L'ancienne chancelière allemande Angela Merkel, au pouvoir durant quatre mandats (2005-2021), a appelé, dans un entretien relayée par les médias, à une "démarcation claire" vis-à-vis du parti d'extrême droite, "Alternative pour l'Allemagne" (AfD), tout en défendant sa politique migratoire et d'asile de 2015, qui a ouvert les portes de l'Allemagne à plusieurs milliers de réfugiés. Mme Merkel a déclaré qu'il s'agissait alors de répondre à la question de savoir si l'Europe devait "accueillir dignement des personnes en détresse ou recourir à des canons à eau", soulignant que le respect de la dignité humaine avait guidé ses décisions. Elle a reconnu que l'afflux massif de réfugiés avait contribué à la montée de l'AfD, mais estimé que d'autres facteurs expliquaient également l'essor du parti. Elle a rappelé qu'au moment de son départ de la chancellerie, l'AfD recueillait entre 11 et 12% des voix, contre 20,6% lors des dernières législatives. Mme Merkel a insisté sur le fait que la mission de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), parti qu'elle présidait et qui est aujourd'hui dirigée par l'actuel chancelier Friedrich Merz, est de rassembler au centre "sans renoncer à ses valeurs" et d'éviter de polariser davantage la société. Lire aussi : Droits de douane US: l'Allemagne veut des « négociations sérieuses » Elle a justifié la nécessité d'une démarcation nette avec l'AfD en relevant que ce parti remettait en cause l'égalité des citoyens et "troublait la démocratie". Dans ce sens, Mme Merkel a critiqué toute coopération parlementaire avec l'AfD, citant ses positions sur l'OTAN, l'Union européenne, et la dignité humaine, reprochant à M. Merz d'accepter des votes communs sur des motions migratoires. Par ailleurs, l'ancienne chancelière a renouvelé ses critiques contre les refoulements aux frontières intérieures de l'Allemagne décidés par le nouveau ministre de l'Intérieur, Alexander Dobrindt. Le gouvernement en fonction depuis le 6 mai dernier a décidé d'instaurer des contrôles à l'ensemble des frontières du pays, une mesure qu'elle juge contradictoire avec le droit européen. Interrogée sur sa célèbre formule "Wir schaffen das" (Nous y arriverons), symbole de la politique d'ouverture de l'Allemagne envers les réfugiés, elle a estimé que "beaucoup avait été accompli, mais pas tout", saluant les réfugiés aujourd'hui intégrés et actifs dans la société, tout en reconnaissant certains cas d'intégration inachevée ainsi que la présence de violents extrémistes parmi eux. Surnommée par les Allemands la Dame de Fer, Mme Merkel a par ailleurs exprimé ses regrets concernant le soutien insuffisant aux camps de réfugiés dans des pays tiers comme la Jordanie, avertissant contre de nouvelles réductions des budgets d'aide au développement et à l'humanitaire, une évolution qu'elle observe "avec inquiétude".