Face à la dégradation progressive des terres oasiennes et à la vulnérabilité croissante des communautés rurales, un projet coordonné par l'Association Ibn Al Baytar, avec l'appui du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du ministère marocain de la Transition énergétique, mise sur une approche intégrée conciliant préservation de la biodiversité, lutte contre l'érosion des sols et promotion de l'économie sociale. Lancé en 2023, ce programme s'inscrit dans le cadre du Fonds pour l'environnement mondial (GEF/SGP) et porte sur plusieurs sites du sud-est du Royaume, notamment à Alnif, Tinjdad et Jorf. Son objectif : restaurer des terres dégradées, revitaliser les systèmes traditionnels d'irrigation — les khettarat — et développer des pratiques agricoles durables adaptées au contexte oasien. La réhabilitation de plusieurs hectares a déjà été engagée, avec le recours à des techniques d'agriculture régénérative, de lutte biologique, et à la diversification des cultures. Palmiers-dattiers, oliviers, plantes aromatiques et médicinales (cumin, henné) participent à la relance des revenus agricoles tout en renforçant la couverture végétale. Une initiative locale, un jardin dit "One Health", permet d'associer les enjeux de santé des sols, de biodiversité et de bien-être humain. Lire aussi : Smara se classe 6e au palmarès mondial des villes les plus chaudes Au-delà des interventions techniques, le projet accorde une place centrale au renforcement des capacités. Des centaines d'agriculteurs ont été formés aux nouvelles pratiques agroécologiques, dans un format mêlant sessions théoriques, expérimentations pratiques et échanges intercommunautaires. L'initiative s'appuie aussi sur la mobilisation des jeunes générations : des campagnes de sensibilisation sont menées auprès des étudiants de l'Institut des techniciens spécialisés en agriculture d'Errachidia, en lien avec les enjeux du protocole de Nagoya sur la biodiversité. Inclusion féminine et structuration économique Le projet s'attache à intégrer pleinement les femmes dans cette dynamique de résilience. Deux coopératives, Tiyni Alnif et Kmicha Tinjdad, ont été créées et reçoivent un appui renforcé sur les plans administratif, sanitaire (conformité ONSSA), commercial et technique. L'une d'elles a d'ores et déjà obtenu son certificat de conformité. Ces structures sont fédérées avec la coopérative Al Ijtihad Al Filahi au sein d'un Groupement d'intérêt économique (GIE), Mawrout Bladi, afin de mutualiser leurs capacités de production et d'accéder aux circuits de distribution à plus grande échelle. Une autoentreprise spécialisée dans la fabrication de compost à partir de résidus de palmiers a par ailleurs été lancée, participant à une économie circulaire locale. Pour garantir la pérennité des actions, l'AIB multiplie les partenariats stratégiques. Un accord avec la Fondation CDG prévoit la mise en place d'une plateforme de vente en ligne dédiée aux coopératives. En parallèle, un partenariat avec Barid al Maghrib vise à faciliter la logistique de distribution à l'échelle régionale et nationale. Le volet numérique et entrepreneurial est soutenu par des étudiants de l'Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), mobilisés pour former les bénéficiaires aux outils numériques et au développement d'activités génératrices de revenus. Le projet a également lancé un mécanisme original de parrainage de palmiers, permettant d'anticiper la commercialisation des dattes tout en finançant les plantations. Forte de trois décennies d'engagement en faveur des écosystèmes oasiens, l'Association Ibn Al Baytar poursuit ainsi son action au croisement des enjeux écologiques, économiques et sociaux.