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Corruption : Les juges espagnols mettent à nu les complicités d'Etat en Algérie
Publié dans Maroc Diplomatique le 30 - 09 - 2025

C'est une histoire de dissimulation méticuleuse, de contrats géants, de cabinets de conseil devenus relais d'influence, et de privilèges monnayés au plus haut niveau d'un Etat. Mais surtout, c'est l'histoire d'un système qui, pendant des années, a fait de la corruption non pas un accident de parcours, mais une méthode de gouvernement. Ce système, c'est celui de l'Algérie sous Abdelaziz Bouteflika. Et ce n'est pas à Alger, mais à Madrid que la lumière s'est faite sur une partie de ses rouages.
La justice espagnole, après plus de dix années d'enquête, vient d'ordonner la tenue d'un procès d'une ampleur exceptionnelle. Vingt-trois personnes y seront jugées pour des faits de corruption internationale, falsification de documents, et appartenance à une organisation criminelle. Parmi elles, deux anciens députés du Parti populaire espagnol, Pedro Gómez de la Serna et Gustavo de Arístegui, également ancien ambassadeur d'Espagne en Inde. Mais au-delà des individus mis en cause, c'est tout un système de connivence et de prédation entre milieux d'affaires espagnols et réseaux politico-économiques algériens qui se trouve aujourd'hui exposé.
Tout commence en 2009, lorsqu'un cabinet de conseil du nom de Voltar Lassen est fondé par les deux parlementaires espagnols. Officiellement dédié à l'accompagnement stratégique des entreprises désireuses de s'implanter en Afrique du Nord, le cabinet va rapidement se transformer en plateforme de corruption institutionnalisée. Grâce à un intermédiaire espagnol, Cristobal Lomé, installé en Algérie et désormais décédé, Voltar Lassen va jouer un rôle central dans l'obtention de marchés publics en Algérie, à condition de rétrocéder un pourcentage des sommes engagées aux décideurs locaux.
Marchés publics, faux contrats et privilèges dissimulés
Le premier cas emblématique, qui cristallise l'attention des juges espagnols, concerne la construction d'une usine de dessalement d'eau à Souk Tlata, dans la région de Tlemcen. Le marché, d'un montant de 250 millions d'euros, est attribué à l'entreprise Elecnor. En contrepartie, 2,5 millions d'euros sont répartis entre les facilitateurs espagnols et algériens. Ces derniers ne sont pas de simples techniciens de l'administration, ce sont des personnalités bien introduites dans les sphères du pouvoir. L'un d'eux, Abdelaziz Natouri, se voit gratifié d'un bien immobilier en France d'une valeur de 245.000 euros. Un autre, Amar Aouci, reçoit un appartement à Malaga estimé à 300.000 euros. Les faveurs s'étendent même à la scolarisation et au logement de la fille d'un haut fonctionnaire algérien, dont les frais sont intégralement couverts par les acteurs espagnols.
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Mais l'histoire ne s'arrête pas là. En 2013, un nouvel appel d'offres est lancé pour la construction d'un tramway à Ouargla, au sud du pays, pour un montant de 230 millions d'euros. Le contrat revient à un groupement composé de Rover Alcisa, Assignia et Elecnor. Comme pour le précédent projet, les coulisses révèlent un ballet de commissions dissimulées. Cette fois, les sommes transitées s'élèvent à 737.000 euros pour les représentants espagnols, tandis que Smaine Koriche, chef de projet côté algérien, aurait perçu à lui seul 850.000 euros, selon les conclusions du parquet.
Ce schéma de collusion repose sur un mécanisme d'une redoutable efficacité. D'un côté, des entreprises en quête de marchés. De l'autre, une administration algérienne ouverte à la négociation, pourvu que la transaction se pare de justifications techniques, d'accords de coopération ou d'avenants diplomatiques. Entre les deux, un cabinet chargé de dissimuler les flux financiers à l'aide de sociétés écrans et de virements offshore, souvent domiciliés à Dubaï. Il ne s'agit donc pas d'un simple scandale isolé, mais bien de l'expression d'un mode opératoire structuré, inscrit dans le fonctionnement quotidien de la commande publique algérienne durant les années Bouteflika.
Un Etat silencieux face à l'exposé de ses propres dérives
Ce qui rend cette affaire particulièrement révélatrice, c'est le contraste entre l'activisme judiciaire espagnol et la passivité prolongée des institutions algériennes. Les premiers articles de presse évoquant ces pratiques datent de 2016. Ils mentionnaient déjà les noms d'Omar Alilat, ancien député du RND, et de Zine Hachichi, conseiller à la présidence, comme figures algériennes clés du système. Pourtant, il faudra attendre novembre 2019, soit trois ans plus tard, pour que des poursuites soient engagées à leur encontre, et encore, dans le cadre d'un autre dossier. Incarcérés un temps à El Harrach, ils seront rapidement libérés après l'élection d'Abdelmadjid Tebboune, sans jamais être inquiétés pour les faits décrits par la justice espagnole.
Ce silence algérien contraste fortement avec le poids du réquisitoire présenté à Madrid. Le parquet espagnol réclame dix-huit années de prison pour les deux anciens députés et de lourdes sanctions à l'encontre de cinq entreprises impliquées. Les avocats de la défense ont un mois pour présenter leurs contre-arguments. Mais les preuves accumulées ( virements, contrats, communications, transferts de propriété ) rendent difficile toute contestation sérieuse de l'architecture du dossier.
Ce procès à venir ne se contentera pas d'établir des responsabilités individuelles. Il offre à l'opinion publique une cartographie précise des circuits de corruption transnationale qui ont permis à des entreprises étrangères d'acheter leur accès au marché algérien. Il dévoile surtout un système où l'appareil d'Etat a été complice pour servir des intérêts privés, au mépris de l'éthique, de la transparence et, plus fondamentalement, de la souveraineté populaire.
Alors que le pouvoir algérien continue de se présenter comme le gardien des principes anti-impérialistes et de la justice sociale, ce dossier en révèle une toute autre image : celle d'une élite déconnectée, accrochée à ses privilèges, et prête à sacrifier l'intérêt général pour quelques comptes bancaires bien garnis. Si procès il y a, il ne devra pas seulement juger des actes passés, mais éclairer un présent encore marqué par l'opacité et l'impunité.


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