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Révolution du Jasmin et théorie de l'effet domino
Les dirigeants algériens aux aguets
Publié dans L'opinion le 24 - 01 - 2011

«En 1987 Ben Ali a fait un coup d'Etat contre Habib Bourguiba. En 2011, c'est (l'Avenue) Habib Bourguiba qui lui rend la monnaie», en allusion à la manifestation du 14 janvier denier, avenue Habib Bourguiba à Tunis, qui a précipité le départ de l'ex-président tunisien Ben Ali. C'est l'une des blagues qui ont fait le tour du monde via Internet, suite à ce qu'il est convenu d'appeler maintenant la révolution de Jasmin.
Bien des choses ont été dites et écrites à propos de cette révolution de Jasmin, qui a autant surpris que suscité des commentaires des plus pertinents aux plus insensés. Ainsi, nombre de journalistes occidentaux se sont mis à multiplier les élucubrations sur un certain effet domino, qui balayerait la plupart des régimes arabes actuels pour laisser place à des régimes plus «démocratiques». Une théorie élaborée du temps de la guerre froide à propos de la déferlante communiste, mais qui avait déjà prouvé son inconsistance.
Sauf que le seul effet domino constaté dans les pays arabes est celui des suicides par immolation par le feu. Mohamed Bouazizi, 26 ans, qui s'était immolé le 17 décembre devant la préfecture de Sidi Bouzid, à 260 km au sud de Tunis, pour protester contre la saisie de sa charrette de fruits et légumes, semble avoir fait beaucoup d'émules aussi bien dans son pays que dans d'autres pays arabes. Algérie, Egypte, Mauritanie et Maroc tout récemment, les tentatives de suicide par le feu se sont multipliées, s'immoler par le feu étant presque devenue un mode acceptable de protestation, alors que le suicide est catégoriquement prohibé par l'Islam.
Et, bizarrement, pas un seul mouvement islamiste arabe n'a fait entendre sa voix pour dénoncer cette dérive honteuse. Ces mouvements d'habitude si prompts à réagir contre de simples écrits d'intellectuels arabes se sont fait étrangement discrets face à cette nouvelle «technique» de protestation.
Si la perspective d'un effet domino était fondée, le premier pays de la région à suivre la Tunisie aurait été l'Algérie, qui a également connu des émeutes sanglantes au début du mois de janvier, pour dénoncer la hausse du prix du sucre et de l'huile et bien plus encore.
Celui qui aurait su le mieux exprimer la situation du peuple algérien voisin est le brillant caricaturiste, Ali Dilem. Dans une de ses œuvres publiée récemment par le quotidien algérois «Liberté», on voit un algérien demander sa part du pétrole… pour s'immoler avec ! En une semaine seulement, huit algériens ont tenté de s'immoler par le feu. La dernière tentative en date est celle d'un père et de ses deux enfants, âgés de pas plus de 8 et 11ans, devant la Wilaya de M'sila, mercredi dernier.
Car voilà un pays dont la population a toutes les raisons de se révolter. En 2010, l'Algérie a encaissé 55,7 milliards de dollars au titre des recettes des exportations des hydrocarbures, gaz et pétrole confondus. 400 milliards de dollars de recettes cumulées, en moins de dix ans. Le pays voisin dispose également d'une réserve de change de quelques 155 milliards de dollars, soit autant que le PIB du Maroc et de la Tunisie réunis. Mais, le taux de chômage officiel y est de 11%, chiffre plus que contesté par plusieurs hommes politiques et journalistes algériens. Le taux de pauvreté est de 20% et le SMIG y est inférieur qu'au Maroc, pourtant pays non producteur d'hydrocarbures. Et il y a eu pas moins de 11 500 émeutes en Algérie l'année écoulée, selon des chiffres des services de sécurité algériens cités par la presse du voisin de l'est.
«Protestations sociales et tentatives d'immolation sont le signe d'un malaise, d'une société fonctionnant à deux vitesses, celle d'un pays riche qui produit du chômage, de la clochardisation et de la précarité», a déclaré Hocine Zahouane, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme au journal français «L'Humanité».
Un précédent dissuasif
Sur Internet prolifèrent blogs et forums où des algériens ne manquent pas de dénoncer continuellement l'autoritarisme des tenants du pouvoir, la corruption qui a gangrené les plus hautes sphères du pouvoir, la misère du petit peuple qui vivote au jour le jour et les «harragas» qui risquent leur vie pour tenter leur chance en Europe.
Il est même possible d'avancer que les Algériens ont bien plus de raisons objectives que les Tunisiens de se révolter.
Mais c'est vite oublier que les voisins algériens peinent encore à tourner la page des sombres et sanglantes années de la guerre contre le terrorisme, puisque les Algériens s'offusquent à l'utilisation du terme guerre civile.
Pour rappel, c'est le soulèvement populaire en octobre 1988 en Algérie qui avait mené au processus de démocratisation interrompu en 1991, après que le parti islamiste FIS ait emporté les élections législatives. Suite à quoi, le pays avait entamé sa longue descente aux enfers. Les Algériens, qui, de toute évidence, ont gardé de biens mauvais souvenirs de cette période, semblent depuis lors se méfier des élans populaires massifs pour la démocratisation qui font trembler l'ensemble de l'édifice étatique.
Chat échaudé craint l'eau froide
D'autre part, il faut toujours garder en mémoire que si la révolution de Jasmin a pu réussir, c'est bien grâce au fait que le chef d'état-major de l'armée de Terre tunisienne, le Général Rachid Ammar, a refusé de tirer sur les manifestants, ce qui lui avait valu d'ailleurs d'être limogé par le président Benali. Or, en Algérie, tout le monde sait bien que c'est l'armée qui tient véritablement les rênes du pouvoir, le président Bouteflika n'étant à son poste que par la volonté des galonnés de l'ANP.
D'autre part, pour des raisons sécuritaires, lutte contre le terrorisme «résiduel» oblige, l'armée algérienne est continuellement déployée dans l'ensemble du pays, dans les villes comme dans les campagnes. Dans un pays continuellement confronté à la menace terroriste intégriste et dont les soldats ont pris l'habitude de tirer sur des «civils», il n'est pas de bon temps de sortir les provoquer dans la rue. D'ailleurs, les récentes émeutes en Algérie ont fait pas moins de cinq morts, plus de 800 blessés et mille arrestations effectuées dans les rangs des manifestants. Celles d'hier ont fait plusieurs blessés.
Selon Saïd Sâdi, leader du parti d'opposition algérien le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD), il y aurait des preuves comme quoi des jeunes casseurs auraient été payés par les autorités pour faire dégénérer les manifestations pacifiques des populations, de manière à dégoûter celle-ci, ce qui est effectivement arrivé. «Grâce à la rente pétrolière, tout s'achète, même les émeutiers».
Le RCD a appelé à une marche de protestation samedi à Alger, qui devrait se diriger vers le siège de l'Assemblée populaire nationale. Mais cette manifestation a été interdite par les autorités et le RCD a quand même maintenu son mot d'ordre. Saïd Sädi a littéralement appelé les militaires algériens à renoncer au pouvoir en Algérie.
«Les émeutes des jeunes en Algérie sont l'expression de l'échec d'un modèle économique de développement» estime le Dr Bahloul Mohamed, économiste et directeur de l'Institut de développement des ressources humaines, cité par le quotidien algérien, El Watan. «Les réformes économiques devaient ressusciter l'espoir et ouvrir de nouvelles perspectives pour les jeunes mais ce qui s'est produit est bien le contraire, à savoir la désintégration et l'exclusion».
«Cette violence pourrait être le fait d'une jeunesse qui frappe à la porte de l'histoire sociale, pour marquer sa présence et arracher une place dans la société. Ces portes étant souvent fermées, ils recourent à la violence pour les forcer», explique de son côté Tayebi Mohamed, enseignant-chercheur à l'Institut de sociologie d'Oran.
La mafia militaro-financière
Voilà donc deux pays voisins, qui ont connu des manifestations à grande échelle motivées par des raisons essentiellement socio-économiques, mais également politiques, qui n'ont pas débouché sur le même résultat. En Tunisie, le régime a flanché, en Algérie, le régime s'est contenté de renoncer à la hausse des prix du sucre et de l'huile pour que la fièvre de la rue retombe.
Mais ce n'est pas réglé pour autant de l'autre côté du Oued Isly. Les terroristes islamistes, qui ont d'ailleurs tenté de profiter des récentes émeutes à Alger pour y commettre des attentats suicides, guettent la moindre défaillance du régime algérien pour relancer une guerre qui n'est pas vraiment terminée, n'en déplaise au président Bouteflika et à sa loi sur la «concorde civile».
D'autre part, les Tunisiens viennent de tourner définitivement une page de leur histoire contemporaine et même s'ils en sont encore à chercher leur voie après leur surprenante révolution, ils vont bien finir par trouver la forme de régime et de gouvernement qui leur sied. Ce qui n'est pas le cas des voisins algériens.
Faute de pouvoir tomber d'un seul coup le régime honni, une bonne partie de la jeunesse algérienne se morfond dans le désespoir et produit régulièrement nombre candidats à l'émigration clandestine et de nouvelles recrues pour le terrorisme intégriste «résiduel». Et le pays glisse doucement vers le chaos.
Déjà, l'économie souterraine algérienne, contrôlée par la «mafia militaro financière», ainsi nommée par les Algériens en raison des liens entre les barons de la contrebande et les hautes sphères du pouvoir, a pris des proportions phénoménales. Dans un pays où tout ou presque est importé, 50% des produits introduits de l'étranger sont écoulés au marché noir, qui fait vivre 20% de la population. Soit un algérien sur cinq. L'Etat y perd plus de trois milliards de dollars par an en taxes non recouvertes, selon l'Union générale des commerçants algériens.
On estime, par ailleurs, les avoirs financiers des hauts gradés de l'armée algérienne placés à l'étranger à 40 milliards de dollars !
C'est dire la confiance qu'ils placent en le pays qu'ils dirigent et leur avenir. De toute évidence, si les choses venaient à mal tourner en Algérie, il y a de fortes chances de voir les généraux algériens «bénaliser», c'est-à-dire s'enfuir, selon le nouveau verbe consacré par la révolution de Jasmin.
La population algérienne ne souhaite pas, semble-t-il, en arriver à la confrontation directe et totale avec les tenants du pouvoir, pour les divers raisons suscitées. Mais les Algériens n'en sont pas moins à bout de nerfs et le font savoir au palais d'El Mouradia.
Imaginatifs et ne manquant pas de sens de la symbolique, les Algériens ont transformé le fameux slogan des supporters des Fennecs et scandent maintenant «One, Two, Three, Viva la Tunisie» !
C'est également l'occasion pour les Marocains de se moquer de ces révolutionnaires du dimanche qui donnent de temps en temps de la voix en Europe pour critiquer la monarchie marocaine en leur montrant à quel point la légitimité de la monarchie constitutionnelle marocaine est garante de la stabilité politique dont le pays a besoin pour se développer.
Au Maroc, point de parti unique. Il y a des partis politiques aux assises populaires bien confortées et traditionnellement attachés à la diversité démocratique, qu'ils sont prêts à défendre bec et ongle. La monarchie marocaine étant au dessus de toutes ces considérations de politique partisane, assurant un rôle fédérateur et stabilisateur, unanimement salué par la classe politique nationale.


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