Un rapport de l'Observatoire national de la criminalité révèle une progression alarmante des crimes de falsification, de contrefaçon et d'usurpation de fonction, de titre ou d'identité au Maroc entre 2002 et 2022. Ces infractions, étroitement liées à la criminalité économique et numérique, se complexifient et représentent un défi majeur pour les autorités chargées de préserver la confiance publique et l'intégrité administrative. L'Observatoire national de la criminalité dresse, dans son dernier rapport intitulé « Indicateurs statistiques de la criminalité au Maroc sur vingt ans », un constat préoccupant : la falsification de documents, la contrefaçon et l'usurpation d'identité, de titre ou de fonction ont connu une hausse significative au cours des deux dernières décennies. Ces infractions, autrefois marginales, sont devenues l'une des formes de délinquance les plus complexes, tant par leur volume que par leur caractère polymorphe. Les données couvrant la période 2002–2022 mettent en évidence une tendance générale à la hausse, jalonnée de deux pics significatifs en 2005 et 2019. En 2005, plus de 7 000 affaires ont été enregistrées, soit une augmentation de 17 % par rapport à 2004, tandis que le nombre de personnes poursuivies a bondi à plus de 10 000, une hausse de 86 % en un an. Quatorze ans plus tard, en 2019, un nouveau sommet est atteint avec plus de 9 000 affaires et 12 000 personnes poursuivies, avant une légère décrue les années suivantes qui n'atténue pas la gravité du phénomène. Sur l'ensemble de la période, les usurpations d'identité, de fonction ou de titre constituent près de la moitié des cas, totalisant plus de 60 000 affaires et 80 000 personnes poursuivies. La falsification de documents administratifs et de certificats officiels représente 32,3 % des infractions recensées, suivie des faux en écriture commerciale ou bancaire. L'expansion de ces catégories reflète la transformation structurelle de la criminalité : elle devient davantage économique, sophistiquée et, de plus en plus, dématérialisée. Lire aussi : Coup de filet à Tétouan : Deux trafiquants arrêtés, 26 000 comprimés saisis L'essor des technologies de l'information, la circulation accrue des données personnelles et l'ouverture de nouveaux canaux de communication ont facilité l'émergence de fraudes en ligne et d'usurpations difficiles à détecter. Cette mutation impose aux services chargés de l'ordre public et à l'appareil judiciaire une adaptation permanente, tant sur le plan technique que sur le plan réglementaire, pour répondre à des infractions qui exploitent souvent des failles administratives et numériques. Parallèlement, le phénomène s'inscrit dans une hausse générale de la délinquance : le nombre total d'affaires est passé de 324 000 en 2002 à plus d'un million en 2022, témoignant d'une diversification des formes de criminalité et d'une intensification des signalements et des procédures judiciaires. Face à ce constat, le rapport se veut un instrument stratégique pour la décision publique en constituant une mémoire statistique et une base de données unifiée, utile à la recherche et à l'élaboration de politiques pénales fondées sur des preuves. La lutte contre les délits de faux et d'usurpation est aujourd'hui un enjeu crucial pour la sécurité juridique, la stabilité économique et la confiance des citoyens. Selon l'Observatoire national de la criminalité, elle nécessite une approche multisectorielle, alliant renforcement des dispositifs de prévention, modernisation des outils d'enquête numérique et coopération internationale, afin de freiner une dynamique qui fragilise l'intégrité administrative et la confiance publique.