A défaut d'être un stratège, le secrétaire général du parti de l'Istiqlal est un fin tacticien. Au lendemain de sa débâcle électorale personnelle du 4 septembre dernier, Hamid Chabat avait fait du pied au PJD, et avait œuvré à se rapprocher du courant Bila Haouda (« intransigeance »). Lundi 11 janvier, la réconciliation avec Abdelwahed el Fassi étant consommée et actée, il reprend ses tirs contre Abdelilah Benkirane. Cela mûrissait depuis plusieurs mois...exactement depuis que sa politique casse-cou et casse-tout l'avait menée droit au mur. Le 4 septembre et les jours suivants, Hamid Chabat devait perdre son fief électoral de Fès, la Région qui va avec et, surtout, sa crédibilité et sa position incontestée au sein du parti. Il avait alors entrepris de se réconcilier avec le courant des « el Fassi » à l'Istiqlal. Les choses avaient mûri, puis elles ont pris forme sur la tombe du fondateur, et père d'Abdelwahed, Allal el Fassi, en ce 11 janvier commémorant la présentation du manifeste de l'indépendance, le 11 janvier 1944. Dans une déclaration recueillie en marge de la cérémonie, Chabat a parlé de l'unité du parti, d'une sorte de renaissance de la formation, de la réconciliation des membres et des courants... et aussi de la nécessité de parachever l'intégrité territoriale, avec Sebta et Melilla, mais aussi Tindouf et Colomb-Béchar, en Algérie ; mais il a aussi profité de cette occasion pour dire tout le mal qu'il pense du gouvernement, en matière d'emploi, sa santé, de logement, sachant que la veille il donnait l'accolade au chef dudit gouvernement... Chabat et les siens avaient auparavant reçu en grande pompe el Fassi et les siens, dont l'ancien premier ministre Abbas el Fassi. Pour sa part, Abdelwahed el Fassi s'est félicité de son retour, et de celui de Bila Haouada, à « la source pure », « que nous n'avions pas quittée mais dont nous nous étions quelque peu éloignés ». El Fassi rejoint donc son ancien adversaire pour la présidence du parti en disant que « ce jour est le point de départ du travailler-ensemble en vue d'atteindre les objectifs souhaités ». Mais tel n'est semble-t-il pas le souhait d'une frange importante du Comité exécutif, en cela que tout le monde aura remarqué l'absence à la cérémonie de grande réconciliation de Taoufiq Hjira, président du Conseil national, de Karim Ghellab, de Yasmina Baddou et de son ancien chef de cabinet au ministère de la Santé Rahhal Mekkaoui. Abdallah Bakkali non plus n'était pas là, et Abdessamad Qayyouh et Hamdi Ould Rachid. En tout, la moitié du Comité exécutif a boycotté le plaisir de la réconciliation. Alors, réconciliation ou pas au sein de l'Istiqlal ? Chabat ne veut pas ouvrir plusieurs fronts à la fois, alors il s'est rapproché d'el Fassi en attendant, peut-être, le retour des autres au bercail. Rien n'est moins sûr...