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Interview avec Nasser Michaëlene-Gabryel : «La guerre au Soudan peut déstabiliser la paix dans la Corne de l'Afrique»
Publié dans L'opinion le 20 - 01 - 2024

Une guerre éclipsée par l'Ukraine et Gaza, celle qui se joue au plus arabe des pays africains et le plus africain des pays arabes : le Soudan. Quelles conséquences sur la région ? Réponses avec l'historien et politiste, Professeur des relations internationales à l'Université Hassan II de Casablanca, Nasser Michaëlene-Gabryel.
* Le Soudan traverse aujourd'hui une guerre inédite. Pouvez-vous faire le point sur cette situation préoccupante ?
La situation actuelle trouve son origine dans le renversement du président Omar al-Bashir en 2019, qui a conduit à des luttes pour le pouvoir entre l'armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), dirigées par le général Mohamed Hamdane Daglo.
Selon la théorie du conflit, ce type de conflit ne se terminera que lorsque l'un des deux camps aura épuisé ses ressources, ou lorsque l'un des deux camps aura remporté la victoire. Dans le cas du Soudan, il est possible que l'épuisement des ressources se produise d'abord. En effet, le conflit est déjà très coûteux, tant sur le plan humain que financier.
Les deux camps ont besoin d'importantes ressources pour poursuivre le combat, et il est possible que l'un des deux camps soit contraint de renoncer en raison d'un manque de ressources. Il est également possible que la victoire d'un des deux protagonistes se produise d'abord.
En effet, le conflit est très violent, et il est possible que l'un des deux camps parvienne à vaincre l'autre. Dans ce cas, le conflit se terminerait par la victoire du camp victorieux mais cela ne changera rien à la crise de légitimité du possible futur régime et ne conduira qu'à de nouvelles confrontations.

* Comment envisagez-vous la suite des événements ?
Le Soudan est un point nodal dont les ramifications pourraient étendre les conflits au-delà de ses frontières. La manipulation des clivages ethniques, le poids de la brutalisation et la compétition pour les ressources créent un cocktail potentiellement explosif, susceptible de déstabiliser davantage une région déjà fragile et confrontée à de multiples défis sécuritaires.
La nécessité d'une approche régionale coordonnée pour résoudre ces crises devient impérative pour éviter des conséquences humanitaires dévastatrices. Dans le contexte complexe du Soudan, le conflit s'est fortement enraciné dans la lutte pour le pouvoir politique et le contrôle des ressources, générant des dynamiques dévastatrices.
La manipulation délibérée des clivages ethniques a été un outil stratégique pour attiser et maintenir le conflit, avec des conséquences profondes exacerbées par la brutalisation constante. La guerre pour le pouvoir politique a été le moteur principal du conflit. Les partis politiques, souvent alignés sur des bases ethniques, ont rivalisé pour dominer la scène politique, utilisant les différences culturelles et ethniques comme des leviers de division !
La compétition acharnée pour le contrôle des ressources, en particulier le pétrole, a alimenté les hostilités. Les groupes rivaux ont cherché à exploiter les richesses du pays, intensifiant ainsi les conflits économiques et territoriaux. La manipulation délibérée des clivages ethniques a été une stratégie dévastatrice. Les politiciens ont exploité les différences entre les Arabes du Nord et les Noirs du Sud pour consolider leur pouvoir, créant ainsi une spirale de méfiance et de confrontation.
La brutalisation, où la violence devient systématique, a laissé des cicatrices profondes sur la société soudanaise. Les multiples guerres civiles, les violations des droits de l'Homme et les conséquences sociales de cette violence ont engendré des cycles continus de souffrance et de vengeance. Les tensions entre la Somalie et l'Ethiopie dans la Corne de l'Afrique pourraient être amplifiées par l'instabilité soudanaise. Les alliances politiques et ethniques pourraient être redéfinies, compliquant davantage la stabilité régionale.

* A quel point cette guerre menace-t-elle la paix dans le reste de la Corne de l'Afrique ?
La suite des événements au Soudan est incertaine. Le conflit est actuellement dans une impasse, et il est difficile de dire si un accord de paix sera possible. Si le conflit se prolonge, il pourrait avoir des conséquences désastreuses pour le Soudan et la région de la Corne de l'Afrique. Il pourrait entraîner une déstabilisation de la région, une crise humanitaire majeure et une recrudescence des mouvements djihadistes.
La culture politique de la brutalisation au Soudan s'inscrit dans une dynamique où des politiques de division ont été mises en œuvre pour maintenir le pouvoir. Ces politiques ont souvent exploité des clivages tels que l'islamisation et les différences ethniques pour créer des divisions au sein de la société soudanaise.
L'islamisation forcée et l'accentuation des clivages ethniques ont été des processus liés à des décisions politiques visant à diviser pour mieux régner. La politique d'islamisation, initiée notamment par le régime d'Omar al-Bashir, a cherché à imposer une identité islamique au Soudan, marginalisant ainsi les groupes ethniques et religieux non arabes et non musulmans.
Cette approche a contribué à la création de tensions et de divisions profondes au sein de la société soudanaise. De même, l'exploitation des clivages ethniques a été une stratégie délibérée pour affaiblir les oppositions potentielles. Les politiques de discrimination et de marginalisation ont laissé des cicatrices profondes, favorisant un climat de mécontentement et de rébellion.
Ces tactiques de division ont également servi à créer des rivalités entre les différentes communautés, renforçant ainsi le contrôle politique du régime au pouvoir. Il est crucial de souligner que la vision des enjeux au Soudan ne doit pas être ethniciste. Les conflits basés sur l'ethnicité sont souvent le résultat de manipulations politiques plutôt que de différences intrinsèques entre les groupes. Il est essentiel d'adopter une perspective critique pour comprendre les racines des conflits, en mettant l'accent sur les décisions politiques qui ont alimenté les divisions plutôt que de perpétuer des stéréotypes ethniques. Le conflit au Soudan est également le reflet de divisions profondes au sein de la société soudanaise. Ces divisions sont d'ordre ethnique, religieux et géographique. Sur le plan ethnique, le Soudan est un pays multiethnique, avec plus de 60 groupes ethniques différents. Ces groupes ethniques sont souvent divisés par des rivalités historiques et culturelles. Sur le plan religieux, le Soudan est un pays majoritairement musulman, mais il existe également une importante minorité chrétienne. Ces deux communautés sont souvent en conflit, notamment sur des questions de pouvoir et de ressources. Sur le plan géographique, le Soudan est un pays vaste et diversifié. Les régions du Nord et du Sud du pays sont souvent en conflit, notamment sur des questions de développement et de ressources.
Le conflit au Soudan a également des répercussions profondes sur la société soudanaise. Il a entraîné une augmentation de la pauvreté, de la violence et de l'insécurité. Le conflit a également entraîné une fracture entre les générations. Les jeunes, qui sont majoritaires dans la population soudanaise, sont souvent plus favorables à la démocratie et aux droits de l'Homme. Ils sont également plus susceptibles de se mobiliser contre le gouvernement. La guerre au Soudan a le potentiel de déstabiliser la paix dans la Corne de l'Afrique. Les conflits régionaux peuvent provoquer des migrations massives, accroître les tensions entre les pays voisins et favoriser la montée d'une instabilité multidimensionnelle.

* Pourquoi, selon vous, ce conflit passe au second plan en comparaison avec la guerre à Gaza ou en Ukraine ?
Les raisons pour lesquelles certains conflits attirent plus l'attention médiatique que d'autres sont complexes et peuvent dépendre de divers facteurs tels que la proximité géographique ou culturelle, les intérêts politiques, ou les dynamiques géopolitiques. Les conflits au Soudan peuvent être relégués au second plan en raison de l'attention médiatique limitée, de la complexité des enjeux, ou d'autres crises mondiales plus médiatisées.
Dans une perspective plus large, la phénoménologie de Heidegger sur la relation au monde naturel peut également être pertinente. Cette approche philosophique examine comment notre compréhension et notre expérience du monde sont façonnées par notre relation à la nature.
Dans le contexte des conflits, cela soulève des questions sur la façon dont les crises environnementales liées au conflit au Soudan peuvent être perçues et traitées dans les médias, soulignant l'importance d'une prise de conscience holistique des dimensions humaines et environnementales des conflits.
Lorsque nous examinons la question de la visibilité médiatique des conflits, il est essentiel d'intégrer le concept de «filtrage culturel» de Lazarsfeld. Ce filtre suggère que les acteurs médiatiques comprennent et interprètent les événements en fonction de leur perception culturelle et de leurs préjugés.
Dans le contexte du conflit au Soudan, ces filtres culturels peuvent jouer un rôle significatif dans la façon dont les médias internationaux couvrent et rapportent les événements. Complexité des enjeux et attention médiatique limitée : le conflit au Soudan est caractérisé par une complexité politique, ethnique et économique, ce qui peut rendre difficile sa compréhension et sa couverture médiatique. Les médias ont souvent une durée d'attention limitée, et des crises plus accessibles ou plus médiatisées peuvent prendre le devant de la scène, reléguant des conflits complexes comme celui au Soudan au second plan. Comparaison avec d'autres crises mondiales : en comparaison avec des conflits tels que la guerre à Gaza ou en Ukraine, les intérêts politiques et les dynamiques géopolitiques peuvent également influencer l'attention médiatique.
Les médias peuvent être attirés par des zones géographiques plus proches ou des conflits qui impliquent des acteurs géopolitiques clés. Cette réalité peut contribuer à reléguer des conflits comme celui au Soudan à l'arrière-plan, malgré leur impact humanitaire significatif.


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