantine de Saratov    Taptap Send Maroc introduit les transferts bancaires directs    Les Banques Marocaines : Leaders de la Croissance Financière en Afrique »    Marrakech.. La Ville Rouge Classée Septième au Monde dans le Top 10 des Meilleures Villes    Imane Feriani Présente « Le Corps Poétique » : Une Exposition Individuelle    La Chine joue un rôle majeur dans la transition énergétique mondiale    Ligue Europa : L'Atalanta Bergame surclasse le Bayer Leverkusen et remporte son premier titre européen    Le ministre de la Justice critique la demande des citoyens de fournir des documents détenus par l'Etat    Déstabilisé, le Polisario change les chefs de ces régions militaires    Les forêts couvrent 30% de la superficie du Rwanda    Sahara : Le Sénégal du président Diomaye Faye réaffirme son soutien au Maroc    Le Maroc à Kigali pour la Basketball Africa League    M. Hilale devant le Conseil de sécurité: la protection des civils passe par la prévention des conflits et le règlement pacifique des différends    Le renforcement de la coopération culturelle au centre d'une séance de travail à Paris entre M. Bensaid et son homologue française    AS Monaco: Eliesse Ben Seghir autorisé à disputer les Jeux olympiques 2024    Historia del té en Marruecos: Una tradición antigua y un arte social distintivo    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Entretien avec Dr Khalid Hanefioui «Le conflit est omniprésent dans notre société»
Publié dans L'observateur du Maroc le 07 - 05 - 2013

Ce serait une erreur que de lier la violence au Maroc à des actes isolés en rapport avec le hooliganisme. Le problème est à la fois beaucoup plus profond et beaucoup plus grave. Parole de spécialiste.
L'Observateur du Maroc. Au-delà de ce qui pourrait se passer en marge d'un match de football, peut-on considérer les Marocains comme un peuple violent ?
Dr Khalid Hanefioui. Pour répondre à cette question, j'aimerais bien commencer par une autre question introductive pour tenter d'ouvrir de nouvelles pistes : « Est-il possible d'imaginer une société sans violence? ». Si la réponse est oui, alors cette société doit être placée sous une observation longitudinale afin d'examiner et de réexaminer la validité de cette hypothèse d'une part et d'expérimenter les mécanismes mis en place par cette société pour annihiler cette violence, d'autre part. Si la réponse est non, un glissement de paradigme sera enregistré à ce moment là et qui pourrait nous conduire vers un premier constat : La violence est universelle. Si la société humaine est violente, la société marocaine l'est aussi et par défaut les Marocains, comme les autres peuples, produisent des comportements violents.
Sur la base du postulat, à savoir que ce phénomène est universel, la question se transforme pour essayer de s'interroger sur les particularités de la violence au niveau local. La société marocaine passe actuellement par des mutations profondes qui touchent ses différents univers : culturel, religieux, politique, géographique, social, etc. Dans ce contexte de changement, le conflit comme l'une des sources de la violence, est omniprésent : au sein de la famille, à l'école, dans l'administration, dans l'entreprise, à l'université, dans l'espace public, etc. Ce conflit trouve ses origines dans notre difficulté à gérer les différences (différence de sexe, de génération, de culture, d'idéologie, de systèmes de valeurs ...). Cette difficulté est d'autant plus accentuée que la société est dépassée par le rythme accéléré de ses propres mutations. Résulte alors un décalage entre « l'évolution » de la société et le développement des normes et des mécanismes de contrôle qui structurent le model normatif où la violence pourrait être tolérée avec un usage contrôlé, légitimé, sublimé et ritualisé. De ce fait, nous devons poser la question sur l'efficacité de nos mécanismes de contrôle dans une société en pleine mutation.
Une autre question serait légitime portant sur la définition de la violence surtout que cette dernière constitue un sujet de controverse théorique au sein des sciences sociales et soumise à une relativité historique et culturelle. Ce qui est violence sous certains cieux est normal sous d'autres et vice-versa. Certains comportements comme le harcèlement sexuel qui, pendant longtemps dans des sociétés, n'ont pas été reconnus juridiquement comme violents pourraient être considérés dans d'autres cadres culturels comme un comportement violent. L'absence d'une définition consensuelle de la violence nous a conduit vers l'adoption d'une définition opérationnelle où la violence est conçue comme toute action ou réaction basée sur l'usage de la force physique ou symbolique qui est destiné à toucher l'autre dans sa liberté, son autonomie, son indépendance, son intégrité morale ou physique, sa dignité, sa vie, ses biens ou ses valeurs symboliques, ses modes de pensée, ses référents ou son atavisme....
La violence devient plus visible dans la société marocaine et est exprimée de plus en plus en public. Comment expliquer ce phénomène ?
Un constat empirique permet d'observer que les gens expriment leur violence en fonction de la situation et parfois transgressent les frontières entre le privé et le public. La violence dépasse parfois cette typologie temporospatiale. Dans toute famille, il existe une violence contrôlée qui dépasse de temps en temps les limites tolérables notamment dans les conflits entre les sexes. Cette violence est marquée par son invisibilité. La violence envers la femme est omniprésente aussi bien en privé qu'en public; si la nouvelle « moudawana » cherche à renforcer la position de la femme dans le couple (espace privé) et dans la société (espace public), cette nouvelle position, ne peut que générer une réaction, « légitime » à son sens de l'homme, dans la tentative de reconquête de ses prérogatives de mâle et cela peut s'accompagner d'une « certaine violence ».
Encore une fois, nous sommes dans des schémas de conquête ou de reconquête de territoires presqu'au niveau du « cerveau reptilien », dans la plus pure tradition « darwiniste » du « struggle for life » !
Dernièrement, la violence ne cesse de gagner du terrain dans la société marocaine : au niveau des relations conjugales (phénomène des femmes battues), dans la rue, à l'école, au travail… Pourquoi cette explosion de violence à ce moment précis ?
La violence a toujours existé au Maroc, mais maintenant la société marocaine trouve des difficultés à élaborer des mécanismes adéquats de contrôle d'une part et le phénomène est très médiatisé d'autre part. Surtout avec le développement des technologies de l'information et de la communication. En revanche, avec la rareté de données et d'informations crédibles, scientifiquement validés, il est difficile de dire que le phénomène a explosé.
Aussi, faut-t- il noter que la violence a une fonction dans la société. Si vous consultez les textes sacrés, vous pouvez constater le rôle joué par ce phénomène dans le développement de la civilisation. L'acte fondateur du monde est basé sur la violence. Dans le Coran : Sourate Al- Maida (la table servie), du verset 26 à 36, présente l'histoire des deux fils d'Adam et le rôle joué par la violence dans l'émergence du sentiment de culpabilité chez l'être humain, qui constitue une étape importante dans le processus de construction de la personnalité, d'une part et l'instauration de la loi d'interdiction du meurtre, d'un autre côté.
Quelles sont les conséquences de la violence sur la cohésion sociale ? Y a-t-il moyen de pallier ce malaise social ?
La violence observée dans nos rues, nos établissements, nos stades de football et dans notre espace public en général pourrait être analysée comme une régression vers des modes d'expression archaïques et infantiles qui fragilisent la cohésion sociale. Ce phénomène pourrait être compris comme un signe et une conséquence de la crise de la société : crise culturelle, crise économique, crise de valeurs, de l'identité et crise du modèle politique. D'où la nécessité et l'urgence de l'élaboration d'une stratégie publique concertée pour la gestion de ce phénomène basée sur une approche préventive et permettant de renforcer et redynamiser nos mécanismes de contrôle et de sublimation (activités sportives, artistiques…).
Paru dans L'Observateur du Maroc n°213


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.