Le président Abdelmadjid Tebboune a de nouveau placé la « justice sociale » et « l'amélioration du quotidien des citoyens » au centre de son discours, à l'occasion du Conseil des ministres du 21 septembre 2025. Présentée comme le fil conducteur de son mandat, cette priorité sociale, martelée depuis son élection en décembre 2019, s'accompagne d'annonces récurrentes sur les subventions, la revalorisation des salaires et la construction de logements. Mais derrière les proclamations officielles, les résultats apparaissent contrastés. Le chef de l'Etat a rappelé à son nouvel exécutif que « les préoccupations des citoyens doivent être placées au cœur des plans d'action », une formule devenue leitmotiv dans chacun de ses discours. Tebboune met régulièrement en avant les transferts sociaux – évalués à plusieurs milliards d'euros chaque année – et le maintien des prix subventionnés de produits de base comme le lait, la semoule ou l'électricité. La loi de finances 2025 a reconduit ces dispositifs, dans une logique de continuité avec les décennies précédentes. Pourtant, cette orientation, présentée comme une singularité de son mandat, n'a rien de nouveau : depuis l'indépendance, aucun gouvernement n'a osé démanteler ce « contrat social » hérité de la rente pétrolière. Les promesses de rupture s'inscrivent donc dans une tradition plus que dans une innovation. Lire aussi : Sahara : l'Algérie face à l'étau diplomatique du plan d'autonomie marocain Le président aime à rappeler le programme dit des « zones d'ombre », lancé dès 2020, censé effacer les stigmates de l'Algérie périphérique. Il affirme que 82 % des problèmes ont été « résolus » en deux ans et que ces zones de marginalisation devaient « disparaître d'ici 2023 ». Mais sur le terrain, la persistance de coupures d'eau, de routes impraticables et d'un accès limité aux services publics relativise l'optimisme présidentiel. Le discours officiel s'articule autour d'un registre de dignité retrouvée et de « République sociale ». En décembre 2024 devant le Parlement, Tebboune a juré de « préserver la dignité des citoyens » et de poursuivre les projets destinés à améliorer leur vie quotidienne. En avril 2025, à Béchar, il a répété son engagement en insistant sur la hiérarchisation des priorités et sur la poursuite de programmes déjà annoncés. Cependant, ces déclarations soulignent autant une volonté de communication qu'une réalité tangible. Si les allocations sociales permettent d'amortir certaines inégalités, l'économie algérienne reste dépendante de la rente hydrocarbure, exposée aux fluctuations des prix du pétrole et du gaz. Les réformes structurelles tardent, et les indicateurs sociaux – chômage des jeunes, précarité dans les zones rurales, crise des services publics – demeurent préoccupants. En multipliant les proclamations sur la « justice sociale », Tebboune tente d'ancrer son image de président protecteur. Mais l'écart entre les discours répétés et l'expérience vécue par une grande partie de la population alimente un scepticisme croissant. Derrière la rhétorique du « credo social », c'est toute la question de la soutenabilité d'un modèle étatique fondé sur des subventions massives et des annonces symboliques qui reste posée.