La constitution votée n'aura de sens que si elle débouche immédiatement sur une véritable pratique politique. Dans la foulée de la campagne référendaire, il était attendu que les partis politiques s'engagent sur la voie de la réforme. Cela implique une clarification des options, en fonction des choix de société, des alliances cohérentes et des débats clairs, susceptibles d'intéresser le public pour l'amener à voter lors des législatives. Car le plus grand échec serait que les mêmes causes produisent les mêmes effets et que la participation aux élections générales retombe au niveau de 2007. Le constat est établi. L'alternance consensuelle avec tous ses bienfaits au niveau de l'apaisement, de la stabilité, a été un poison mortel pour la vie partisane. Et pour cause, les alliances qui lui ont succédé sont sans frontières, réunissent la gauche, les conservateurs, la droite libérale et tout le reste. Le citoyen a fini par faire sien l'adage "ils sont tous les mêmes", donc il n'y a pas matière à choisir. Pour sortir de ce dilemme, il faut réhabiliter la politique, la vraie, celle qui met aux prises différents projets de société issus de conceptions différentes du monde, portés par des partis ou des coalitions de partis et représentés par des femmes et des hommes convaincus. Malheureusement, les hommes politiques font exactement l'inverse. Ils sont dans la politique politicienne sans principes. Ainsi, comment peut-on interpréter le flirt actuel entre Nabil Benabdellah du PPS et Abdelilah Benkirane du PJD ? L'ex-communiste faisait de l'alliance avec le PJD une ligne rouge, il n'y a pas plus de deux ans. L'islamiste accusait N. Benabdellah et son parti de combattre l'identité islamique, il y a à peine quelques semaines. Mais parce qu'ils ont en commun un passif avec le PAM, ils sont devenus les meilleurs amis du monde. Comment l'électeur pourrait-il s'y retrouver? Cette redéfinition des clivages, sur le socle commun posé par la constitution, est une nécessité historique. C'est ce qui nous permettra de sortir des alliances flasques initiées par le gouvernement Youssoufi et maintenues par la balkanisation. C'est en s'assumant en tant que libéraux, conservateurs, ou hommes de gauche que les politiques créeront les conditions de la mobilisation des électeurs, sur des bases politiques et non personnelles. L'on annonce une alliance entre le PAM, le RNI et l'UC. C'est homogène et cela constitue à un bloc de droite libérale. On peut imaginer que la gauche en fasse de même et que les choses se clarifient. Alors pourra se mettre en place la véritable alternance démocratique. Nos politiques inquiètent, parce qu'ils n'ont pas compris cette exigence basique de la transformation démocratique.