Alors que la Conférence des Nations Unies sur les océans bat son plein à Nice, un thème essentiel mérite toute notre attention : l'éducation à l'océan. Protéger les océans commence par comprendre leur rôle fondamental. Et comprendre, c'est transmettre, former, sensibiliser. En un mot : éduquer. Pour le Maroc, pays bordé par l'Atlantique et la Méditerranée, avec plusieurs milliers de kilomètres de côtes, l'éducation à l'océan est une priorité stratégique. Nos mers nourrissent nos populations, soutiennent nos économies et façonnent notre identité. Pourtant, elles sont fragiles. Pollution, changement climatique, surexploitation : autant de menaces qui exigent une mobilisation collective — à commencer par les jeunes générations. C'est dans ce contexte que s'inscrit l'action de l'UNESCO. À travers sa Commission océanographique intergouvernementale, elle pilote la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021–2030). Cette initiative vise à ancrer une culture océanique mondiale, notamment grâce à l'éducation et à la formation. Car mieux comprendre l'océan, c'est mieux le protéger et anticiper sur la prévention des menaces nées des activités humaines. Au Maroc notamment, cet engagement se traduit par des actions concrètes. Depuis plusieurs années, l'UNESCO coopère avec le ministère de l'Education nationale et la Fondation Mohammed VI pour la protection de l'environnement dans l'intégration de l'éducation au développement durable, et notamment à la protection de l'océan, dans les programmes scolaires. Des modules pédagogiques multilingues, adaptés à tous les niveaux, sont développés. Les enseignants sont formés pour transmettre aux élèves non seulement des connaissances scientifiques, mais aussi un véritable sens des responsabilités. Lire aussi : Quand l'océan devient destinée : L'appel du Roi Mohammed VI à l'Afrique L'enjeu est de former des citoyens éclairés, capables d'agir pour un océan sain. À travers des projets pilotes — surveillance participative des plages, observation de la biodiversité marine — les élèves deviennent acteurs de la préservation de leur environnement. Cette approche concrète, valorisée à travers la réforme des écoles et des collèges pionniers qui renforce les liens entre l'école et les communautés, donne du sens à l'apprentissage et renforce le lien entre les jeunes et leur territoire. Ce lien est renforcé par des expériences de terrain. Dans plusieurs écoles côtières, des partenariats ont vu le jour avec des centres de recherche et des ONG locales. Les élèves participent à des campagnes de nettoyage, découvrent l'impact du plastique sur la vie marine et apprennent à adopter des gestes écoresponsables. Ces initiatives font naître une nouvelle conscience environnementale, porteuse d'espoir pour nos littoraux et nos océans. Mais au-delà des écoles, c'est l'ensemble du tissu éducatif, culturel et institutionnel qui est mobilisé. L'éducation à l'océan devient ainsi un vecteur de cohésion territoriale, en reliant les savoirs scientifiques aux traditions locales, les enjeux globaux aux réalités quotidiennes. Dans ce sens, elle contribue aussi à la valorisation des métiers de la mer et à l'émergence d'une économie bleue durable. Par ailleurs, l'UNESCO encourage la coopération régionale, favorisant le partage des bonnes pratiques entre pays méditerranéens et africains. Cette approche collaborative est essentielle face à la complexité des enjeux océaniques, qui dépassent les frontières nationales. Elle permet d'enrichir les expériences locales tout en construisant une réponse commune, à la hauteur des défis planétaires. L'éducation à l'océan n'est pas une mission isolée : elle s'inscrit dans un mouvement global de transformation écologique et sociale. Elle nécessite la mobilisation de tous les acteurs : pouvoirs publics, monde académique, société civile, secteur privé. Le Maroc s'est engagé sur cette voie, avec la ferme conviction que l'avenir de ses océans est l'affaire de tous. La conférence de Nice souligne l'urgence de cette mobilisation. Pour le Maroc et pour l'UNESCO, c'est un rendez-vous pour renouveler les engagements, renforcer les actions, et surtout, pour donner la parole à ceux qui construiront demain : les jeunes. Connectée, curieuse, ouverte sur le monde, la jeunesse marocaine est un levier essentiel de cette transformation. La sensibiliser à l'importance de l'océan, c'est lui donner les moyens d'imaginer des solutions durables aux défis écologiques, économiques et sociaux. C'est aussi renforcer son attachement à l'environnement, en valorisant les savoirs traditionnels liés à la mer. Déjà, des jeunes Marocaines et Marocains s'engagent, inventent, expérimentent. Certains développent des applications pour cartographier les déchets marins, d'autres créent des associations pour protéger la biodiversité côtière. Ces initiatives locales, souvent peu visibles, sont pourtant des catalyseurs puissants de changement, portés par l'énergie et la créativité de toute une génération. Protéger l'océan commence par le connaître. Et le connaître, c'est l'enseigner. L'éducation à l'océan est un levier puissant face aux menaces qui pèsent sur notre planète bleue. Pour le Maroc, fort de son patrimoine maritime et de sa jeunesse dynamique, il s'agit d'un enjeu vital — mais aussi d'une opportunité exceptionnelle. *Eric Falt est le Directeur régional de l'UNESCO pour le Maghreb et Représentant de l'UNESCO auprès de l'Algérie, la Libye, le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie.