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ALGERIE : Armée et «services» face à face
Publié dans L'observateur du Maroc le 20 - 02 - 2014

Que se passe-t-il en Algérie ? Une énième lutte au sommet du pouvoir, serait-on tenté de penser au vu des attaques virulentes lancées par voie de presse, contre le général «Toufiq» Mediene, l'inamovible et tout puissant (jusqu'ici) patron du DRS, les services secrets algériens.
Les conflits au sommet y sont en effet monnaie courante surtout à la veille d'une échéance importante, cette fois l'élection présidentielle prévue le 17 avril et rendue très incertaine par la détérioration de la santé du président Bouteflika.
Ainsi en septembre 1998, en pleine guerre civile, une crise violente s'était soldée par la démission du président Liamine Zeroual.
Faute de compromis, l'affrontement au sommet s'était traduit par de grands massacres dans les lieux les plus sécurisés des environs d'Alger et à Relizane.
Ces tueries effroyables – attribuées officiellement aux GIA (Groupes islamistes armés), mais relevant d'obscures manipulations du DRS – avaient contraint Liamine Zeroual à jeter l'éponge.
Auparavant, l'instrumentalisation du mécontentement populaire par un clan pour se débarrasser de ses adversaires avait abouti aux fameuses émeutes d'octobre 1988.
Seize ans et plusieurs crises internes après, la situation semble donc banale.
Elle ne l'est pas.
En quoi la crise actuelle est-elle différente ?
L'attaque frontale lancée le 3 février par le chef du FLN Amar Saïdani contre le général Toufiq est sans précédent dans un sérail où les faits et méfaits du DRS constituent, depuis l'indépendance, la «ligne rouge» à ne pas franchir publiquement.
Rarissimes sont les opposants qui s'y sont aventurés : Hocine Aït-Ahmed, l'un des chefs historiques de la révolution, qui n'a jamais cessé de dénoncer le poids étouffant du DRS, ex- Sécurité militaire, dans la vie politique et la société algériennes et les manipulations des groupes armés pendant la guerre civile; Abdelhamid Mehri , l'expatron du FLN et certains ex-officiers dissidents ensuite... Mais au sein du sérail, c'est l'omerta, surtout s'agissant des coups tordus des «services».
Or Saïdani accuse publiquement Toufiq de tout ce que les Algériens chuchotent : errements du «tout sécuritaire» pendant la «sale guerre» des années 90 ; assassinats non élucidés du président Boudiaf, de Abdelakh Benhamouda, le secrétaire général de la centrale syndicale UGTA ou des moines de Tibehirine, sans oublier la déstabilisation des (rares) partis politiques qui gênent.
Rien ne manque dans ce déballage des pratiques troubles du régime.
Pas même les manipulations plus récentes par le DRS des groupes islamistes dans la bande sahélienne et les failles de la sécurité dans l'attaque de la base gazière de Tiguentourine début 2013...
Pourquoi le tabou « Toufiq » est-il tombé ?
Sur le fond parce que le statu quo jusqu'ici immuable des différents cercles du pouvoir touche à sa fin et que leur conflit n'est pas loin d'un point de non retour.
Tout se passe comme si le système totalement sclérosé, à court d'alternatives et d'idées, avait atteint les limites de sa capacité à concevoir des solutions «consensuelles» et qu'un clan avait estimé l'heure venue de jouer son va tout en lançant l'offensive contre le DRS et son chef.
Le problème, c'est que personne ne croit qu'un vieux routier du système comme le patron du FLN, fidèle parmi les fidèles du président Bouteflika, se soit soudain converti aux vertus de la transparence démocratique ou ait lancé une charge aussi périlleuse sans être «couvert» et sans solides garanties.
Sa sortie est du coup analysée comme une offensive du «clan présidentiel» contre Toufiq (74 ans) pour le mettre en retraite et forcer la voie à une nouvelle présidence Bouteflika.
Une série d'annonces – ni confirmées ni démenties à ce jour – semble conforter cette thèse.
Le quotidien arabophone El-Khabar a même annoncé la destitution de Toufiq Médienne.
Plus plausible : un adjoint de Toufiq, le général Hacène, chef des troupes spéciales du DRS, aurait été radié des rangs de l'armée puis arrêté manu militari pour «activités séditieuses».
Au total, une centaine – 83 dit-on – d'officiers supérieurs proches du DRS auraient aussi été destitués.
Pire : le chef d'état-major et vice ministre de la défense Gaïd Salah aurait insisté sur le fait que ces derniers n'avaient «plus rien à voir avec l'institution militaire».
Début septembre déjà, le «clan présidentiel» avait fait le ménage au sein du DRS en évinçant trois de ses officiers et en plaçant la DCSA (la Direction centrale de sécurité de l'armée) et deux autres départements stratégiques du DRS sous l'autorité directe de l'état major...
L'affrontement oppose-t-il vraiment la présidence et le DRS ?
L'opposition farouche de Toufiq à un quatrième mandat de Bouteflika est moins claire que l'assure la vox populi.
Le soutien de cette candidature par les principaux relais civils de la police politique, à commencer par le RND et l'UGTA, en atteste.
Certes, les tensions entre les deux hommes se sont multipliées – le DRS est accusé d'être derrière les révélations des scandales de corruption touchant les proches du président, notamment son frère Saïd.
Mais en dépit de toutes les frictions, Bouteflika s'est bien acquitté de la tâche qui lui a été dévolue quand armée et «services» l'ont sorti de sa retraite en 1999: sauver le système en lui donnant une façade civile acceptable mais de toute confiance... Mais tout indique aujourd'hui que le chef de l'Etat ne pourrait affronter, surtout dans son état d'épuisement, la toute puissance d'un DRS que la guerre civile des années 90 a renforcé jusqu'à lui conférer une prééminence sur l'état major de l'armée.
«Acteur secondaire», tranche même le politologue Mohamed Hachemaoui.
Une manière de dire que derrière le «clan présidentiel», il y a l'état-major et son chef.
Quel est l'enjeu de ce conflit ?
Le bras de fer actuel semble donc bien opposer les «services» et l'armée qui ne parviennent pas à trouver un consensus sur le partage du pouvoir en vue de l'après Bouteflika.
Autant dire que l'enjeu ne paraît pas être d'instaurer un Etat civil à la place d'un Etat-DRS ! Signe des temps : l'état-major a créée fin 2013 une «Commission spéciale de sécurité» visant à gérer la carrière des officiers de l'armée et du DRS, et qui comprend notamment les commandements des six régions militaires, ainsi que l'adjoint du chef d'état-major, Saïd Bey, un général qui monte.
La solitude du général Médiène face aux attaques de Saïdani témoigne de son affaiblissement: seul le silence assourdissant d'un état-major pourtant prompt à dénoncer toute critique à l'armée – dont dépend formellement le DRS – y a répondu en dépit des appels lancés par les relais médiatiques de la police politique.
Face à ce silence, le DRS a dû faire savoir qu'il poursuivrait Saïdani en justice, une première pour des «services» qui n'ont pas l'habitude d'en appeler à la magistrature, ni à quiconque, pour se défendre...Il aura fallu attendre huit jours pour que Bouteflika sorte ce mardi de sa réserve à l'occasion du crash meurtrier d'un avion militaire.
Volonté de calmer un jeu où trop de provocations contre le DRS deviendraient périlleuses pour ses proches, particulièrement pour son frère Saïd ? «Nul n'est en droit, quelles que soient ses responsabilités, déclarait-il en tout cas, de s'en prendre à l'Armée nationale ni aux autres institutions constitutionnelles» du pays.
Pourquoi le DRS est-il sur la sellette ?
Face à la toute puissance des services secrets, véritable Etat dans l'Etat, et de leur chef, l'armée entend visiblement récupérer toutes ses prérogatives.
«Retranché derrière ses pouvoirs exorbitants, Toufiq a sans doute fait une erreur que Bouteflika a su exploiter à son profit : négliger les commandants de régions et l'état-major », analyse un ancien officier.
Pour le politologue Mohamed Hachemaoui, «l'onde de choc» créée par l'attaque de Tiguentourine a «cristallisé des mécontentements enfouis» et placé Toufiq sur la défensive.
La gestion sanglante de cette prise d'otages par le DRS a effectivement été catastrophique.
Dans un récit publié début 2013 par le site Algeria-Watch, Habib Souaïdia, un ex-officier des Forces Spéciales, raconte que les militaires ont été écartés brutalement des opérations et que c'est le général Tartag (DRS) qui a décidé, contre l'avis des généraux de l'armée, de tirer des missiles contre les assaillants à partir des hélicoptères des «services », faisant un carnage parmi les otages.
Des services de sécurité occidentaux confirment l'exaspération des militaires algériens face à ces évènements et face à la faillite du renseignement d'un DRS qui ne se prive pourtant pas d'infiltrer les groupes terroristes.
Le fait que l'Algérie ait été montrée du doigt sur la scène internationale pour ses liens plus qu'ambigus avec les groupes djihadistes au nord- Mali n'a pas arrangé les choses.
Que peut-il se passer ?
Comme dans toute guerre de tranchée, il serait hasardeux de parier sur la fin de «l'ère Mediene» ou sur un déclin significatif des «services» algériens.
Certes, l'isolement (très relatif) de Toufiq est accentué par le fait qu'il est le dernier en poste des «janviéristes», nom des généraux qui ont annulé les législatives remportées par les islamistes du FIS en 1991, faisant plonger l'Algérie dans dix ans de guerre civile.
Mais on ne peut oublier que ses réseaux quadrillent tout le pays, que ses «dossiers » font trembler ses adversaires du sérail et qu'il est soutenu par l'exhomme fort du pays, le général Nezzar.
Les attaques de Saïdani, alors que certains le disaient «hors jeu» depuis septembre dernier, paraissent indiquer que l'état-major n'a toujours pas les mains assez libres pour imposer au DRS de se cantonner à sa vocation de défense de la sécurité nationale.
Tous les scénarios sont donc possibles.
Les tensions, attisées par l'approche de la présidentielle, peuvent s'exacerber.
Faute de règlement, elles risquent de déboucher sur des violences.
Surtout dans un pays où la propension des principaux cercles de pouvoir à impliquer la population pour régler leurs conflits sur le dos des civils est aussi grande que leur capacité à les faire déborder sur les pays voisins.
Mais tous les retournements sont imaginables.
On ne peut par exemple exclure que les protagonistes de la crise finissent par trouver un modus vivendi salvateur pour eux et s'entendent sur un nouveau partage du pouvoir et de la rente.
Au moins pour un temps.
C'est à dire tant que le prix des hydrocarbures ne s'effondrera pas.
Mais la reconduction d'un énième statu quo pour le pouvoir serait mortifère pour un pays et une société en ébullition ❚


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