Le compte à rebours est lancé. À partir du 22 août 2025, la loi sur les peines alternatives entrera en vigueur. Pour s'y préparer, la primature appelle toutes les administrations à se mobiliser. Objectif : garantir une justice plus humaine et plus adaptée aux réalités d'aujourd'hui. Dans une circulaire datée du 18 juillet 2025, le chef du gouvernement, M. Aziz Akhannouch, a appelé l'ensemble des administrations centrales et déconcentrées concernées à accélérer la mise en œuvre effective de la loi 43.22 relative aux peines alternatives, dont l'entrée en vigueur est prévue pour le 22 août 2025. Cette initiative s'inscrit dans le cadre de la réforme globale du système judiciaire, conformément aux Hautes Orientations Royales visant à moderniser la politique pénale nationale. En effet, selon les médias, la circulaire souligne la nécessité d'une mobilisation collective et appelle à une coordination étroite avec la Délégation générale à l'administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR), désignée comme acteur principal du suivi et de la mise en œuvre des peines alternatives. Les responsables ministériels et institutionnels sont ainsi invités à finaliser les mesures préparatoires, à fournir les moyens logistiques nécessaires, et à proposer des modalités concrètes pour l'application des peines, notamment le travail d'intérêt général. Par ailleurs, le texte législatif, publié au Bulletin officiel le 22 août 2024, prévoit quatre types de sanctions pouvant se substituer à l'emprisonnement pour les délits passibles de cinq ans de prison au maximum, à condition qu'il n'y ait pas récidive. Il s'agit du travail d'intérêt général, de la surveillance électronique, de la restriction de certains droits et obligations de réinsertion, ainsi que de l'amende journalière. L'objectif est double : lutter contre la surpopulation carcérale et favoriser la réinsertion sociale des condamnés. Lire aussi : Peines alternatives : Comment la loi 43.22 entend désengorger les prisons Réparer plutôt qu'enfermer En fait, le travail d'intérêt général (TIG) figure parmi les mesures phares. Il consiste à effectuer des tâches non rémunérées au profit d'entités publiques, d'associations ou d'organismes à but social ou cultuel. Le nombre d'heures peut aller de 40 à 3.600, soit trois heures de travail pour un jour de prison. Ce dispositif, soutenu par les Nations unies, a déjà prouvé son efficacité dans plusieurs pays. En France, par exemple, plus de 30.000 TIG sont prononcés chaque année, et le taux de récidive y est bien inférieur à celui observé après un emprisonnement, selon une étude du ministère français de la Justice relayée par les médias. Autre outil introduit par la loi, la surveillance électronique. Elle consiste à imposer au condamné de rester dans un périmètre déterminé, à des horaires précis, sous contrôle d'un bracelet électronique. En effet, ce système permet un suivi rigoureux sans recourir à l'incarcération. Il est déjà utilisé dans des pays comme l'Espagne ou la Suède, où il a permis de désengorger les prisons. Au Maroc, cette mesure répond à un besoin urgent, alors que les établissements pénitentiaires accueillaient plus de 100 000 détenus en 2023, avec un taux d'occupation atteignant près de 130 %, selon le rapport d'activités 2023 de la Délégation générale à l'administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR). Par ailleurs, la loi prévoit des restrictions ciblées, notamment interdiction de fréquenter certains lieux, obligation de suivre un traitement médical, assignation à résidence, ou encore présentation périodique devant les autorités judiciaires. Ces obligations visent à maintenir un lien avec la société et à prévenir la récidive, dans une logique de justice réparatrice. Enfin, la quatrième modalité permet de convertir la peine de prison en une amende journalière. Le montant est fixé par le juge en fonction de la gravité de l'infraction, des circonstances et des moyens financiers du condamné. Cette mesure introduit une forme de flexibilité inspirée des modèles suisse et allemand, tout en maintenant le caractère dissuasif de la sanction. Une réforme à construire En outre, d'un point de vue institutionnel, le directeur des Affaires pénales, Hicham Malati, a indiqué, dans une déclaration à la Map, que son département avait adopté une démarche parallèle de refonte du Code pénal et du Code de procédure pénale. Il a également insisté sur la nécessité d'un accompagnement médiatique et d'une sensibilisation du grand public pour garantir une bonne compréhension des peines alternatives. D'un point de vue académique, selon la Map, des spécialistes du droit considèrent cette réforme comme une réponse aux limites du système pénal marocain, hérité du code de 1961. Dans une déclaration à la Map, Bouthaina Karouri, professeure de droit à l'université Mohammed-V de Rabat, a souligné que le recours exclusif à la privation de liberté n'a pas permis de freiner la récidive ni de répondre aux enjeux sociaux de la criminalité. Elle plaide pour une politique pénale cohérente, accompagnée d'un effort en matière de formation des ressources humaines. De surcroît, ces experts affirment que la réussite de cette réforme dépendra de la capacité des institutions à coopérer, à former les professionnels concernés et à assurer une application équitable de ces peines sur tout le territoire. À l'image des expériences internationales, comme en Norvège ou aux Pays-Bas, l'enjeu est d'instaurer une justice plus humaine, plus efficace et adaptée aux réalités sociales du pays. En outre, plusieurs textes réglementaires sont attendus pour permettre la mise en application concrète de la loi. Le premier encadre les missions de la DGAPR, tandis que le second précise les modalités de gestion du bracelet électronique, en lien avec une société spécialisée en cours de sélection.