C'est par une parade haute en couleur que Casablanca a célébré ce mardi le lancement officiel du Festival CasaNola. Entre fanfares déchaînées, costumes flamboyants et danses inspirées du carnaval de La Nouvelle-Orléans, la ville blanche a plongé dans une ambiance jubilatoire, annonçant une édition placée sous le signe de la fusion et du partage. Depuis l'Automobile Club du Maroc, où se tient le festival jusqu'au 14 juin, les rythmes du jazz résonnent déjà entre cuivres créoles et sonorités marocaines. Pour Marissa Scott-Torres, Consule générale des Etats-Unis à Casablanca, ce festival est bien plus qu'un rendez-vous musical : « Le jazz est l'une des musiques originelles des Etats-Unis... Il nous donne l'opportunité de voir concrètement comment les combinaisons, les collaborations et la construction d'une alliance peuvent fonctionner. La musique est un espace formidable pour cela. » Après s'être elle-même laissée emporter par le rythme saisissant des artistes de la parade, la Consule générale a souligné l'importance de la diplomatie culturelle, qu'elle décrit comme « une autre dimension... un autre espace pour réellement collaborer et créer. » Karim Taissir, président de l'association AVEMPACE et initiateur du festival, partage la même vision : « Avec CasaNola, nous voulons bâtir des ponts vivants entre les artistes, les cultures et les publics. » Celui que les mélomanes marocains ont découvert en 1999 comme cofondateur de l'orchestre philharmonique Symphonyat croit plus que jamais au pouvoir fédérateur de la musique. Loin d'être découragé par les difficultés liées au lancement de cette première édition, organisée avec « très peu de moyens », il se projette déjà vers l'avenir et pense à la prochaine. La joie qu'il a lue dans les yeux des participants et du public lui donne des ailes. À ses côtés, Greg Lambousy, directeur du New Orleans Jazz Museum, se dit subjugué par l'énergie des organisateurs : « On travaille avec Karim depuis longtemps. Ce festival est une extension naturelle de notre programme Jazz International. Il rassemble une trentaine d'artistes, chefs, mixologues et partenaires venus directement de La Nouvelle-Orléans. » Une célébration où musique, gastronomie et échanges humains se fondent dans un même souffle. Deux ports, une même âme musicale Ville portuaire et cosmopolite, Casablanca partage avec La Nouvelle-Orléans une histoire faite de brassages, d'échanges et de métissages. CasaNola incarne cette gémellité culturelle à travers une programmation riche : trois soirées de concerts immersifs avec des figures majeures du jazz néo-orléanais – tels que James Andrews, Dr Michael White ou encore Mahmoud Chouki – mais aussi des artistes marocains de renom comme Adil Chrafi et Alaa Zouiten. Le tout dans un esprit de collaboration scénique, avec de nombreux croisements artistiques. Le jeudi 12 juin, James Andrews ouvrira les festivités avec The Crescent City All Stars dans un concert bouillonnant de soul, de funk et de jazz traditionnel, où la flûte d'Adil Chrafi apportera une touche marocaine singulière. Le 13 juin, place au clarinettiste Michael White et à ses complices pour un voyage à travers les racines du jazz créole, enrichi par la présence du joueur de oud Alaa Zouiten. Le samedi 14 juin, la guitare poétique de Mahmoud Chouki prendra le relais dans une performance collective réunissant musiciens marocains et américains. En clôture, tous les artistes monteront ensemble sur scène pour un final festif, comme un manifeste vibrant de l'unité musicale. La diplomatie culturelle en action CasaNola ne se résume pas à une succession de concerts. Le festival veut aussi transmettre, former et rapprocher. Des master classes sont prévues chaque jour, à Dar America, à l'American Arts Center et à Sidi Moumen, avec des musiciens, pédagogues et figures culturelles de La Nouvelle-Orléans. Le batteur Alfred Jordan, le bassiste Martin Masakowski, le clarinettiste Michael White ou encore l'Indien du Mardi Gras Eric Burt animeront ces rencontres ouvertes à tous les publics. En parallèle, des ateliers culinaires orchestrés par la cheffe Jay Kazzi du Commander's Palace et des dégustations menées par un sommelier de La Nouvelle-Orléans permettront de découvrir les autres facettes de cette culture festive. « On a voulu emmener tout l'univers de La Nouvelle-Orléans ici à Casablanca, » explique Greg Lambousy. « C'est une immersion totale dans notre patrimoine, au-delà de la musique : la nourriture, les traditions, les gens. » CasaNola offre ainsi un espace de création et de communion, où les artistes et le public sont invités à repenser les frontières à travers les sons, les goûts et les rencontres. La musique y devient langage commun, et le jazz, comme le rappelle la Consule américaine, « est avant tout une affaire d'humanité. »