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Témoignage d'un enfant : « On ne mange pas bien, les draps sont sales, on a rarement droit à de l'eau chaude et on a froid la nuit »
Centres de Sauvegarde des Enfants : Un nouveau milieu carcéral, d'insécurité et de violence
Publié dans L'opinion le 25 - 05 - 2013

Le suivi des enfants placés par le juge est « très aléatoire »
la suite des derniers rapports qu'il a consacrés aux droits de l'Homme au Maroc, et à diverses questions d'importance qui relèvent de ce domaine et, conformément aux missions qui lui sont imparties et au cadre institutionnel dans lequel elles s'exercent, le Conseil National des Droits de l'Homme a publié, dernièrement, un important rapport dédié à la situation et à la protection des droits des enfants placés sur décision judiciaire dans les centres de sauvegarde de l'enfance, question qui a fait l'objet d'une auto saisine et d'une analyse menée par le CNDH.
Le CNDH s'est fixé pour objectif, dan le cadre de cette étude, d'analyser le degré de conformité des modalités
de placement et de prise en charge des enfants dans les centres de sauvegarde de l'enfance, aux normes définies par la Convention relative aux droits de l'Enfant (CDE).
Le rapport du CNDH s'inscrit dans le suivi de la mise en œuvre des recommandations :
- Du Comité des droits de l'enfant, suite à l'examen du deuxième rapport périodique du Maroc présenté en Juin 2003 (paragraphes 37, 63, 65, 67 et 68 respectivement relatifs aux mesures de protection, de remplacement, à la protection des enfants exploités sexuellement, des enfants des rues et des enfants en conflit avec la loi) ;
- De l'étude des Nations Unies sur la violence à l'encontre des enfants (Août 2006) relative à la protection des enfants privés de liberté et placés en institutions ;
- Du rapport national présenté au titre du deuxième cycle de l'examen périodique universel en septembre 2012 (paragraphes 129.65 et 130.2 se rapportant à la protection de l'enfant contre la violence) ;
- Du rapport sur «La crise des prisons : une responsabilité partagée» réalisé par le CNDH en octobre 2012 (recommandations 1.2 /paragraphe mineurs en conflit avec la loi) ;
- De l'étude faite en décembre 2010 par le Conseil consultatif des droits de l'Homme (CCDH) sur «La mise en place d'un mécanisme de recours et de suivi des droits de l'enfant au Maroc».
Il est à noter que le Maroc vient de présenter ses 3ème et 4ème rapports pour la période 2003-2010 sur la mise en œuvre de la Convention Internationale relative aux droits de l'Enfant.
Le rapport s'inscrit dans un contexte national caractérisé par de nombreuses réformes visant à consacrer la promotion et la protection des droits de l'enfant et à harmoniser les législations avec les instruments internationaux ratifiés par le Maroc (notamment la CDE et ses trois protocoles, les conventions 138 et 182 de l'Organisation internationale du travail OIT).
La ratification récente des trois conventions du Conseil de l'Europe (sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels, les relations personnelles concernant les enfants, et l'exercice des droits des enfants) témoigne de l'intérêt manifeste porté à la promotion et à la protection des droits de l'enfant.
Si ces efforts ont permis d'enregistrer des progrès significatifs en matière de protection des enfants et de leurs droits, des dysfonctionnements entravent la protection des enfants, notamment ceux placés en institution. Le recours au placement des enfants en situation difficile et/ou en conflit avec la loi dans des institutions non régies par des standards droits de l'enfant reste privilégié au détriment de mesures alternatives et souvent sans prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Le Comité des droits de l'enfant, dans ses observations finales sur le rapport périodique du Maroc (2006) a exprimé ses préoccupations face au grand nombre d'enfants placés en institutions et les conditions de vie qui y règnent. Il a recommandé de protéger les droits des enfants placés en institution, de veiller à ce qu'ils restent en contact régulier avec leurs familles, de renforcer les programmes de réadaptation et de réinsertion, et de n'utiliser le placement en institution qu'en dernier recours et pour la durée la plus courte possible.
Ce rapport a pour objectifs de :
- Analyser le degré de conformité avec les standards et guidelines internationaux au niveau :
Du cadre législatif et institutionnel régissant le placement des enfants dans les centres de sauvegarde de l'enfance;
Du processus de placement, de prise en charge et de suivi des enfants ;
Des modalités de participation des enfants au processus judiciaire.
- Elaborer des recommandations pour :
Appuyer la désinstitutionalisation à travers la mise en œuvre de mesures de soutien familial et de protection de remplacement (enfants en situation difficile) et des alternatives à la détention (enfants en conflit avec la loi) ;
Améliorer la protection, les conditions de prise en charge, le suivi et la participation au processus judiciaire des enfants dans les institutions, en conformité avec les guidelines et normes internationales.
Une approche participative intégrant les acteurs publics et associatifs, les enfants, les familles et la dimension genre
La méthodologie adoptée par le CNDH dans le cadre de son étude se veut participative, intégrant tous les acteurs publics aux niveaux central et local et associatifs, ainsi que les enfants et les familles et prenant en compte la
dimension genre. Ce rapport a été réalisé selon les étapes suivantes :
1. Une revue documentaire : revue de rapports, études ; collecte de données quantitatives
auprès des services centraux des départements concernés (ministère de la Justice et des
libertés, ministère de la Jeunesse et des Sports) ;
2. La conception des grilles d'analyse et d'entretiens ;
3. La formation des enquêteurs des commissions régionales du CNDH ;
4. La conduite d'entretiens avec les représentants centraux des ministère de la Justice et des
Libertés, et de la Jeunesse et des Sports, de la Sûreté nationale, de l'Institut Royal de formation
des cadres, de la Faculté des sciences de l'éducation, ainsi qu'avec des personnes ressources ;
5. Des enquêtes de terrain qui se sont déroulées du 15 au 29 novembre 2012 et qui ont
consisté en :
La visite de 17 CSE ;
La conduite d'entretiens avec les directeurs et équipes encadrantes des CSE, juges
des mineurs, associations partenaires ;
L'animation de focus group avec les enfants placés dans les CSE, conformément à une Ethique
droits de l'enfant, à savoir : la participation des enfants volontaires ; les enfants sont préalablement
informés de l'objet de l'entretien dans un langage accessible ; le respect de la confidentialité et
l'anonymat des enfants ; le respect de la dimension genre ; la garantie de la protection des enfants
contre tout préjudice suite à leur participation ; l'archivage des documents de l'enquête aux
Commissions régionales des droits de l'Homme (CRDH) et CNDH ;
La conduite d'entretiens avec les familles d'enfants placés ;
6. L'analyse des informations collectées ;
7. La rédaction du projet de rapport ;
8. L'animation d'un atelier de restitution : présentation des résultats et des recommandations
aux principaux acteurs concernés ;
9. La rédaction du rapport final.
Insuffisance des centres de sauvegarde de l'enfance
Les centres de sauvegarde de l'enfance sont des établissements socio-éducatifs relevant du ministère de la Jeunesse et des Sports qui accueillent sur décision judiciaire, des enfants ayant commis des infractions pénales ainsi que des enfants en situation difficile, en application des articles 471 et 481 du Code de procédure pénale et des enfants en situation difficile, en application de l'article 512 dudit code.
Ces centres ont pour missions d'assurer la rééducation et la réinsertion des enfants placés sous décision judiciaire, notamment :
- En formulant des recommandations et des projets éducatifs susceptibles d'aider l'autorité judicaire à prendre la décision adéquate concernant l'enfant ;
- En offrant des services et des prestations socio-éducatives et sanitaires ;
- En assurant la formation scolaire et professionnelle ;
- Et en renforçant les liens entre l'enfant et sa famille.
Les centres de sauvegarde de l'enfance sont composés de trois sections :
1- Les sections d'observation : destinées au placement provisoire des mineurs pour une durée de trois semaines à trois mois. L'objectif étant d'étudier la personnalité de l'enfant et son parcours, et de recueillir les informations sur le milieu familial et social.
2- Les sections de rééducation : réservées au placement des mineurs qui ont besoin de protection et de rééducation après évaluation de leur passage en section d'observation.
L'objectif est de permettre l'acquisition des règles sociales, d'une formation scolaire et professionnelle et le renforcement des liens entre le mineur et son entourage familial ainsi qu'avec le milieu extérieur.
3- Les foyers d'action sociale : réservés aux mineurs qui ont poursuivi leur scolarité dans les centres de rééducation. Ils leur permettent de suivre le cursus scolaire secondaire dans des établissements extérieurs relevant du ministère de l'Education Nationale. Ces foyers sont également ouverts aux mineurs diplômés en formation professionnelle qui cherchent des stages. L'objectif est de faciliter leur réinsertion dans le milieu extérieur grâce à un régime de semi-liberté.
En plus des CSE, il existe des institutions en milieu ouvert qui visent la prise en charge socio-éducative et la réinsertion familiale et sociale des mineurs placés sous le régime de la liberté surveillée, ainsi que des enfants ayant bénéficié des services des institutions de sauvegarde de l'enfance nécessitant une prise en charge éducative et une assistance sociale. Ces institutions en milieu ouvert se composent de deux régimes :
- Le régime de la liberté surveillée : les enfants sont placés dans le cadre de ce régime conformément aux dispositions des articles 496 et 500 du Code de procédure pénale.
La prise en charge éducative est assurée par les délégués à la liberté surveillée sous la tutelle du juge des mineurs. A l'instar des CSE, cette prise en charge s'articule autour de deux phases : la phase d'observation qui s'étend de un à trois mois et la phase de rééducation ;
- Le service de suivi : en charge d'assurer le suivi des enfants ayant quitté les institutions de sauvegarde de l'enfance au terme de leur placement.
Le délégué à la liberté surveillée est la personne en charge du suivi des mineurs placés sous le régime de la liberté surveillée.
Le réseau actuel des centres de sauvegarde de l'enfance est composé de 20 centres (nationaux, régionaux et foyers d'action sociale) répartis ainsi :
- Quinze centres pour garçons situés à : Agadir, Marrakech, Benslimane, Fkih Ben Salah, Berrechid, Nador, Oujda, Tanger, Temara, Fès(2), Meknès, Tit Mellil, Larache et Casablanca ;
- Cinq centres pour filles situés à : Marrakech, Agadir, Fès et Casablanca.
Il est à noter que les centres de Tit Mellil et de Larache, ainsi que le foyer d'action sociale de Casablanca sont actuellement fermés pour mise à niveau.
Certaines régions bénéficient de plusieurs centres, alors que d'autres n'en disposent pas du tout. La capacité totale actuelle d'accueil est de 1852 enfants (1252 pour les garçons et 600 pour les filles).
Il est à noter que cette capacité totale a diminué du fait de la fermeture transitoire pour mise à niveau de trois structures qui ont une capacité d'accueil de 210 enfants, soit 10,12% de la capacité totale.
Du fait de la fluctuation du nombre d'enfants et de la durée de séjour, le taux d'occupation varie fortement. Cependant, ces centres ont accueilli un total de 4921 enfants en 2010 et 4587 en 2011, mais en novembre 2012, seulement 742 enfants ont été placés dans les 17 établissements visités par le CNDH.
Le placement d'un enfant dans une institution
doit être une mesure de dernier recours
La CDE, ratifiée par le Maroc en 1993, stipule dans son article 9 qu'aucun enfant ne doit être séparé de ses parents, sauf si cela représente son intérêt supérieur, et que le placement d'un enfant dans une institution doit être une mesure de dernier recours.
L'article 25 met l'accent sur la nécessité de réaliser des revues périodiques de la situation de chaque enfant, pour évaluer le progrès et la pertinence du placement. L'article 18 stipule que les Etats parties doivent apporter l'assistance appropriée aux familles nécessiteuses, et l'article 20 souligne la responsabilité des Etats parties de garantir une protection spéciale aux enfants séparés de leurs familles. L'article 23 stipule que les Etats parties doivent assurer des conditions de vie dignes et apporter une assistance appropriée aux enfants mentalement ou physiquement handicapés.
Les lignes directrices des Nations Unies relatives à la protection de remplacement pour les enfants, énoncent des orientations souhaitables en matière de politique et de pratique dans le but de promouvoir la mise en œuvre de la CDE et des dispositions pertinentes d'autres instruments juridiques internationaux concernant la protection et le bien-être des enfants privés de protection parentale ou risquant de se retrouver dans une telle situation. Ces lignes directrices visent à appuyer la désinstitutionalisation via :
- le maintien ou le retour de l'enfant dans sa famille ;
- l'adoption et la Kafala ;
- la mise en place de mesures de protection et de remplacement adaptées favorisant le développement
complet et harmonieux de l'enfant, quand la réintégration familiale ou l'adoption s'avère impossibles ou ne respecte pas l'intérêt supérieur de l'enfant.
Selon les articles 37 et 40 de la CDE, tout enfant ayant affaire à la justice a droit à un traitement qui soit de nature à respecter sa dignité et son intégrité physique et psychique, qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société. En outre, la privation de liberté d'un enfant ayant eu affaire avec la justice (dans une prison, un centre de détention, un centre de rééducation ou toute autre institution privative de liberté) devrait être une mesure de dernier ressort, et d'une durée aussi brève que possible.
L'article 37 rappelle la nécessité de maintenir les liens familiaux sauf circonstances exceptionnelles. Cet article définit également les modalités de participation de l'enfant au processus judiciaire, notamment l'accès rapide à l'assistance juridique ou à toute assistance appropriée et la possibilité de contester la légalité de la privation de liberté devant un tribunal ou une autre autorité compétente, indépendante et impartiale.
L'article 40 considère «tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale» comme étant un enfant en conflit avec la loi. Il met l'accent sur la nécessité :
- De veiller à ce que la cause de l'enfant soit entendue sans retard par une autorité ou une instance judiciaire compétente, indépendante et impartiale, selon une procédure équitable, en présence de son conseiller juridique ou autre ;
- De veiller à ce que sa vie privée soit pleinement respectée à tous les stades de la procédure ;
- Promouvoir l'adoption de mesures pour traiter les enfants en conflit avec la loi sans recourir à la procédure judiciaire;
- De mettre en place des dispositifs pédago-éducatifs autres que le placement en institution, en vue d'assurer aux enfants un traitement conforme à leur bien-être et proportionné à leur situation et à l'infraction.
Etant donné que la majorité des enfants délinquants ne commettent que des infractions mineures, le recours à un ensemble de mesures tendant à leur épargner la procédure pénale/le système de justice pour mineurs, en les orientant vers des filières (services sociaux) de remplacement (déjudiciarisation), devrait constituer une pratique bien établie pouvant et devant être mise en œuvre dans la plupart des cas.
Dans son Observation générale N°10 sur les droits de l'enfant dans le système de justice pour mineurs, le Comité des droits de l'enfant souligne que les Etats parties sont tenus de formuler et d'appliquer une politique globale en matière de justice pour mineurs, basée sur l'application des principes généraux et dispositions de la CDE énoncés notamment aux articles 2 (la non discrimination), 3 (l'intérêt supérieur de l'enfant étant la considération primordiale dans toutes les décisions prises au titre de l'administration de la justice pour mineurs), 4 (mesures législatives et administratives), 6 (le droit à la survie, à la vie et au développement), 12 (le droit d'être entendu à tous les stades de la procédure judiciaire), ainsi que tous les articles pertinents de la Convention, dont les articles 37, 39, et 40 (traitement approprié, réadaptation et réinsertion sociale).
Cette politique devrait englober la prévention de la délinquance juvénile, l'introduction de mesures de substitution permettant de faire face à la délinquance juvénile sans recourir à la procédure judiciaire ainsi que l'incorporation des diverses autres normes internationales, en particulier:
- L'ensemble des Règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing, 1985) qui donnent les lignes directrices aux Etats pour tenir compte de la protection des droits de l'enfant et du respect de leurs besoins lors de l'élaboration de systèmes spécialisés de justice pour mineurs, notamment lors des trois phases de l'instruction, du jugement et de l'exécution ;
- Les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (Règles de La Havane, 1990) qui définissent les règles à respecter en matière de protection des enfants privés de liberté, notamment lors des gardes à vue ou des séjours dans les commissariats de police ;
- les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad, 1990) qui définissent tous les domaines relatifs à la prévention et le rôle des différents acteurs concernés (communautés, services sociaux, école, associations, médias).
D'autres instruments internationaux comportent des dispositions pertinentes en matière de protection des droits des enfants en conflit avec la loi et méritent d'être cités :
- Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966), en particulier ses articles 6, 9,10 et 14 ;
- La Convention contre la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants (1984) ;
- La Convention internationale sur l'élimination de toutes formes de discrimination raciale (1966).
De même, d'autres principes et normes ont été élaborés en matière de justice des mineurs dont en particulier :
- Les Principes directeurs d'action concernant les enfants dans le système de justice pénale ;
- Les Principes de base concernant l'utilisation des programmes de justice réparatrice dans les affaires criminelles ;
- Les Lignes directrices en matière de justice pour les enfants victimes et témoins d'actes criminels.
Protection et placement des enfants en situation difficile
Les lois nationales en matière de justice des mineurs sont en conformité avec les normes et standards internationaux, grâce aux différentes réformes entreprises.
Tout d'abord, la réforme du Code de procédure pénale
L'adoption du Code de procédure pénale en octobre 2002, publié au BO N° 5078 du 30 janvier 2003, représente un véritable progrès en matière de protection des enfants en situation difficile et des enfants en conflit avec la loi. La nouvelle approche du Code vise la protection de l'enfant, qu'il s'agisse d'un enfant victime d'infraction, d'un enfant auteur d'infraction ou d'un enfant en situation difficile.
Protection et placement des enfants
en situation difficile
Le titre VII du livre III du Code de procédure pénale (articles 512 à 517) est consacré à la protection des enfants en situation difficile. L'article 513 définit l'enfant en situation difficile, comme «tout mineur n'ayant pas atteint l'âge de 18 ans dont la sécurité corporelle, mentale, psychologique ou morale ou son éducation est en danger à cause de sa fréquentation de personnes délinquantes ou connues pour leur mauvaise réputation ou ayant des antécédents judiciaires ; lorsqu'il se rebelle contre l'autorité de ses parents, la personne ayant sa garde, son tuteur, son tuteur datif, la personne qui le prend en charge, la personne ou l'établissement à qui il a été confié ; lorsqu'il s'habitue à fuir de l'établissement où il suit ses études ou sa formation ; lorsqu'il quitte son domicile ou lorsqu'il ne dispose pas d'un lieu adéquat où s'installer».
Ce Code constitue donc un réel progrès. Jusque-là, le juge ne pouvait intervenir que lorsque l'enfant était victime ou auteur d'une infraction qualifiée de crime ou délit.
Actuellement, la justice peut intervenir plus tôt, dès lors que l'enfant est en danger. Le juge des mineurs près le tribunal de première instance peut sur réquisition du ministère public appliquer au mineur une des mesures de protection prévues aux alinéas 1, 3, 4, 5 et 6 de l'article 471 du Code de procédure pénale à savoir :
- La remise à ses parents, à son tuteur, à son tuteur datif, à la personne qui le prend en charge ou qui est chargée de sa garde ou toute personne digne de confiance ;
- La remise à la section d'observation ;
- La remise à la section d'accueil d'une institution publique ou privée habilitée à cet effet ;
- La remise au service public ou à un établissement public chargé de l'assistance à l'enfance ou à un établissement hospitalier en cas de nécessité d'opérer une cure de désintoxication ;
- La remise à un établissement ou à une institution scolaire ou de formation professionnelle ou de soins relevant de l'Etat ou d'une administration publique habilitée ou à un établissement agréé ;
- La remise à une association reconnue d'utilité publique habilitée à cet effet.
Si le juge des mineurs estime que l'état de santé, l'état psychologique ou le comportement du mineur nécessitent des examens approfondis, il peut ordonner son placement temporaire pour une période n'excédant pas trois mois dans un centre agréé habilité (article 514).
Ces mesures sont exécutées selon le régime de la liberté surveillée et leur suivi est assuré par un délégué à la liberté surveillée conformément aux articles 496 à 500 du Code de procédure pénale (article 515).
«Le juge des mineurs peut, ordonner à tout moment l'annulation ou la modification de ces mesures conformément à l'intérêt du mineur. Le juge prend cette décision soit d'office, soit à la requête du Procureur du Roi ou du mineur lui-même, de ses parents, de son tuteur, de son tuteur datif, de la personne ayant sa garde ou qui le prend en charge ou la personne ou l'établissement qui s'en charge, et ce, sur rapport du délégué à la liberté surveillée. Si ce n'est pas le Procureur qui a fait la demande, son avis est obligatoire» (article 516).
«Ces mesures prennent fin à la date prévue dans la décision et dans tous les cas, lorsque le mineur atteint l'âge de 16 ans révolus. Dans des cas exceptionnels, si l'intérêt du mineur l'exige, le juge peut décider par avis motivé, de prolonger les mesures jusqu'à ce que celui-ci atteigne l'âge de 18 ans, sous réserve des alinéas 2 et 3 de l'article 516» (article 517).
La justice des mineurs, protection et placement
des enfants en conflit avec la loi
En matière de justice des mineurs, le Code de procédure pénale consacre plus de 50 articles aux mesures propres aux mineurs soupçonnés d'avoir commis une infraction aux règles propres aux mineurs (livre III, articles 458 à 517). Dans leurs grandes orientations, ces dispositions visent à protéger les mineurs se trouvant dans une situation d'illégalité et à corriger leur conduite afin de les réintégrer dans la société et non de les punir, le recours à la sanction ne s'appliquant que s'il devient impossible de prendre d'autres mesures pédagogiques en faveur du mineur.
Les principaux changements du Code de procédure pénale ont porté sur l'élévation de l'âge de la majorité pénale à 18 ans (articles 458 et 459) et ce conformément à l'article premier de la Convention, la réinstauration des juridictions spécialisées pour les mineurs (article 462), l'institution du juge des mineurs (articles 467 et 477), le renforcement du rôle du Conseil chargé des mineurs près de la Cour d'appel (articles 485, 488, 489, 490 et
494) et la mise en place d'une police judiciaire spécialisée chargée des mineurs. Le Code entérine clairement la distinction entre officiers de police judiciaire (OPJ) ordinaires et OPJ chargés des mineurs, abstraction faite de toute organisation administrative propre à l'organe chargé de l'application de la loi.
Le Code a, en outre, pris en considération la vulnérabilité des mineurs en accordant au juge des mineurs ou au conseiller chargé des mineurs la possibilité de les placer par simple ordonnance jusqu'à jugement définitif du crime ou délit, chez une personne digne de confiance ou dans un établissement public ou privé chargé de l'assistance.
Le ministère public peut désormais appliquer la procédure de réconciliation dans les délits commis par les mineurs. Il peut également ordonner la suspension de l'action publique déclenchée contre le mineur en cas de retrait de la plainte ou de désistement de la personne lésée.
Le placement sous surveillance du mineur auquel est imputée l'infraction (art. 460 du Code) ne peut être appliqué que dans le cas où le mineur ne peut être remis à la personne qui se chargera de son assistance ou lorsque les nécessités de l'enquête ou la sécurité du mineur l'imposent, après accord du ministère public. L'officier de police judiciaire en charge des mineurs est tenu de prendre toutes les mesures susceptibles d'éviter toute violence à l'encontre du mineur. A cet égard, le parquet est obligé de soumettre à un examen médical le mineur qui présente des traces de violences, avant son audition, pour s'assurer qu'il n'a pas été maltraité ou torturé.
A noter que le ministère public peut, à titre exceptionnel, ordonner le placement du mineur durant la période de l'enquête préliminaire, au titre de la garde provisoire prévue par l'article 471 du Code de procédure pénale (il s'agit de mesures de placement prévues pendant l'instruction et le jugement) sans que la durée de cette mesure ne dépasse les quinze jours.
En matière de poursuite (articles 463 et 464), le ministère public est seul juge de l'opportunité des poursuites. Si le ministère public estime qu'une poursuite pénale serait contraire à l'intérêt de l'enfant, la victime pourra demander réparation devant les juridictions civiles. Le traumatisme d'un procès pénal sera ainsi évité à l'enfant. Le placement du mineur en détention préventive est exceptionnel (art. 473). Cette mesure est impossible pour le mineur n'ayant pas atteint l'âge de douze ans, et ce, quelle que soit l'infraction commise.
Parmi les apports du Code de procédure pénale en matière de justice des mineurs, il y a lieu également de mentionner les nouvelles dispositions relatives aux mesures prononcées qui portent sur :
- Les mesures de protection et de rééducation (article 481) qui concernent la remise du mineur à ses parents ou à toute personne digne de confiance et, le cas échéant, à des établissements, des associations d'utilité publique et des institutions spécialisées oeuvrant dans le domaine de l'enfance ;
- L'obligation d'information des parents, du tuteur, de la personne ou de l'établissement ayant la charge du mineur des accusations portées contre lui, et ce, dans le plus court délai ;
- L'obligation d'octroyer une assistance légale au mineur et de requérir la présence de son représentant légal au moment de sa comparution ;
- Le caractère confidentiel de la procédure. En effet, la publication de tout compte rendu des audiences des juridictions des mineurs, par quelque procédé que ce soit est interdite, de même que la publication de tout texte, croquis ou illustration concernant l'identité et la personnalité des mineurs délinquants, sous peine d'une amende de 5000 à 50 000 dirhams. Le législateur permet également aux centres de sauvegarde de l'enfance de recourir aux médias pour diffuser certaines informations concernant le mineur afin de faciliter les retrouvailles avec sa famille mais après autorisation du juge des mineurs ;
- L'instauration de la liberté surveillée (articles 496 à 500) qui consiste à laisser le mineur dans son milieu naturel en le soumettant à une surveillance de l'autorité judiciaire. Le placement des mineurs sous observation se substitue au placement en garde à vue, interdit par la loi au Maroc ;
- L'atténuation des peines prononcées au mineur (articles 482 et 493). En effet, en matière de délit, l'article 482 stipule qu'exceptionnellement, pour les mineurs de douze à dix huit ans, la chambre des mineurs peut, en motivant sa décision, remplacer ou compléter par une peine privative de liberté ou d'amende, les mesures de protection ou de rééducation. Dans ce cas, le maximum et le minimum de la peine prévue par la loi doivent être diminués de moitié. En matière criminelle, l'article 493 prévoit que si l'infraction commise est passible de la peine de mort ou de la réclusion perpétuelle, la chambre pénale prononce une peine atténuée de dix à quinze ans d'emprisonnement ;
- La modification des mesures de protection et de rééducation (articles 501 à 504) : celles-ci peuvent être révisées par le juge des mineurs ou le conseiller chargé des mineurs, soit d'office, soit sur requête du ministère public, soit suite au rapport du délégué à la liberté surveillée, soit à la demande du mineur ou de son représentant légal. Par ailleurs, trois mois après une décision plaçant le mineur hors de sa famille, celle-ci peut formuler une demande de restitution de garde, en justifiant de son aptitude à élever l'enfant et d'une évolution favorable de ce dernier. Le mineur peut lui même formuler cette demande.
Par ailleurs, le Code de procédure pénale a mis en place des juridictions spécialisées en matière de justice :
- Au niveau de la police et la gendarmerie : une police judiciaire spécialisée conformément aux dispositions de l'article 40.3 de la CDE, composée d'officiers de police chargés de la protection des mineurs ;
- Au niveau du Tribunal de première instance : le juge des mineurs et la chambre des mineurs ;
- Au niveau de la Cour d'Appel : le conseiller chargé des mineurs, la chambre correctionnelle pour mineurs, la chambre correctionnelle d'appel, la chambre criminelle pour mineurs et la chambre criminelle d'appel.
Les autres réformes législatives garantissant
la protection des droits des enfants
Les modifications substantielles apportées au Code pénal promulgué en novembre 2003 et publié au BO du 15 janvier 2004, ont permis l'introduction de nouvelles dispositions consolidant la protection des enfants conformément aux dispositions de la Convention.
Ces dispositions constituent un progrès dans le cadre de la protection de l'enfant contre les mauvais traitements, notamment en accentuant la sévérité des sanctions pour les infractions à l'encontre de l'enfant et en créant de nouvelles incriminations : la vente, la traite, (articles 467-1, 467-3), le travail forcé des enfants (articles 467-2) et la pornographie mettant en scène des enfants (articles 503-2).
Par ailleurs, l'article 33 du Code pénal prévoit un autre cas dans lequel l'enfant peut être considéré en situation difficile, lorsque «ses parents sont condamnés à une peine d'emprisonnement supérieure à un an, et qu'il ne peut être recueilli par des membres de sa famille ou par une personne publique ou privée dans des conditions satisfaisantes, ... les dispositions de la loi relative à la procédure pénale sur la protection des enfants en situation difficile, ou les dispositions de la Kafala des enfants abandonnés, lorsque les conditions y afférentes sont réunies, sont alors applicables».
D'autres réformes législatives entreprises ces dernières années consacrent la protection des droits des enfants : le Code de la Famille (2004), le Code du travail (2004), la Loi sur l'état civil (2002), le Code de la nationalité (2007), la loi relative aux accessibilités des personnes handicapées (2003), la loi 15-01 relative aux enfants abandonnés (Kafala 2002), la loi 14-05 sur les centres de protection sociale (2006).
Enfin, la Constitution de 2011 qui assoit la primauté des conventions internationales ratifiées par le Maroc sur le droit interne du pays et assure (article 32) une égale protection juridique et une égale considération sociale et morale à tous les enfants, abstraction faite de leur situation familiale.
Protection des enfants et instances publiques
Si le ministère de la Jeunesse et des Sports est le ministère de tutelle dont relèvent les centres de sauvegarde de l'enfance, d'autres instances publiques interviennent de par leurs attributions dans la protection et la prise en charge des enfants en contact avec la loi (enfants en situation difficile et enfants en conflit avec la loi) : ministère de la Justice et des Libertés, ministère du Développement Social, de la Femme, de la Famille et de la Solidarité
et l'Entraide nationale.
- Le ministère de la Jeunesse et des Sports
Le ministère de la Jeunesse et des Sports, de par ses attributions, joue un rôle important dans la protection et la prise en charge des enfants placés dans les institutions relevant de son autorité ainsi que dans la protection et la prise en charge des enfants placés sous le régime de la liberté surveillée, à travers :
- La supervision et le contrôle des institutions relevant de sa tutelle (Centres de sauvegarde de l'enfance et foyers d'action sociale) ;
- La mise en œuvre de programmes de rééducation et de réinsertion adaptés aux besoins et profils des enfants, par l'allocation de moyens humains, financiers et logistiques nécessaires ;
- La mise en place de programmes de formation visant le renforcement des capacités des acteurs intervenant auprès des enfants ; Le suivi-évaluation réguliers des modalités de protection et de prise en charge des enfants placés dans les CSE et foyers d'action sociale ainsi que des enfants suivis en milieu ouvert ;
- La prévention de l'exclusion et de la délinquance, à travers des programmes socioéducatifs destinés aux enfants et aux jeunes.
- Le ministère de la Justice et des Libertés
Le ministère de la Justice et des Libertés, joue un rôle de toute première importance dans la protection judiciaire et la prise en charge des enfants en contact avec la loi, à travers :
- La mise en conformité des législations avec les instruments et standards internationaux en matière de droits de l'enfant ;
- L'application effective des lois à travers la mise en place de moyens humains, financiers et logistiques nécessaires;
- La mise en place de programmes de formation visant le renforcement des capacités des acteurs intervenant auprès des enfants ;
- La mise en œuvre d'alternatives à la privation de liberté des enfants ayant commis une infraction pénale ;
Le suivi-évaluation réguliers des modalités de protection et de prise en charge des enfants en contact avec la loi placés en institution.
Si des efforts notables ont été enregistrés en matière de mise en conformité des législations nationales relatives à la protection des enfants en contact avec la loi, beaucoup reste à faire en matière de leur mise en œuvre effective, notamment en ce qui concerne : l'allocation des moyens matériels et des ressources humaines qualifiées nécessaires ; la mise en place d'alternatives à la privation de liberté ; le droit d'être entendu et la garantie de l'intérêt supérieur de l'enfant lors de la procédure judiciaire ; la systématisation du suivi-évaluation réguliers des enfants placés et des modalités de leur protection et de leur prise en charge.
Par ailleurs, il n'existe pas à ce jour de politique globale en matière de justice des mineurs, incluant la prévention et la prise en charge adéquate des enfants en contact avec la loi.
- Le ministère de la Solidarité, de la Famille,
de la Femme et du Développement Social
Le ministère de la Solidarité, de la Famille, de la Femme et du Développement Social, constitue le pivot central en matière de protection des enfants et de promotion de leurs droits, à travers :
- La coordination de la mise en oeuvre du Plan d'action national pour l'enfance (PANE) 2006-2015, «un Maroc digne de ses enfants», qui comprend entre autres la mise en place de stratégies et programmes visant la protection et la prise en charge des enfants abandonnés, des enfants des rues, des enfants victimes d'abus, de violence ou d'exploitation, des enfants placés en institution et des enfants en conflit avec la loi ;
- La mise en œuvre de normes conventionnelles et conformes aux standards internationaux pour les institutions d'accueil des enfants, tenant compte de l'intérêt supérieur de l'enfant ;
- La mise à niveau des institutions d'accueil des enfants afin que ces établissements soient dotés de programmes psychosociaux, pédago-éducatifs et culturels conformes aux besoins et droits des enfants ;
- Le contrôle de la qualité des prestations des divers établissements (publics et privés) recevant des mineurs en situation difficile ;
- La mise en place d'alternatives à l'institutionnalisation, le placement des enfants en institution devant être le dernier recours, à travers : le placement de l'enfant dans son environnement familial immédiat ou élargi ; la prise en charge en milieu ouvert ; la mise en place de mesures de protection de remplacement conformément aux Lignes directrices des Nations unies ;
- Le renforcement des capacités des divers acteurs intervenant auprès des enfants ;
- L'amélioration des conditions de prise en charge des enfants en conflit avec la loi, à travers la mise en place de programmes psychosociaux, pédago-éducatifs pour les mineurs, facilitant leur réinsertion familiale et sociale ; la mise en place d'alternatives à la privation de liberté pour les mineurs en conflit avec la loi.
La plupart des actions programmées dans le cadre du PANE relatives à la protection et la prise en charge des enfants en situation difficile et en conflit avec la loi, n'ont pas été mises en œuvre, du fait entre autres de l'insuffisance des moyens alloués, d'un manque de coordination entre les différents départements concernés et enfin de l'absence d'un système de suivi-évaluation rigoureux.
Le ministère de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement Social est dans la phase d'élaboration d'une politique nationale de protection de l'enfance, qui nécessitera un pilotage et une coordination efficaces en vue de mettre en place avec tous les acteurs publics et associatifs concernés, des systèmes de protection intégrés aisément accessibles à tous les enfants.
- L'Entraide nationale : Programmes qualitativement insuffisants
L'Entraide nationale, établissement public autonome placé sous la tutelle du ministère de la Solidarité, de la Femme, de la Famille, du Développement social, intervient également dans le domaine de la prise en charge des enfants en situation difficile, à travers :
- La création, l'appui et la supervision des établissements de protection sociale, dont un bon nombre est dédié aux enfants orphelins, enfants en situation de handicap, enfants abandonnés, enfants issus de familles pauvres ou dysfonctionnelles ;
- Le subventionnement des associations intervenant dans la prise en charge des enfants en situation difficile ;
- Le contrôle de la conformité des institutions d'accueil avec la loi 14-05, portant sur les normes minimales juridiques, techniques et physiques et d'encadrement pour les institutions résidentielles.
Les normes élaborées par l'Entraide nationale dans le cadre de la loi 14-05 ne s'appliquent pas aux structures relevant du ministère de la Jeunesse et des Sports. Si l'Entraide nationale dispose, gère et supervise des structures d'accueil d'enfants en situation difficile, les programmes de prise en charge de ces enfants restent souvent qualitativement insuffisants, du fait du manque de moyens et surtout de ressources humaines qualifiées.
Par ailleurs, les rôles en matière de protection et prise en charge des enfants en situation difficile ne sont pas dûment clarifiés entre le ministère de la Jeunesse et des Sports et l'Entraide nationale.
Il est à rappeler que d'autres instances publiques, de par leur mission, sont appelées à intervenir, notamment dans la santé, l'éducation, la formation professionnelle, etc.
Les associations : Peu de moyens et problème
de durabilité
Un certain nombre d'associations interviennent dans le domaine de la protection et de la prise en charge des enfants en situation difficile et en conflit avec la loi, soit en apportant un appui aux structures publiques existantes, soit en gérant leurs propres structures.
- Les associations d'appui aux CSE
La Fondation Mohammed VI pour la réinsertion des détenus a contribué fortement, dans le cadre de partenariats avec les ministères concernées et d'autres acteurs publics, associatifs et privés, à l'amélioration des conditions d'accueil et de prise en charge des enfants placés dans les centres de sauvegarde et à leur réinsertion familiale, scolaire et socioprofessionnelle.
De même que dans le cadre de partenariats avec les CSE, un bon nombre d'associations nationales et internationales, d'agences des Nations unies apportent un appui matériel (dons, équipement, réhabilitation des infrastructures..) et technique (renforcement des capacités du personnel des CSE, animation d'activités socioculturelles et pédago-éducatives, mise à disposition de personnel, etc.).
- Les associations disposant de structures d'accueil pour enfants
Un certain nombre d'associations disposent de structures d'hébergement visant la prise en charge et la réinsertion d'enfants en situation difficile : (enfants des rues, enfants abandonnés, enfants victimes de maltraitance, d'abus et/ou d'exploitation, enfants migrants non accompagnés,...), dont certains sont placés sur décision du juge conformément au titre VII du livre III du Code de procédure pénale (articles 512 à 517).
Dans le cadre de l'Initiative nationale pour le développement humain (programme INDH de lutte contre la précarité), un bon nombre des structures existantes a bénéficié de financements pour leur remise à niveau et une subvention de fonctionnement. De même que de nouvelles structures d'accueil pour enfants en situation difficile ont pu été créées. Cependant, la pérennité et la qualité de leurs programmes restent fortement tributaires de la qualité des ressources humaines et de la levée de fonds, notamment pour assurer le budget de fonctionnement.
Si l'apport du secteur associatif est considérable en matière de protection et prise en charge des enfants en contact avec la loi, il n'en demeure pas moins que les associations rencontrent de nombreuses difficultés, notamment en matière de durabilité et de qualité de leurs actions, dues entre autres au manque de personnel dûment qualifié et de moyens financiers.
Par ailleurs, les partenariats élaborés entre structures étatiques et associations ne sont pas toujours dûment établis. En effet, bon nombre de conventions de partenariats ne définissent pas clairement les rôles de chaque partie, les actions et moyens (matériels, financiers et humains) que chaque partie mettra en place, et ne comportent pas de modalités de suiviévaluation et de clauses de pénalité ou de rupture en cas de non respect des engagements pris.
Analyse situationnelle des enfants placés dans les centres
L'analyse portant sur les modalités de placement, d'accueil et de prise en charge des enfants est basée sur les observations et les résultats issus des visites effectuées par le CNDH aux 17 établissements, et ce du 15 au 29 novembre 2012.
Au moment des visites, 742 enfants étaient placés dans les 17 établissements visités (soit 40,1% de la capacité totale d'accueil). La répartition géographique est très variable, allant de 8 (CSE garçons - Berrechid) à 107 enfants (CSE filles-Agadir), les centres d'Agadir, Marrakech et Casablanca accueillent le plus grand nombre d'enfants (cf. tableau ci-dessous).
Les enfants âgés de 12 à 18 ans représentent 85,2% des enfants placés : 216 enfants âgés de 12 à 14 ans (29,1%), 214 âgés de 14 à 16 ans (28,8%), et 202 âgés de 16 à 18 ans (27,2%).
Les enfants âgés de moins de 12 ans (110 enfants) représentent 14,8% de l'effectif global. La présence de bébés vivant avec leurs jeunes mères a été notée parmi les enfants âgés de moins de six ans.
Les garçons (468) représentent 63% alors que les filles (274) représentent 37% de l'effectif
Global.
Les motifs et la durée des placements
Les enfants en situation difficile (393 enfants) représentent 53% et les enfants en conflit avec la loi (349 enfants) 47% de l'effectif global. 1% sont des victimes.
Les enfants en situation difficile placés présentent des profils différents : enfants abandonnés, enfants en situation de rue, enfants mendiants, jeunes filles mères, enfants issus de familles dysfonctionnelles. En ce qui concerne le placement des enfants en conflit avec la loi, les délits sont principalement les atteintes aux personnes, aux biens, à la sécurité ou à l'ordre public.
Certains enfants sont placés pour récidive de délits pour lesquels ils avaient précédemment été jugés et placés au centre : c'est le cas de 43 enfants. De même que 11 enfants en situation difficile ont été replacés au centre.
Parmi les enfants placés âgés de 12 à 18 ans placés, 173 (23%) attendent la décision judiciaire définitive et 459 (62% ) se sont vu confirmer le placement en institution à des fins de rééducation. Les 110 enfants (15%) âgés de moins de 12 ans sont soit en attente de la décision judiciaire définitive, soit placés du fait de l'absence d'alternatives (familles absentes ou dysfocntionnelles, enfants en situation de handicap...).
Il est à noter que la phase d'observation dure souvent au-delà du temps réglementaire (un à trois mois), les décisions judiciaires n'étant pas prises rapidement.
Le suivi des enfants placés qui doit être assuré par le juge, tel que prévu par la loi, reste très aléatoire. Ceci entraîne souvent des placements de longue durée souvent injustifiés, du fait de l'absence de révision des mesures judiciaires initiales, telle que prévue par la loi.
Les centres abritent des profils d'enfants très variés, entraînant une mixité d'enfants d'âge divers, de situations différentes (enfants en situation difficile, enfants en conflit avec la loi, enfants en observation, enfants en rééducation). En effet, si les garçons sont séparés des filles et placés dans des centres distincts, il n'y a pas de séparation formelle selon l'âge (sauf dans quelques centres), la vulnérabilité et la situation.
Les enfants en situation difficile (retirés de leur environnement familial défavorable, abandonnés et les enfants errant ou mendiant dans les rues) se trouvent dans une institution fermée, privés de leur liberté, partageant les mêmes espaces que des enfants en conflit avec la loi, en attente de jugement ou déjà jugés.
Cette hétérogénéité ne permet pas une prise en charge adaptée et pose le problème de sécurité et de protection des enfants vulnérables, notamment ceux âgés de moins de 12 ans.
Des disparités notables existent entre les centres, certains étant très faiblement occupés alors que d'autres sont surchargés, ce qui est notamment le cas des structures d'accueil pour filles qui ne sont qu'au nombre de cinq.
Du fait de la répartition géographique des centres et du placement effectué selon la disponibilité de places, des enfants se retrouvent souvent placés dans des centres éloignés de leur lieu de résidence et donc de leur famille. Certains centres sont très éloignés des circonscriptions juridiques. En raison de cet éloignement, le suivi judiciaire, les enquêtes familiales et le maintien des liens familiaux s'avèrent difficiles. Par ailleurs, la lenteur des
décisions judiciaires et l'absence d'une aide judicaire appropriée (avocat désigné au dernier moment lors de la présentation devant le juge, avocat n'ayant pas une bonne connaissance des faits ni de la situation de l'enfant), obligent des enfants à passer plus de trois mois dans la section d'observation sans être présentés au juge.
Le recours au placement en institution et à la privation de liberté est souvent le premier recours respectivement pour les enfants en situation difficile et les enfants en conflit avec la loi.
Conditions de vie : Précarités
A l'exception du centre Abdeslam Bennani-Casablanca qui dispose de dortoirs pour 6 à 7 enfants, les dortoirs des 16 autres centres accueillent 20 à 40 enfants, ce qui rend impossible la séparation des enfants selon l'âge et la vulnérabilité. Par ailleurs, les directives relatives à la répartition des dortoirs par section d'âge ne sont pas appliquées en raison de l'insuffisance du personnel (un seul encadrant pour la nuit). La literie ainsi que les draps
et couvertures ne sont pas suffisamment entretenus et renouvelés de façon à en assurer la propreté.
Les dortoirs ne sont pas systématiquement équipés de casiers personnels avec des clefs où les enfants peuvent déposer leurs effets personnels, ce qui amène les enfants placés dans certains centres (Marrakech-garçons, Fkih Ben Saleh, Berrechid) à déposer leurs affaires à même le sol.
L'ensemble des centres disposent de douches collectives mais qui ne sont pas toutes fonctionnelles (abscence d'eau chaude à Fkih Bensaleh, douches non réparées au centre Zyat et au foyer social à Fès, absence de chauffage en hiver) ; et l'accès aux salles d'eau et sanitaires varie d'un centre à l'autre. Ainsi, dans le centre Marrakech (garçons), les enfants n'ont le droit aux salles d'eau qu'une seule fois chaque 15 jours, voire une fois par mois.
L'hygiène des installations sanitaires laisse souvent à désirer. Les installations sanitaires sont souvent relativement distantes des dortoirs, rendant leur accès difficile. Les produits d'hygiène corporelle sont insuffisants ou non régulièrement distribués aux enfants. Ce manque d'hygiène explique la présence de poux et de la gale chez bon nombre d'enfants.
Bien que le ministère de la Jeunesse et des Sports prévoit un petit budget pour l'habillement, seuls les centres qui reçoivent des dons de bienfaiteurs fournissent des vêtements aux enfants. Les enfants interviewés à ce sujet ressentent un sentiment d'infériorité, les vêtements étant souvent usagés ou ne convenant pas à leur taille. Beaucoup de bénéficiaires ont déclaré qu'ils n'avaient pas changé leurs vêtements depuis leur arrivée (plus d'un mois pour certains) en raison du manque d'une seconde tenue et de possibilité de lavage.
Sous-alimentation
Le budget de nourriture quotidien de 20 dirhams alloué par enfant ne permet pas de couvrir qualitativement et quantitativement les besoins des enfants. Un programme de repas est établi, mais par manque de moyens, les centres n'arrivent pas à s'y conformer.
“On ne mange pas bien, la nourriture ne suffit pas, les draps sont sales, on a rarement droit à de l'eau chaude pour les douches et on a froid la nuit". (Témoignage d'un enfant).
Les normes diététiques et d'hygiène alimentaire ne sont pas toujours respectées du fait de l'état de délabrement de certains réfectoires et cuisines ainsi que de l'insuffisance d'équipement et de matériel de cuisine. Par ailleurs, certains centres ne disposent pas toujours d'un cuisinier à temps plein (un cuisinier bénévole à Fkih Bensaleh et Zyat à Fès; abscence de cuisinier au foyer social de Fès pendant plus de 4 ans). Le personnel affecté aux cuisines étant insuffisant et non qualifié, les enfants sont appelés parfois à préparer leur repas les week-ends et jours fériés. Les enfants interviewés demandent une amélioration de la nourriture jugée insuffisante et de mauvaise qualité.
Globalement, les conditions de vie ne garantissent pas les droits fondamentaux des enfants placés. Ils constituent une atteinte à leur dignité et compromettent leur développement physique et psychique.
Cas de maladies dermatoloqiques et pulmonaires contagieuses, gale, tuberculose, de diabète et d'hépatite
Lors des visites éffectuées, il a été constaté qu'un certain nombre d'enfants souffraient de problèmes de santé :
- 59 cas de maladies dermatoloqiques et pulmonaires dont certaines sont contagieuses telles que la gale et la tuberculose ;
- 7 cas de maladies chroniques telles que le diabète et l'hépatite ;
- 16 cas de troubles mentaux et psychologiques ;
- 19 cas de handicap physique et mental.
Il a été également constaté qu'un certain nombre d'enfants (garçons et filles) ont des problèmes d'addiction aux drogues et beaucoup d'enfants présentent des cicatrices d'automutilation.
Quinze centres possèdent une salle de soins et seulement six possèdent des équipements et du matériel de soins. Seuls six centres disposent d'une infirmière. Le médecin contractuel ne rend visite aux enfants qu'en cas d'urgence.
Les enfants malades sont transportés au dispensaire le plus proche du centre. Faute de moyens de transport dans certains centres, les enfants qui tombent malades la nuit, ne sont transportés au dispensaire que le lendemain.
Le personnel des centres n'est pas formé en matière de prévention et de premiers soins en cas d'urgences médicales.
A l'arrivée dans les centres, les enfants ne bénéficient pas systématiquement d'une visite médicale. Cela dépend de la bonne volonté des directeurs et des médecins contractuels.
Certains directeurs sont très exigeants en la matière, d'autres ne voient pas l'intérêt d'une première consultation. Ils se fient à leur propre apréciation pour juger de l'état de santé de l'enfant.
Considérant le fait que la majorité des enfants ne bénéficient pas d'une consultation à leur arrivée (médecin généraliste, psychiatre et psychologue), les problèmes liés à la santé mentale et à l'addiction aux drogues ne sont pas détectés à temps et les éducateurs sont livrés à eux-mêmes pour régler des problèmes qui les dépassent.
A l'exception du centre Abdeslam Bennani-Casablanca qui dispose d'un psychiatre bénévole, les enfants placés dans les autres centres n'ont pas accès à un psychologue/psychiatre.
«J'ai dû amener à l'hôpital une fille qui souffre de graves crises d'épilepsie. Au lieu de l'hospitaliser, le médecin lui a prescrit des calmants forts. Maintenant elle s'est isolée dans son coin, et elle est toujours somnolente. Je ne sais quoi faire parce que son cas va s'aggraver.» (Témoignage d'une éducatrice).
Les enfants en situation de handicap et les enfants présentant des troubles psychiatriques ne bénéficient pas d'une assistance et prise en charge spécifiques et ne sont pas non plus replacés le cas échéant dans des centres spécialisés. L'isolement des enfants contagieux n'est pas toujours possible du fait de l'absence de salles
d'isolement. A l'exception du centre Abdeslam Bennani-Casablanca, le suivi du calendrier des vaccinations obligatoires n'est pas assuré. L'absence de carnet médical ne permet pas de renseigner sur l'évolution de l'état desanté physique et psychique des enfants, surtout ceux qui passent des années au sein des centres.
Par ailleurs, il n'existe pas de programmes d'éducation à la santé destinés aux enfants.
Pour pallier ces insuffisances, certains centres ont fait appel des mécènes et développé des partenariats visant à améliorer la santé des enfants : dépistage, soins dentaires, médicaments, lunettes, consultations, etc.
Le droit à la santé des enfants placés
n'est pas pleinement garanti
Les enfants sont exposés à diverses formes de violences physiques et/ou morales, exercées oit par certains éducateurs (cf. paragraphe discipline), soit par d'autres enfants. Les enfants les moins âgés ont fait état de violence et d'abus exercés sur eux par les enfants plus âgés, plus forts ou violents ; ils ont d'ailleurs exprimé leurs craintes et angoisses surtout la nuit.
Il a également été constaté lors des visites que faute d'éducateur disponible, la responsabilité d'un groupe d'enfants est parfois confiée à un autre enfant, lequel ‘responsable', fort de ses prérogatives, peut être violent à l'égard de ceux dont il assure la garde.
Le mélange d'enfants, le manque d'intimité dans les dortoirs et l'insuffisance d'encadrement constituent des facteurs de risques d'agressivité et de violence et peuvent créer des tensions entre les enfants.
Pour des raisons éthiques, il a été difficile d'aborder avec les enfants le sujet relatif aux abus sexuels. Mais certains encadrants, lors des entretiens, ont relevé l'existence d'abus sexuels entre enfants et ce d'autant que certains enfants jugés pour viols sur enfants partagent les mêmes dortoirs avec de très jeunes enfants.
« J'ai peur la nuit, les autres enfants sont méchants
et plus forts que moi » (Témoignage d'un enfant)
Violence, abus et exploitation
Par ailleurs, il n'existe pas de programmes d'éducation sexuelle des enfants visant à mieux informer les enfants placés et à prévenir les conduites sexuelles agressives.
La sécurité des enfants placés pose également problème dans les centres où les infrastructures sont vétustes (risque d'accidents) et dans les centres où le contrôle d'accès est insuffisant, tels que les centres de Marrakech et Fès qui ont fait l'objet d'attaques à l'arme blanche commises par des bandes externes.
Après nous avoir montré les couteaux de toute sorte qu'il a récupéré dans les dortoirs, l'éducateur a soulevé les problèmes de sécurité rencontrés : « On a beaucoup de problèmes de sécurité dans le centre : l'autre jour un éducateur a failli mourir. L'un des enfants l'ayant poignardé au ventre. J'ai été moi-même maintes fois agressé (Il nous a montré des sutures récentes au niveau de sa main). J'ai essayé d'arrêter des jeunes de 18 à 20 ans qui voulaient entrer au centre afin de récupérer leur ami, l'un deux m'a frappé avec un couteau.
«Les enfants ne sont pas en sécurité et nous sommes peu nombreux pour assurer leur sécurité effective. Je sais que le centre n'est pas une prison mais il faut assurer la sécurité des enfants, il faut qu'il y'est des agents de sécurité au sein des centres. Parfois je suis seul à accompagner les enfants au tribunal, et à l'arrivée, je trouve parfois des bandes de jeunes délinquants qui attendent les enfants pour les récupérer de force.» (Témoignage d'un éducateur).
La sécurité des enfants est également difficile à assurer lors de leur déplacement au tribunal, de même que les éducateurs sont exposés à la violence que peuvent exercer contre eux certains enfants toxicomanes ou violents.
L'intégrité physique des enfants placés ainsi que leur droit à la protection contre toutes les formes de violence, d'abus et d'exploitation ne sont pas pleinement garantis.


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