Une blessure au pied n'aura pas marqué la fin de sa carrière. Yassine Echahdi en a même fait un nouveau départ. Des rues de Ouezzane et des clubs marocains, aux terrains de Toulouse et de Strasbourg, puis aux célèbres usines Ricoh et à un restaurant marocain à Cormeilles, les chapitres de vie de cet ancien Lion de l'Atlas s'entrecroisent. Tout a commencé à Ouazzane. Dans les années 1980, Yassine Echahdi a fait du football plus qu'une simple passion. Se projetant vers un avenir meilleur, il a débuté sa carrière sportive avec l'Olympique Ouazzane, avant de passer à Belksiri et à plusieurs autres clubs locaux. Ses performances remarquables lui ont valu une convocation en équipe nationale du Maroc, en 1988, pour la Coupe d'Afrique des nations (CAN). Mais la chance n'a pas été de son côté. Une blessure à la jambe l'a empêché de poursuivre son parcours avec la sélection. À cette époque, le football a été le rêve des pauvres, comme le dit Yassine. Il a ajouté lors de sa conversation avec Yabiladi : «Dans les années quatre-vingt, la plupart de ceux qui jouaient au football professionnellement étaient des enfants de familles modestes, et j'étais l'un d'eux. Je vivais avec huit sœurs, je devais gagner de l'argent et les aider dans leurs études. Donc j'ai mis un bandage autour de ma jambe et je me suis forcé à continuer à jouer, afin de continuer à toucher mon salaire. Malheureusement, la blessure s'est aggravée et je ne me suis pas rétabli correctement.» Quand une blessure devient un nouveau départ Mais Yassine a été assez chanceux. Il a expliqué : «J'étais avec le Raja d'Agadir. Nous avons joué un match amical contre Toulouse. Après lors du dîner après, j'ai rencontré le célèbre joueur Dominique Rocheteau, qui était le capitaine de l'équipe française à l'époque. J'ai exprimé mon désir d'avoir une expérience professionnelle en France». Le vœu du footballeur marocain s'exhauce. Malgré son intégration à l'équipe de Toulouse, Yassine n'a pas pu officiellement rejoindre les rangs, en raison du système de quotas limitant le nombre de joueurs étrangers. Il a ensuite déménagé à Strasbourg, mais cette période a coïncidé avec la guerre du Golfe, qui a affecté les décisions de résidence pour les étrangers. Par ailleurs, les séquelles de la blessure mal rétablie le rattrapent. À ce moment-là, Yassine a 24 ans. Il a réalisé qu'il perdait du temps à attendre une opportunité qui pourrait ne pas venir. Il a décidé de chercher un emploi qui assurerait sa stabilité et aiderait sa famille au Maroc. Il a choisi de suivre une formation professionnelle rapide. Il a obtenu un permis de conduire de véhicules lourds en seulement trois jours, puis il a travaillé pour la célèbre entreprise d'équipements d'impression Ricoh Industrie France. «J'ai été présenté comme un joueur de football professionnel. Mes collègues ont été surpris. Les circonstances étaient difficiles et même si le salaire était faible, c'était significatif pour moi. J'ai été contraint de chercher une alternative malgré mon grand amour pour le football.» Yassine Echahdi Mais Yassine n'a pas abandonné sa passion pour le football. Il a décidé, avec quelques collègues, d'organiser des matchs au sein de l'entreprise. Au fil du temps, un club de la société voit le jour et des matchs avec des équipes d'autres succursales «Ricoh» dans différents pays sont organisés. D'une simple idée, l'initiative s'est transformée en un championnat mondial, qui existe à ce jour. Yassine y est présent chaque année comme invité d'honneur. Il raconte fièrement : «L'idée était la mienne. Au fil du temps, nous avons eu un véritable championnat mondial au sein de l'entreprise. En interne, j'ai été promu manager en quatre ans et j'y ai travaillé pendant vingt ans.» Mais après deux décennies de travail stable, Yassine commence un nouveau chapitre de sa vie. L'entreprise a annoncé un nouveau projet impliquant le recours aux robots au lieu de la main-d'œuvre humaine. Il se souvient de ce moment en disant : «Quand j'ai vu la présentation, j'ai ressenti le danger et j'ai immédiatement commencé à penser à une alternative.» En effet, le hasard l'a conduit à une expérience nouvelle. Avec son épouse, ils repèrent un restaurant de trois étages à vendre. Il raconte : «Ma femme adore cuisiner, donc l'idée d'acheter le restaurant en 2009 nous est venue. L'endroit avait été abandonné et fermé pendant neuf ans et nécessitait beaucoup de rénovations. J'ai démissionné de mon emploi et me suis consacré au travail. Le montant que j'ai reçu de l'entreprise a beaucoup aidé.» Les rénovations ont nécessité plusieurs mois de travail continu. Durant cette période, Yassine a perdu 14 kilogrammes en raison de la fatigue et de la pression. L'argent s'épuisait, et il n'avait pas d'autre ressource, mais il a été déterminé à achever l'ouvrage. Lorsque le Touareg Colmar a ouvert, la réalité a dépassé toutes les attentes. «Nous nous attendions à un petit nombre de clients, mais nous avons été surpris lorsque le restaurant était complètement plein. Grâce à Dieu, nous avons surmonté la pression. L'adresse est devenue bien connue, accueillant ambassadeurs et hauts responsables.» Yassine Echahdi Premier Marocain à la Fédération internationale de l'Histoire et des statistiques du football Malgré son emploi du temps chargé avec le restaurant, Yassine est resté lié au football, supervisant l'entraînement de plusieurs équipes. En 2014, il a décidé, avec d'autres amis, de créer une association sportive qui a organisé un tournoi mondial de football féminin appelé la «Girls Alsace Cup», réunissant des équipes du monde entier. En 2016, ils ont invité l'équipe nationale féminine marocaine à participer. Plus tard, en 2018, Fouzi Lekjaa l'a contacté pour organiser un événement similaire au Maroc. À propos de cette phase, Yassine raconte : «Nous avons travaillé dessus et l'avons organisé au Complexe Mohammed VI en 2022. Nous avons invité plusieurs équipes de différents pays européens. Même si la période de la pandémie était difficile et a vu la fermeture des frontières, tout s'est passé sans accroc. Nous l'avons organisé à l'occasion de la Journée de la femme, sous le nom de l'association que j'avais fondée, qui a changé de nom pour Mobile Academy en 2018, et a ouvert une branche à Ouazzane.» Yassine a également formé plusieurs partenariats avec des équipes marocaines et européennes sous le nom de son association. En 2020, il a rejoint la Fédération internationale de l'Histoire et des statistiques du football (IFFHS), une organisation indépendante chargée de collecter et de documenter les données et les records liés au ballon rond dans le monde entier, en plus de publier des classements et des récompenses annuels. Yassine occupe aujourd'hui le poste de membre exécutif chargé des relations externes au sein de cette institution, le premier Marocain à occuper ce poste. Yassine, père d'un fils et d'une fille, déclare fièrement : «À cet égard, je travaille beaucoup pour mettre en lumière le Maroc et les noms marocains. Récemment, nous avons décerné à Soufiane Rahimi le titre de meilleur buteur international au monde.» Yassine n'hésite pas à affirmer que sa femme, qui travaille avec lui au restaurant, est le secret de son succès : «Derrière le succès de chaque homme se trouve une femme. Elle me soutient toujours et compense mon absence dans le projet de restaurant.» Il conclut en disant : «Je peux dire que mon épouse est la colonne vertébrale de notre famille.»