Au lendemain de l'effondrement de deux immeubles d'habitation dans le quartier Al Massira, à Bensouda, ayant fait 22 morts et 16 blessés, le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) a publié une réaction ferme. Le conseil pointe « un manquement grave au droit au logement décent » et appelle à des mesures structurelles immédiates. Dans un communiqué rendu public mercredi soir, le CNDH dit suivre ce drame « avec une profonde inquiétude », rappelant que ce type d'accident « n'est pas une fatalité, mais le résultat de défaillances cumulées ». Le Conseil a exprimé par ailleurs ses condoléances aux familles endeuillées et souhaite un prompt rétablissement aux blessés, tout en soulignant l'ampleur des « pertes humaines et des souffrances sociales» causées par cet effondrement. « Dès les premières heures, une équipe de la Commission régionale des droits de l'Homme a été dépêchée sur place pour suivre les circonstances du drame, recueillir les premiers éléments et évaluer son impact sur les habitants », ajoute la même source. Droit au logement Pour le CNDH, ce drame remet brutalement au centre du débat public un droit fondamental : le logement décent. Un droit inscrit dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, mais aussi dans les articles 31 et 34 de la Constitution marocaine, insiste le CNDH dans son communiqué. Le Conseil rappelle que « le logement décent n'est pas seulement un toit », mais un espace qui garantit sécurité structurelle, protection contre les risques, qualité des bâtiments, accès aux services essentiels et respect de la dignité humaine. Une définition tirée de l'Observation générale n°4 du Comité onusien des droits économiques et sociaux, que le CNDH remet en avant. Il rappelle également les nombreuses recommandations de l'Examen périodique universel, qui appellent le Maroc à accélérer la lutte contre l'habitat insalubre et à renforcer la protection des populations vulnérables. Une stratégie nationale, absolument ! Pour éviter de nouveaux drames, le Conseil formule une série de recommandations à commencer par garantir l'accès au logement décent. Le CNDH insiste sur « la nécessité urgente » de renforcer l'accès des citoyens à un logement sûr et conforme aux engagements constitutionnels, en cohérence avec le Nouveau Modèle de Développement. Le CNDH appelle également à mettre fin aux effondrements à répétition et prévient que la succession de drames similaires constitue « une atteinte directe aux normes internationales du droit au logement ». Il recommande d'élaborer une stratégie nationale globale, fondée sur l'anticipation et le contrôle régulier et strict ainsi que le renforcement des mécanismes de veille et de prévision. Sur un autre plan, le CNDH appelle à une meilleure coordination institutionnelle. Pour le Conseil, la prévention des drames exige une coopération étroite entre les ministères concernés, les autorités territoriales et les conseils élus. « Une coordination qui doit placer la sécurité des citoyens au centre des politiques publiques », insiste le CNDH. Ce dernier recommande également d'accélérer la réhabilitation des quartiers dégradés et des immeubles vétustes, notamment dans les médinas et zones historiques. Ceci tout en exigeant le strict respect des normes de sécurité lors des opérations de restauration ou de relogement. Responsabilité/reddition Le CNDH réclame également la publication des résultats de l'enquête judiciaire déclenchée suite à cet effondrement et la clarification des responsabilités, conformément au principe constitutionnel responsabilité/reddition des comptes. Objectif ? Mettre fin à la culture de l'impunité dans les dossiers liés à l'urbanisme et à la sécurité des constructions. Le Conseil insiste par ailleurs sur « la nécessité de l'application stricte » des lois de l'urbanisme, notamment l'obtention obligatoire des autorisations de construire et le contrôle technique rigoureux des chantiers et des plans architecturaux. Le CNDH appelle aussi à la création d'un mécanisme national permanent d'intervention en cas de fissures, risques structurels ou vices de construction. « Un outil qui permettrait d'agir avant qu'un drame ne survienne », ajoute la même source. Responsabiliser les habitants S'adressant aux citoyens, le Conseil les incite à collaborer avec les autorités lorsqu'un bâtiment présente un danger, à signaler toute fissure inquiétante et à adhérer aux programmes de relogement. Une manière de rappeler que la sécurité urbaine est une responsabilité partagée. Enfin, le CNDH réitère son appel à une politique nationale durable pour reloger les familles vivant dans des bâtiments menaçant ruine, en proposant des alternatives décentes et intégrées, fondées sur la dignité, l'équité et la justice territoriale "et qui ne se limite pas à des solutions provisoires ou temporaires", conclut le communiqué.