Le Maroc vient de franchir une étape inédite dans son histoire judiciaire avec la première application du bracelet électronique à Tanger. Cette décision, entrée en vigueur en 2024, marque un tournant dans la justice marocaine. Des experts saluent une avancée en faveur de la réinsertion mais insistent sur la rigueur indispensable pour préserver la crédibilité du système. Pour la première fois dans l'histoire judiciaire du Maroc, un tribunal a choisi a choisi de substituer une surveillance électronique à une peine de prison ferme. En effet, le jugement, rendu à Tanger, a remplacé six mois d'incarcération par le port d'un bracelet électronique. Cette décision s'inscrit dans le cadre de la loi 43.22 sur les peines alternatives, entrée en vigueur en août 2024. Elle prévoit quatre mesures de substitution, à savoir le travail d'intérêt général, la surveillance électronique, les restrictions ciblées et l'amende journalière. Pour garantir l'efficacité de ce dispositif, les autorités disposent déjà de 650 bracelets prêts à être utilisés, selon une déclaration du directeur de l'action sociale et culturelle en faveur des détenus et responsable du suivi des sanctions alternatives. De même, leur mise en œuvre repose sur une plateforme nationale de surveillance à distance, installée à Rabat, et sur des équipes formées au sein de la Délégation Générale à l'Administration Pénitentiaire (DGAPR). À ce jour, 58 établissements pénitentiaires sur les 74 du pays ont déjà constitué des unités spécialisées pour accompagner l'application des sanctions alternatives. Lire aussi : Peines alternatives : mise au point face à des informations erronées en ligne Cependant, plusieurs défis demeurent, notamment les décrets d'application nécessaires pour préciser la gestion et le financement de ces mesures qui n'ont pas encore tous été publiés. Parallèlement, le coût de la surveillance électronique est estimé à plus de 100 millions de dirhams par an, selon un expert du ministère de la Justice. Ce montant reste toutefois inférieur à celui de l'incarcération classique. Dans la pratique, toute violation des conditions de port du bracelet entraîne automatiquement le retour à la peine initiale. En effet, les avocats ont insisté sur la nécessité d'une tolérance zéro afin de préserver la crédibilité du système. De plus, en réponse à une question parlementaire le 2 avril 2025, le ministre de la Justice, M. Abdellatif Ouahbi, a confirmé que l'introduction effective des bracelets à partir d'août 2025 constitue un test décisif pour la modernisation de la politique pénale et pour la réduction du taux de récidive. En outre, depuis le 22 août 2025, selon des médias, 29 jugements ont déjà été rendus dans le cadre des nouvelles peines alternatives, incluant le travail d'intérêt général et les amendes journalières. Pour rappel, au-delà du caractère inédit de ce jugement, les enjeux sont considérables. Le Maroc fait face à une surpopulation carcérale atteignant près de 130 % de la capacité d'accueil des établissements pénitentiaires, selon le rapport d'activités 2023 de la DGAPR. De surcroît, des experts ont affirmé que cette réforme vise en priorité à désengorger les prisons, et à favoriser la réinsertion sociale en permettant aux condamnés de préserver leurs liens familiaux et professionnels. L'objectif affiché est aussi d'humaniser les sanctions et de réduire la stigmatisation qu'entraîne l'incarcération, en adaptant la peine au profil de chaque mis en cause.